Lisez! icon: Search engine
Par le cherche midi éditeur, publié le 28/08/2019

Emmanuelle Pirotte : l'interview

Nous avons rencontré Emmanuelle Pirotte, historienne, scénariste et auteure qui publie son quatrième roman après le succès phénoménal de Today We Live (2015, traduit en plus de quinze langues, lauréat du prix Historia et du prix Edmée de La Rochefoucauld, ainsi que du prix des Lycéens en Belgique), De profundis et Loup et les hommes.

Il pensait à elle, c’était elle qu’il voulait émerveiller, qu’il voulait ravir. Il lui avait menti, car il brûlait de l’enlever à son ennui, à son Dieu, à Walter, à tout ce qui l’empêchait d’être à lui. Ou plutôt, et avant tout, à elle-même.

Walter a recueilli chez lui son ami Christopher Marlowe, laissé pour mort après une rixe. Dans le manoir au bord de la falaise, le poète en sursis rencontre Jane, l’épouse de son hôte. Entre ces deux insoumis naît une passion rare. Les corps et les esprits s’unissent dans un élan charnel et artistique, un amour hanté par la création et l’urgence du temps qui reste.

D’innombrables soleils est à la fois une plongée dans l’intimité de deux amants, l’évocation d’un des poètes les plus fascinants de l’Angleterre élisabéthaine, et un vibrant hommage à la littérature. Porté par une écriture incandescente, le quatrième roman d’Emmanuelle Pirotte fait la preuve de son talent inclassable, se jouant de toute frontière littéraire.

Nous avons rencontré cette historienne, scénariste et auteure qui publie son quatrième roman après le succès phénoménal de Today We Live (2015, traduit en plus de quinze langues, lauréat du prix Historia et du prix Edmée de La Rochefoucauld, ainsi que du prix des Lycéens en Belgique), De profundis et Loup et les hommes.

 

Lorsqu’on vous lit, on voyage à travers les siècles.

Vous avez le talent de conter l’histoire, de la rendre accessible à tous. Vos mots nous invitent à un dépaysement total, à la croisée des chemins aux côtés d’Armand dans les terres du Nouveau Monde dans Loup et les hommes ou en plein cœur de l’Allemagne nazie dans Today We Live. Dans D’innombrables soleils, vous vous êtes intéressée à l’Angleterre élisabéthaine.

Quelle époque a votre préférence ?

Aucune époque en particulier. Toutes les époques dans lesquelles j’ai fait évoluer des personnages, une histoire, font partie de celles qui me font rêver depuis l’enfance. Le xviisiècle est particulièrement romanesque, l’époque de la fin du règne d’Élisabeth en Angleterre aussi. C’est une période de formidable effervescence artistique, intellectuelle, spirituelle, politique, une ère charnière dans l’histoire de l’Occident. Et il y règne un mélange de sauvagerie et d’extrême raffinement qui ne peut que fasciner les romanciers.

 

Christopher Marlowe, votre personnage principal, est né en 1564 et mort le 30 mai 1593. Ce dramaturge, poète et traducteur anglais de l’ère élisabéthaine est connu pour sa maîtrise du pentamètre iambique, pour ses protagonistes emblématiques… mais également pour sa mort violente, prématurée et entourée de mystère. Pourquoi avoir choisi d’écrire sur cet homme ?

Au départ, je pensais créer un personnage de toutes pièces, comme je l’ai toujours fait auparavant. Un dramaturge, poète, provocateur et excessif. Quand je me suis penchée sur la figure de Marlowe, je me suis dit qu’il n’était pas nécessaire d’inventer ce personnage, puisqu’il existait déjà, qu’il était même au-delà de ce que je pouvais espérer. Nous avons peu de traces de la vie de Marlowe, mis à part ses œuvres mais elles en disent pas mal sur l’homme, et ce que nous en apprenons est passionnant et troublant. Les lacunes de l’histoire m’ont laissé autant de béances, de vides où exercer mon imagination.

 

Vous êtes auteure et scénariste mais également historienne. Cela vous aide-t-il dans votre travail d’écriture ?

Bien sûr, ma formation en histoire et histoire de l’art, mes années de recherche m’aident à chaque instant lorsque j’écris des romans qui se déroulent dans le passé. On acquiert des méthodes, des réflexes, une rapidité, un certain flair pour savoir où chercher, quels sont les ouvrages vraiment sérieux, on apprend vite à trier les sources accessibles sur Internet. C’est extrêmement précieux. Il y a aussi l’habitude de se plonger dans d’autres espaces-temps, d’autres mœurs. Et puis le chercheur professionnel a, je crois, une honnêteté fondamentale, cela dit partagée avec bien des romanciers qui n’ont pas de formation académique.

 

Sensuel, envoûtant, poétique. Trois mots pour présenter D’innombrables soleils. On pourrait même y ajouter intense et charnel car Marlowe et Jane, c’est le chaos d’une passion fiévreuse et dévorante, c’est un amour qui consume totalement. Vos mots transpirent l’union des corps, l’exaltation et la souffrance des deux amants. C’est la première fois que vous abordez la passion amoureuse aussi crûment. Était-ce un exercice facile pour vous ?

Je me suis lancée à corps perdu dans cette histoire d’amour, de désir, de création. Mais non sans une certaine inquiétude, c’est vrai. Parce que évoquer la passion, c’est pour un écrivain quelque chose de périlleux, comme pour un cinéaste, je crois. C’est un thème vieux comme le monde, déclinable à l’infini, mais qui contient ses écueils, ses clichés à éviter, mais aussi ses archétypes magnifiques. Le plus difficile est sans doute l’évocation de l’amour physique, mais c’est aussi très exaltant, parce qu’il faut une sincérité pour que cela « sonne » juste, il y a des choses incontournables, dont on ne peut faire l’économie, et c’est le langage qui va les transmettre, les rendre vivantes, présentes pour le lecteur. La passion amoureuse est LE thème littéraire par excellence, je veux dire que c’est dans la matière même du langage, dans l’écriture à l’œuvre et sa dimension poétique que la passion des corps va trouver son incarnation, sa vérité. On peut décrire les rues de Paris à l’aube avec le degré zéro de la langue. Ce ne sera pas terrible mais ça passera. Mais découvrir deux êtres qui font l’amour dans une écriture indigente, c’est insupportable. C’est un thème qui exige un certain niveau de langage. Alors que c’est un des plaisirs les plus viscéraux, les plus éloignés du caractère analytique, cérébral du langage.

 

D'innombrables soleils
Il regagna sa chambre dans la nuit, se mit à écrire tout en buvant. Il plongea avec Léandre dans les abysses, en rapporta quelques trésors naufragés dont les images, dans l’ivresse, l’éblouissaient comme un enfant. Il pensait à elle, c’était elle qu’il voulait émerveiller, qu’il voulait ravir. Il lui avait menti, car il brûlait de l’enlever à son ennui, à son Dieu, à Walter, à tout ce qui l’empêchait d’être à lui. Ou plutôt, et avant tout, à elle-même.

Walter a recueilli chez lui son ami Christopher Marlowe, laissé pour mort après une rixe. Dans le manoir au bord de la falaise, le poète en sursis rencontre Jane, l’épouse de son hôte. Entre ces deux insoumis naît une passion rare. Les corps et les esprits s’unissent dans un élan charnel et artistique, un amour hanté par la création et l’urgence du temps qui reste.

D’innombrables soleils est à la fois une plongée dans l’intimité de deux amants, l’évocation d’un des poètes les plus fascinants de l’Angleterre élisabéthaine, et un vibrant hommage à la littérature. Porté par une écriture incandescente, le quatrième roman d’Emmanuelle Pirotte fait la preuve de son talent inclassable, se jouant de toute frontière littéraire.

le cherche midi éditeur
le cherche midi éditeur

Lisez maintenant, tout de suite !