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Par Les Escales, publié le 17/08/2022

Rencontre avec Caroline Laurent, autrice de Ce que nous désirons le plus

Que désires-tu ?

Écrire est la réponse que je donne à une question qu’on ne me pose pas.

 

Rencontre avec Caroline Laurent.

 

  • Comment présenteriez-vous votre récit en quelques mots aux lecteurs qui ne vous connaissent pas ?

Voilà un livre que je n'aurais jamais pensé devoir écrire. Il est né de ce que je nomme la "catastrophe" ; un moment de bascule dans ma vie qui a eu lieu le 4 janvier 2021. Ce que nous désirons le plus est un récit autobiographique, arraché à la nuit et au chagrin, qui explore mon rapport viscéral à l'écriture et au pouvoir rédempteur de la littérature.

 

Pour l'heure je voyais bien la tempête, et je commençais à développer une connaissance très précise du chaos. Restait à trouver, dans ce maelström, ce que je désirais le plus.

 

  • En quoi vos vies d’éditrice, d’autrice et de lectrice se sont rencontrées dans votre livre ?

Tout, dans mon récit, se rapporte aux livres. J'y expose comment l'écriture, en tant qu'autrice, m'est devenue impossible pendant plusieurs mois; comment mon regard d'éditrice ne m'aidait en rien pour surmonter ce blocage; et comment, à l'inverse, ma position de lectrice m'a petit à petit irriguée d'une sève nouvelle et salvatrice. Je suis née à moi-même dans un livre, j'ai failli me perdre dans un livre, je suis revenue à la vie dans un livre. 

 

C'est le contraire d'un renoncement, plutôt un acte de foi : un jour, l'écriture reviendra. 

 

  • Pourquoi les Îles Féroé  comme destination de voyage pour recommencer à écrire ?

Pourquoi pas? 

 

 Le mer est puissante. L'aventure me libère.

 

  • L’écriture de ce livre grâce à l’utilisation du « je » marque un virage dans votre carrière d’écrivaine. Comptez-vous par la suite poursuivre ce chemin d’écriture ou retrouver votre écriture de fiction ?

J'ignore absolument comment j'écrirai mon prochain livre. La littérature ne se décrète pas, elle s'éprouve. Pour ma part, je sais seulement que j'écrirai, et c'est déjà beaucoup.

 

Longtemps je me suis demandé pourquoi écrire. Longtemps j'ai répondu à coups de parce que, avec la mine grave d'un enfant. Aujourd'hui je saisis le caractère mortifère d'une telle approche. Pourquoi est une impasse. Pourquoi nous consume en vain. La seule interrogation valable c'est comment. Comment écrire. Comment aimer. Comment vivre. 

 

Ce que nous désirons le plus
Un jour une amie meurt, et en mourant au monde elle me fait naître à moi-même. Ce qui nous unit : un livre. Son dernier roman, mon premier roman, enlacés dans un seul volume. Une si belle histoire.
Cinq ans plus tard, le sol se dérobe sous mes pieds à la lecture d’un autre livre, qui brise le silence d’une famille incestueuse. Mon cœur se fige ; je ne respire plus. Ces êtres que j’aimais, et qui m’aimaient, n’étaient donc pas ceux que je croyais ?
Je n’étais pas la victime de ce drame. Pourtant une douleur inconnue creusait un trou en moi.
Pendant un an, j’ai lutté contre le chagrin et la folie. Je pensais avoir tout perdu : ma joie, mes repères, ma confiance, mon désir. Écrire était impossible. C’était oublier les consolations profondes. La beauté du monde. Le corps en mouvement. L’élan des femmes qui écrivent : Deborah Levy, Annie Ernaux, Joan Didion… Alors s’accrocher vaille que vaille. Un matin, l’écriture reviendra.

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