Un livre comme une odyssée, comme une passionnante traversée au gré des vents changeants de l’Histoire, et surtout au fil des destins d’héroïnes inconnues. La grande navigatrice Maud Fontenoy fait exister les explorations décisives de femmes qui ont vécu par et pour la mer.
C’est une Histoire jusque-là narrée par des hommes que déconstruit le nouveau livre de Maud Fontenoy, navigatrice émérite, écologiste convaincue, tout comme autrice de nombreux récits autobiographiques et essais. Car si ses exploits n’ont rien à envier à ceux de la gent masculine, ils ont fait l’objet d’innombrables commentaires sexistes, d’une remise en question de sa légitimité à mener la barre. Un constat sinistre que Maud Fontenoy – habituée à défendre ses idées par les voies littéraires mais aussi à la radio et au cinéma – combat en consacrant un ouvrage entier aux navigatrices et autres femmes passionnées par les mystères maritimes.
On les imagine peu nombreuses, or elles sont une quarantaine à peupler l’alléchant sommaire de Femmes Océanes, à écrire leur nom sur des récits d’expéditions que Maud Fontenay conte avec beaucoup d’appétit. S’y dévoilent les vies d’Anita Conti, journaliste et océanographe (1899-1997) qui dénonça en son temps la surexploitation des espèces, d’Eugenie Clark (1922-2015), biologiste marine qui réalisa un extraordinaire travail de recherche sur les requins, ou encore d’Anne Smith, peintre et sculptrice, qui ne cesse d’observer un monde en perpétuel mouvement. L’autrice fait se rencontrer les figures de proue du passé et les grandes voix d’aujourd’hui, avec la furieuse nécessité de faire exister leurs découvertes et leurs paroles.
Pétrie de recherches fournies et illustrées, cette merveilleuse plongée dans le destin de femmes pionnières, riche en biographies, s’accompagne d’une myriade d’encarts sur les mythes persistants qui ont nourri nos imaginaires, des sirènes aux pirates. Au gré d’une mise en page où se rencontrent les mille visages de la mer, Femmes Océanes offre de vastes ressources pour reprendre espoir quant à l’avenir de la planète, pour nourrir son féminisme, mais aussi pour s’engager au profit d’un monde plus respectueux des espèces. Un grand cri du cœur qui donne envie de larguer les amarres.