Aujourd’hui plus que jamais, les victimes osent davantage prendre la parole et partager leurs expériences. Grâce à elles, notre société est de plus en plus sensibilisée au traumatisme. On sait à quel point celui-ci perturbe les rouages du corps, du cerveau et de l'esprit. Dans “Le corps n’oublie rien”, best-seller du New York Times, le psychiatre Bessel van der Kolk fait le point sur le stress post-traumatique, ses conséquences sur la vie des victimes, et les moyens de s’en libérer.
Le psychiatre américain d'origine néerlandaise, Bessel van der Kolk a passé les quarante dernières années de son existence à analyser les traumatismes. Il a recueilli les paroles d’innombrables victimes de guerre, d’agression, d’inceste et de viol et a mené des décennies d’études cliniques sur le stress post-traumatique avec des enfants et des adultes traumatisés, depuis son bureau du “Trauma center” à Boston. L’ensemble de ce qu’il a retenu et compris de ce vaste champ d’étude est aujourd’hui regroupé dans une somme passionnante, Le corps n’oublie rien, que chaque lecteur sensibilisé personnellement ou professionnellement à ce sujet devrait rapidement se procurer.
Cet ouvrage rigoureux et très documenté fait la part belle aux témoignages personnels de victimes et la manière dont elles font face aux expériences extrêmes. A chaque fois, le psychiatre analyse les symptômes du stress post-traumatique (panique, crises d’anxiété ou de colère, amnésie, paralysie, désordre émotionnel etc) et précise les différentes voies thérapeutiques grâce auxquelles les victimes ont pu surmonter leur trauma et retrouver une vie normale. Particulièrement intéressé par les thérapies corporelles, Bessel van der Kolk fait un tour d’horizon précis des techniques aujourd’hui utilisées dans le milieu médical, qu’il s’agisse de l’EMDR pour se détacher du passé, de la pratique de la pleine conscience, de la thérapie du système limbique ou de la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), de l’aide des neurosciences et en particulier du neurofeedback pour reprogrammer les circuits de la peur, mais aussi du yoga, du théâtre ou de la chorale pour que les victimes se réapproprient leur corps et leur esprit, et apprennent à mieux “connaître leur paysage intérieur”.
Le corps n’oublie rien est aussi une saisissante plongée dans l’univers de la psychiatrie, l’auteur relatant l’histoire des pionniers de cette discipline, de Charcot et Janet à Freud en passant par Winnicot, jusqu’à nos jours. Trop longtemps négligé en France, le traumatisme est devenu un enjeu de santé publique qu’il est urgent de traiter, en particulier avec les enfants, pour éviter que les schémas de violence ne se répètent. “Le corps n’oublie rien” contribue à cette réhabilitation tout en donnant un sens à la souffrance des victimes.
Vidéo de la conférence de Bessel van der Kolk à l'occasion de la sortie de son livre