Rabih Alameddine, l’auteur du prix Femina étranger 2016 revient avec La Réfugiée, un roman brillant et terriblement actuel pour lequel il remporte le prix PEN/Faulkner de la Fiction 2022.
Rencontre avec l'auteur.
Je m'appelle Rabih Alameddine. Je suis libanais d'origine, bien que je sois né en Jordanie. J'ai grandi au Koweït, au Liban, en Angleterre, puis aux États-Unis. Je suis maintenant Américain et depuis 1977 je vis ici pour la plupart du temps. Je suis écrivain, même si j'ai fait beaucoup de choses avant de me poser pour écrire. La Refugiée est mon septième livre (le quatrième traduit en français).
J'ai commencé à interviewer des réfugiés au Liban en 2012. J’en ai d’ailleurs fait une vidéo en 2014 (https://www.youtube.com/watch?v=CuUv-TAQ084 ). Au moment où je suis allée à Lesbos en janvier 2016, j'étais émotionnellement épuisé et je ne savais pas pourquoi. Dire que j'étais traumatisé serait un euphémisme. Depuis le début de la crise, j'ai essayé d'écrire sur la situation syrienne et je n'ai pu terminer qu'un essai (après avoir été pas mal poussé par John Freeman) et un article de blog sur les enfants syriens regardant la Coupe du monde. Pire, je n'ai pas pu écrire le roman que j'avais en tête, un roman qui engloberait les expériences des réfugiés ainsi que les miennes dans le cadre de mon travail avec eux. J'ai vite compris que si je n'y arrivais pas, c'est parce que j'étais absorbé par le sujet. Je ne pouvais pas m'en détacher. Pour pouvoir écrire, un romancier doit maintenir une bonne distance par rapport au sujet, ni trop loin ni trop près. J'étais trop impliqué, incapable de me séparer. Les réfugiés étaient mon peuple. Pour atteindre une distance acceptable, j'ai dû créer Mina, à travers laquelle je pouvais raconter l'histoire, à la fois l'histoire des réfugiés et celle de mon expérience de travail avec eux.
Difficile de répondre à cette question... Au fond, c'est la question que pose le roman, et ni moi ni mon roman n'avons pu y répondre. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment de réponse.
Mina était un personnage dans une autre histoire que j'écrivais. Comme la plupart des personnages, elle est en partie basée sur moi, en partie sur une amie trans, et le reste est une pure invention. Une grande partie de son histoire est basée sur la vie d'une amie spécifique (que j'ai utilisée avec sa permission !).
La seule raison pour laquelle je n'ai pas crié, c'est parce que je l'ai découvert sur mon vélo en chemin pour aller dîner chez un ami. J’ai même été étonné de ne pas tomber dans un fossé ! J'ai reçu un appel et j'ai dû m’arrêter pour assimiler la nouvelle. J'avais vraiment envie de crier mais il y avait trop de voitures autour ! En d'autres termes, j'étais fou de joie. Pour utiliser mon expression française préférée, La nouvelle m'a bouleversé.
Rabih Alameddine, l'auteur de L'Ange de l'histoire revient sur l'écriture de son roman.