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Par Fleuve éditions, publié le 10/08/2021

"Je m'attache plus facilement aux couillons, et j'ai besoin d'aimer mes personnages."

À l'occasion de la parution de Opération Latex, son deuxième roman après Braquo sauce samouraï, polar argotique qui n'a pas peur de mépriser le politiquement correct, Johann Zarca répond à nos questions. 

Opération Latex s’inscrit dans la parfaite lignée de Braquo sauce samouraï en s’ancrant dans la veine du polar satirique, décalé, moderne et divertissant. Pour autant, Le Mec de l’Underground est-il exactement le même que celui que nous avons quitté ou as-tu souhaité le faire évoluer dans cette nouvelle aventure ?

Le Mec de l’Underground, c’est ce personnage obsédé par la came, le cul et les fast-food. Comme dans Braquo sauce samouraï, ce pied nickelé moderne est prêt à tenter n’importe quel coup foireux pour parvenir à ses fins. Mais, loin d’être un prix Nobel, il rame sec et s’entoure d’une clique pas tellement plus futée que lui, sans compter sa frangine qui perturbe ses plans par des coups de vice. Dans Opération Latex, force est de constater que, depuis le premier tome, Le Mec de L’Underground a encore paumé quelques neurones. Il me semblait un poil plus malin dans Braquo. Ce n’est pas ma faute, mais la sienne, ni moi, ni personne d’autre ne l’oblige à se défoncer. À présent, il rivalise avec son pote Lakhdar, se la raconte beaucoup plus, gamberge un peu moins et se croit expert en ninjutsu. Dans Opération Latex, je trouve Le Mec plus décalé que dans Braquo sauce samouraï. Il n’est définitivement plus récupérable.

 

Dans ce roman, un personnage inédit apparaît au milieu de ton attachante bande de bras cassés composée, entre autres, du Mec, de Lakhdar et de Mayo Kid. Il s’agit d’un flic, Jean-Grégory. Comment t’est venue l’idée de cette figure d’autorité complètement décalée ? Que souhaitais-tu apporter à ton écriture lorsque tu l’as imaginée ?

Avec Jean-Grégory, je voulais apporter une touche plus polar aux aventures goudronnées du Mec de l’Underground. À la base, j’imaginais un keuf à l’ancienne, dur comme les flics des romans noirs, mais la plume m’a échappé, comme souvent, et Jean-Grégory est devenu, à l’image de mon univers et de ses personnages, le condé le plus con de l’histoire du condé. Malheureusement, les lecteurs ne pourront pas compter sur ce perso absurde pour relever le niveau. Mais c’est mieux comme ça. Je m’attache plus facilement aux couillons, et j’ai besoin d’aimer mes personnages.

 

Avec Opération Latex, tu relèves, une fois de plus, le défi de rendre l’argot accessible à un large public. Est-ce important, pour toi, de défendre cette écriture à travers Le Mec de l’Underground ?

Je n’ai pas inventé l’argot, présent dans la littérature, mais le jargon que j’utilise est un peu le mien quand même : un mélange de jargon contemporain et d’argot à l’ancienne made in Paname, avec un poil de lyonnais, un zeste de gitan, une pincée de louchébem, autant de verlan que de beurre dans la cuisine de Maïté, du rebeu, et des trucs à moi qui n’existent que dans ma tête. Pour autant, ça reste essentiel pour moi de créer un ensemble cohérent sur le plan stylistique. Je ne sais pas si je défends la langue ou si je la défonce, mais j’avoue prendre plaisir à jouer avec. Comme dirait Éric Cartman, qui m’inspire beaucoup : « Je fais qu’est-ce que je veux. » J’aime l’idée que la langue ne soit pas figée, qu’elle soit en mouvement, j’aime bien sûr inventer des histoires, mais aussi des formes, des expressions et des mots. Le taf sur l’oralité fait partie intégrante de mon style littéraire. Et quand j’écris Le Mec de l’Underground, je pense toujours, au grand toujours, à Monsieur B., mon prof de français en cinquième, qui aurait détesté ma manière de triturer la littérature. À chaque ligne que j’écris, j’imagine sa tronche en train de se décomposer. Et ça me motive.

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