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La Coupe d'or
Anna Gibson (traduit par), Marguerite Glotz (traduit par), Colm Tóibín (préface de)
Collection : Pavillons Poche
Date de parution : 08/09/2016
Éditeurs :
Robert Laffont

La Coupe d'or

Anna Gibson (traduit par), Marguerite Glotz (traduit par), Colm Tóibín (préface de)
Collection : Pavillons Poche
Date de parution : 08/09/2016

Au début des années 1900, au coeur de l’été londonien, le destin d’Amerigo, prince italien désargenté, vient d’être scellé. Il a épousé Maggie Verver, la fille d’un riche collectionneur et...

Au début des années 1900, au coeur de l’été londonien, le destin d’Amerigo, prince italien désargenté, vient d’être scellé. Il a épousé Maggie Verver, la fille d’un riche collectionneur et homme d’affaires américain, laquelle persuade son veuf de père de prendre une amie à elle, Charlotte Stant, pour épouse. Maggie...

Au début des années 1900, au coeur de l’été londonien, le destin d’Amerigo, prince italien désargenté, vient d’être scellé. Il a épousé Maggie Verver, la fille d’un riche collectionneur et homme d’affaires américain, laquelle persuade son veuf de père de prendre une amie à elle, Charlotte Stant, pour épouse. Maggie ignore que Charlotte et Amerigo étaient autrefois liés et qu’elle vient d’orchestrer leur rapprochement.
Quand un antiquaire, chez qui les amants ont admiré une coupe d’or, l’aide à reconstruire la vérité, Maggie se décide à réagir… Sous la plume aiguisée de l’auteur, les quatre protagonistes vont dès lors se révéler dans tous leurs paradoxes.
Réflexion sur le mariage, l’adultère, le mensonge, reflet d’un monde brillant mais fragile, La Coupe d’or est le point culminant de l’oeuvre romanesque d’Henry James.

« La Coupe d’or, dernière grande oeuvre de James, marque l’apogée de son talent, à la fois comme romancier et comme styliste. » Colm Tóibín

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EAN : 9782221193181
Façonnage normé : POCHE
Nombre de pages : 640
Format : 122 x 182 mm
EAN : 9782221193181
Façonnage normé : POCHE
Nombre de pages : 640
Format : 122 x 182 mm

Ce qu'en pensent nos lecteurs sur Babelio

  • 4bis 09/11/2022
    Au hasard des chemins, de billets en amis, j’ai trouvé et apprécié sur Babelio la critique de Bobfutur à propos de la Coupe d’or. Il a beaucoup aimé le livre et son engouement a d’autant réveillé ma curiosité qu’il y parle de roman psychologique et que je goûte particulièrement ce genre. L’intrigue de ces 620 pages (que j’aie compté et que je m’en souvienne dit sans doute déjà beaucoup…) peut se résumer à trois lignes : Un très riche Américain, père et veuf depuis des lustres, tendrement épris de sa fille, Maggie, la marie à un prince aussi désargenté qu’italien. Pour compenser le désagrément de lui avoir faussé compagnie, Maggie l’enjoint à prendre pour épouse une de ses amies chères, Charlotte. Laquelle Charlotte a, dans un passé encore récent, été très intimement liée… au prince et nouvellement mari de Maggie. En duègnes immorales, Mme Assingham et son benêt d’époux jouent les chœurs, les confidents et les témoins. Le graveleux de la situation explose à la gueule du lecteur : deux couples chacun illégitime à sa façon, adultérine ou incestuelle remaniés selon une organisation conjugale que la société peut approuver mais où surnage encore le scandale d’arguments purement pécuniers. Car ce brave Mr Verver a les millions nécessaires pour faire paraître intéressant son physique insipide et sa manie de collectionner en esthète les objets d’art rattrape son peu d’attrait pour les mondanités. Sans cela, on se demande ce qu’aurait pu lui trouver la pauvre Charlotte. Feydeau en aurait fait quelque chose. Avec moins de pages et davantage de portes claquées. C’aurait été drôle et bien troussé. Freud en aurait tiré un cas clinique magistral quel qu’ait été le personnage qu’il ait pris pour établir son diagnostic. Henry James, lui, en fait un roman qui s’étiiirrre. La chronologie de la narration et les lieux où elle s’incarne sont aussi simplistes que l’intrigue et ont beaucoup à voir avec l’économie d’une pièce de théâtre : des vestibules raciniens, des jardins l’été, une chambre. Deux ou trois conversations comme autant d’ancrage dans un réel effectif. Et puis c’est tout. Le reste ? De sinueuses élucubrations, de balbutiantes avancées d’hypothèses dans un dédale de considérations semi assumées. Des certitudes qui ne reposent que sur le sable d’intuitions même pas formulées. Et ce pendant des pages et des pages. D’habitude, dans les romans antérieurs au début du XXe siècle, je guette les dialogues comme autant d’escales entre les pavés de description ou de considérations plus ou moins bienvenues que se croit obligé de nous servir un narrateur bavard. Ici, je les redoutais presque tant leur avancée me paraissait absconde. Ils n’ont fait qu’enfoncer un peu plus les personnages dans un brouillard opaque, les rendant aussi léthargiques qu’impossible à saisir, absurdement sublimes qu’antipathiques. Pourtant j’ai persévéré dans ma lecture. A la moitié, n’y tenant plus, j’ai repris du souffle en lisant la préface de mon édition. Colm Tóibín y rassemble quelques éléments biographiques mettant en avant la récurrence de certains motifs romanesques dans l’œuvre de James. Il y montre également la jubilation qu’avait ce dernier à entendre narrer les actions délicieusement vulgaires, presque sauvages de certains richissimes américains en quête de racines ancestrales en Europe. Il y raconte enfin l’intérêt qu’a pris James aux découvertes de Freud. Rassénérée par ces éléments qui autorisaient au moins une lecture au second degré des pages qui me tombaient des mains, j’ai poursuivi. A cette lumière, j’ai davantage admiré la composition du roman, la manière dont James jouait avec ses personnages et nous présentait leur volteface selon des justifications toujours plus alambiquées. Mais autant j’apprécie chez Proust la dissection interminable des ressentis, des retentissements insondables de la sensation la plus ténue, autant j’ai l’impression qu’ainsi m’est dépeinte l’humanité de la plus exacte façon, autant j’ai eu ici l’impression d’une démonstration acrobatique fondée sur un artifice. Comme si les personnages n’avaient pas eu davantage d’âme que des poupées articulées et que le déploiement de raisonnements qui leur étaient alors attribués était d’avance voué à ne ciseler que le vide. Ça m’a rappelé un peu ces contes d’Hoffman, certains personnes d’Huysmans (dans l’Eve future), une artificialité stérile revendiquée comme moderne où la préciosité aurait remplacé la chair des émotions attendues. Quelque chose de très 1900, effectivement. A lire ainsi, comme le témoignage de l’esthétique d’un temps, c’est intéressant. Et c’est suffisamment complexe pour qu’on se plaise à relever les méandres et dédales. Mais que c’est interminablement sec ! Peut-être que certains auront trouvé ça drôle. Mais s’il y a rire, s’il y a humour là-dedans, il est tellement pédant, tellement cérébral et condescendant que son objet s’en trouve départi de rien d’humain. C’est le rire secrètement déconfit du marionnettiste qui croit supérieur l’artificialité de l’automate à la chair vivante. C’est tortueux, torturé et ingénieux. Et c’est sans doute ce qui fait que, malgré le peu de plaisir que j’ai pris à lire ce livre, je m’en souviendrai longtemps. Au hasard des chemins, de billets en amis, j’ai trouvé et apprécié sur Babelio la critique de Bobfutur à propos de la Coupe d’or. Il a beaucoup aimé le livre et son engouement a d’autant réveillé ma curiosité qu’il y parle de roman psychologique et que je goûte particulièrement ce genre. L’intrigue de ces 620 pages (que j’aie compté et que je m’en souvienne dit sans doute déjà beaucoup…) peut se résumer à trois lignes : Un très riche Américain, père et veuf depuis des lustres, tendrement épris de sa fille, Maggie, la marie à un prince aussi désargenté qu’italien. Pour compenser le désagrément de lui avoir faussé compagnie, Maggie l’enjoint à prendre pour épouse une de ses amies chères, Charlotte. Laquelle Charlotte a, dans un passé encore récent, été très intimement liée… au prince et nouvellement mari de Maggie. En duègnes immorales, Mme Assingham et son benêt d’époux jouent les chœurs, les confidents et les témoins. Le graveleux de la situation explose à la gueule du lecteur : deux couples chacun illégitime à sa façon, adultérine ou incestuelle remaniés selon une organisation conjugale que la société peut approuver mais où surnage encore le scandale d’arguments purement pécuniers. Car ce...
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  • bobfutur 25/10/2022
    Une merveille de roman psychologique, qui réclame un trésor de patience et d'attention. Une lecture formée d'une myriade de petites aspérités ; fondant et défaisant la perception d'êtres d'élite, témoin avec l'auteur de leurs atermoiements, face à ce quadrilatère amoureux, subtilement trompeur, subrepticement incestueux, sans jamais briser cette membrane de l'imaginé, du non-dit, s'appuyant sur de puissantes et délicates constructions métaphoriques, souvent architecturales, édifices sans faille formées de longs paragraphes que l'on traverse guidé d'une lueur dorée, indescriptible, remplies par l'imagination du lecteur laissée libre par l'extrême pudeur de l'écrivain. … On pourrait bien-sûr en rester totalement absent, tant ce monde décrit parait étranger : cette société quasiment disparue, noblesse européenne et transatlantique, de lignée ou de fortune, sophistiquée à l'extrême de leur oisiveté, et du très haut niveau de mensonge qui gouverne leur existence. C'est d'ailleurs à cette éloignement volontaire des réalités naturelles, faites de passions exprimées et d'honnêtes labeurs, que l'on pourrait extrapoler, voir mesurer la santé d'une société. Un chat ne s'appellerait pas plus qu'un autre, tant qu'on ne l'aurait pas décidé… Ces processus entrent chaque fois en oeuvre, du moment que le pouvoir se concentre dans une société, et que la morale remplace l'expression crue de la vérité. … Le roman, après avoir observé le Prince, s'envole totalement dans sa partie suivant la Princesse, Maggie, figure absolument inoubliable du roman classique, démontrant l'immense talent d'Henry James à suivre et à décrire, jusqu'à la perfection de l'intime, (bien que n'utilisant jamais la dimension physique ou charnelle) une personne à la profonde bonté naturelle, contredisant ainsi l'enseignement du classicisme russe, voulant que l'intelligence se situe dans le malin, l'idiot comme état de nature de celui qui ne fait qu'aimer les autres. Son reflet supposément maléfique, cultivée jusqu'au sommet, figure émancipée de l'amour libre, Charlotte, n'en reste pas moins le personnage le plus complexe et questionnant, ouvrant une infinité d'interprétation selon la sensibilité du lecteur, mesmérisant à mesure que sa figure se précise, sans que jamais ne soit décidé sa part d'orgueil et sa superbe liberté, enfermée à l'ombre du Prince de Machiavel… … Rarement un roman n'aura autant évoqué sans écrire, de ces brulantes images qu'aucun mot ne se propose de capter, usant de discrètes pistes symbolistes, d'une économie appréciable de personnages, leur laissant tout le loisir de s'épanouir sans que jamais leurs contours ne se précisent, moiré de reflets fuyants se reflétant dans le cristal de cette coupe dont l'or n'est pas uniquement doré. Une merveille de roman psychologique, qui réclame un trésor de patience et d'attention. Une lecture formée d'une myriade de petites aspérités ; fondant et défaisant la perception d'êtres d'élite, témoin avec l'auteur de leurs atermoiements, face à ce quadrilatère amoureux, subtilement trompeur, subrepticement incestueux, sans jamais briser cette membrane de l'imaginé, du non-dit, s'appuyant sur de puissantes et délicates constructions métaphoriques, souvent architecturales, édifices sans faille formées de longs paragraphes que l'on traverse guidé d'une lueur dorée, indescriptible, remplies par l'imagination du lecteur laissée libre par l'extrême pudeur de l'écrivain. … On pourrait bien-sûr en rester totalement absent, tant ce monde décrit parait étranger : cette société quasiment disparue, noblesse européenne et transatlantique, de lignée ou de fortune, sophistiquée à l'extrême de leur oisiveté, et du très haut niveau de mensonge qui gouverne leur existence. C'est d'ailleurs à cette éloignement volontaire des réalités naturelles, faites de passions exprimées et d'honnêtes labeurs, que l'on pourrait extrapoler, voir mesurer la santé d'une société. Un chat ne s'appellerait pas plus qu'un autre, tant qu'on ne l'aurait pas décidé… Ces processus entrent chaque fois en oeuvre, du moment que le pouvoir se concentre dans une société, et que la morale remplace l'expression crue de la vérité. … Le roman, après avoir...
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  • Laveze 20/09/2022
    LA COUPE D’ OR d’ HENRY JAMES Adam Verver est un riche collectionneur américain, père d’une fille qu’il adore et réciproquement. Maggie, sa fille va épouser Amerigo, un prince italien sans fortune mais dont le nom représente en lui même un prestige, un objet de collection si l’on veut. Mais il est clair qu’elle l’aime et lui sait trop bien ce qu’il doit à ce mariage. Juste avant la cérémonie arrive Charlotte, une fille superbe mais désargentée qui va chiner une journée à Londres avec Amerigo. Adam, Amerigo, Charlotte et Maggie, le quatuor est en place et quand je vous aurai dit que Maggie avant de se marier ne savait pas que Charlotte et Amerigo avaient eu une relation torride, vous pouvez imaginer la suite. La coupe d’or du titre n’est bien sûr qu’un prétexte et un révélateur, et James va nous faire entrer dans la psychologie de chaque personnage à sa façon, par des jeux de questions / réponses ou par l’intervention d’une marieuse amie de la famille, Fanny Assingham. C’est brillant, une partie de billard à 4 dont Adam est un manipulé admirable et heureux, Amerigo essayant de sauver l’essentiel, restent les femmes, redoutables joueuses. Ni cris, ni pleurs, des coups bien préparés comme au whist ou aux échecs. Envoûtant, passionnant d’une grande finesse, un roman que j’ai avidement englouti.LA COUPE D’ OR d’ HENRY JAMES Adam Verver est un riche collectionneur américain, père d’une fille qu’il adore et réciproquement. Maggie, sa fille va épouser Amerigo, un prince italien sans fortune mais dont le nom représente en lui même un prestige, un objet de collection si l’on veut. Mais il est clair qu’elle l’aime et lui sait trop bien ce qu’il doit à ce mariage. Juste avant la cérémonie arrive Charlotte, une fille superbe mais désargentée qui va chiner une journée à Londres avec Amerigo. Adam, Amerigo, Charlotte et Maggie, le quatuor est en place et quand je vous aurai dit que Maggie avant de se marier ne savait pas que Charlotte et Amerigo avaient eu une relation torride, vous pouvez imaginer la suite. La coupe d’or du titre n’est bien sûr qu’un prétexte et un révélateur, et James va nous faire entrer dans la psychologie de chaque personnage à sa façon, par des jeux de questions / réponses ou par l’intervention d’une marieuse amie de la famille, Fanny Assingham. C’est brillant, une partie de billard à 4 dont Adam est un manipulé admirable et heureux, Amerigo essayant de sauver l’essentiel, restent les femmes, redoutables joueuses. Ni cris, ni pleurs,...
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  • Nitocris2021 21/06/2021
    En dépit de mes appréhensions ce roman m'a beaucoup plu. Ici le romancier pousse l'analyse à un point si avancé que les pages gardent un mystère plus opaque que jamais. Merveille du génie jamesien qui arrive pourtant à rendre ce gros roman lisible et intéressant.
  • laurent34dan 14/03/2019
    Henry James commence à être bien connu des amateurs de littérature. Si l’on songe que les premières traductions de ses œuvres datent de trois quarts de siècle et qu’on ne les trouve pas plus en librairie que celles, plus Récentes, qu’entreprirent les éditions Stock vers 1930, on se dit tout de même qu’il lui aura fallu du temps avant de conquérir la petite audience dont il jouit aujourd’hui. On le redécouvre en France comme on vient de le redécouvrir aux Etats-Unis, et il y a encore une certaine part d’héroïsme pour un éditeur parisien à publier ces énormes volumes que sont Les Ambassadeurs, Les Ailes de la Colombe et, aujourd’hui, La Coupe d’Or . Tous trois sont assurément des chefs-d’œuvre mais qui, s’ils donnent au lecteur un plaisir rare, réclament également de lui beaucoup de patience, de finesse et d’intelligence. En un temps où nos yeux et nos oreilles sont requis par la radio, la télévision et le cinéma, on ne peut pas espérer trouver beaucoup de lecteurs de James parmi les gens innombrables qui se satisfont par exemple d’un film aussi dégradant que Les Diaboliques. Et James ne peut même pas bénéficier d’un quelconque élan de snobisme. Il appartient au passé ; ses histoires font revivre un monde d'aristocrates, de milliardaires, de riches héritières, d’amateurs d’art, de voyageurs internationaux et de purs oisifs. Il nous semble bizarre aujourd’hui d’aller chercher les échantillons d’une humanité supérieure parmi ces gens-là, et des âmes cornéliennes et des martyrs du devoir et des chevaliers de la moralité. Les préoccupations mêmes de James sont inactuelles : aux conflits d’âmes ont succédé chez les romanciers qui l’ont suivi les conflits de la chair ou de l’argent, autrement sanglants et autrement sordides. Et pourtant.... Si ce n’est pas le sens du passé qui nous retient chez James, si ce n’est pas son humanité disparue avec ses problèmes en forme de jeux de salon, qu’est-ce qui nous attache à ce point à lui, et nous émeut et nous le rend admirable ? Lisons ensemble La Coupe d’Or. Une jeune Américaine, belle, riche, et vivant avec son père à Londres, fait la connaissance d’un Prince romain, d’illustre famille et qui, s’il est dénué d’argent, est pourvu à ses yeux de tous les prestiges d’une vieille civilisation. (Une fois de plus, comme dans beaucoup d’ouvrages de James, s’affrontent et se confrontent Europe et Amérique). Les deux jeunes gens vont se marier. Mais le Prince a connu auparavant une autre jeune Américaine, Charlotte, pauvre celle-ci ; ils ont été amant et maîtresse et se sont séparés, le mariage leur paraissant impossible dans leur situation. De plus, Charlotte et Maggie, la future princesse, sont amies. Quoi de plus naturel si Charlotte revient précipitamment d’Amérique pour assister au mariage de Maggie ? Cependant nous devinons que Charlotte aime toujours l’Italien, et que celui-ci lui rend son amour. Elle accepte qu’il se marie avec sa riche amie. Elle lui demande seulement de lui consacrer sa dernière journée de « garçon » ; ils courront ensemble les antiquaires londoniens afin de trouver un cadeau qu’elle puisse offrir à Maggie. Ils tombent sur une coupe de cristal doré dont elle ferait volontiers l’emplette si le Prince ne soupçonnait dans l’objet la présence d’une invisible fêlure. Il est superstitieux et détourne Charlotte de son projet. Ils reviennent de leur promenade-prétexte les mains vides et sans que nous sachions la température exacte des sentiments qu’ils nourrissent l’un pour l’autre. En tout cas, Maggie ignore qu’ils se connaissent et qu’ils se sont vus. Sur cette donnée s’échafaude tout le drame. Le Prince et sa femme coulent des jours heureux : voyages, réceptions, vie de société, vacances perpétuelles. Ils ont un enfant, et le Prince, qui est tout intelligence et subtilité, a également fait la conquête du richissime papa, collectionneur d’objets d’art. Il a bien l’impression de s’être vendu, et à très bon prix, à sa nouvelle famille; Maggie et son père ne sont pas sans avoir l’impression de l’avoir acheté, mais le marché profite à tous trois. Cependant, un souci se fait jour en Maggie. Son père adoré est-il aussi heureux qu’il le prétend maintenant que, par le mariage, sa fille lui a plus ou moins échappé ? Bien qu’elle passe son temps plus souvent auprès de lui qu’auprès de son mari et de son fils, elle voudrait lui offrir une compensation, et quelle meilleure compensation que, pour lui aussi, le mariage, avec une personne qui s’agrégerait naturellement au trio, qui vivrait dans la même atmosphère heureuse de serre chaude, dans le même égoïsme d’une vie vouée aux plaisirs délicats, à l’art, à la beauté ? Elle pense à Charlotte, son admirable amie, si raffinée, et, à cause de sa pauvreté, si « méritante ». Le père, veuf encore jeune, donne son accord, et voici le nouveau couple formé. Le Prince, qui va avoir pour belle-mère son ancienne maîtresse, n’a pas bronché. De son côté, Charlotte n’a pas manifesté de scrupules. Seraient-ils l’un et l’autre des cyniques ? Tout au contraire. Ce sont de belles âmes qui vont rivaliser dans l’amour et le sacrifice pour le conjoint, travailler d’arrache-pied à maintenir intact et même à rendre parfait ce climat feutré de bonheur collectif où la satisfaction de l’un ne saurait aller sans la satisfaction des autres et où la plus petite inquiétude, le plus léger soupçon de refroidissement manifesté par l’un ferait s’écrouler la fragile construction. Car nous la sentons fragile cette construction, portée qu’elle est par des êtres qui passent leur temps à s’observer mutuellement et à s’interroger eux-mêmes sans répit. Les plus torturés sont, on s’en doute, le Prince et Charlotte, jetés dans la plus fausse des situations. Ils ont toutefois une âme suffisamment trempée, une conscience suffisamment droite pour sublimer et exalter leur passion amoureuse. Ils ne peuvent être dignes l’un de l’autre qu’en se trouvant ensemble dans cette région du sublime qui les accorde et les sépare à jamais. Nous nous croyons dans une pièce de Corneille. Puis, c’est la catastrophe. Au comble de l’exaltation, éperdus d’admiration mutuelle, le Prince et Charlotte tombent dans les bras l’un de l’autre. Ils croient avoir enfin vaincu leur amour coupable alors qu’ils lui donnent sa première satisfaction. Au lieu d’escalader un sommet ils viennent de tomber dans l’abîme qui les guettait. Nous les savons trop lucides pour croire toutefois qu’ils se déguisent longtemps leur nouvelle situation. Redeviennent-ils amant et maîtresse ? Ce n’est pas certain et cela importe peu. Ils ont devant les yeux la fêlure que symbolisait la fameuse coupe laissée chez l’antiquaire. Il va falloir beaucoup de dorure pour la cacher aux yeux exercés de Maggie et de son père. Les deux amants sont enfermés dans une cage d’où ils ne peuvent fuir et où il ne faut pourtant pas qu’on les voie réunir. Ils redoublent d’attention affectueuse, de dévouement à l'égard de leur conjoint respectif. Mais où vont-ils les entraîner ? Maggie a perçu quelque chose d'anormal puis découvre brusquement la vérité : le Prince et Charlotte se connaissaient. Elle les a elle-même réunis stupidement en faisant épouser Charlotte à son père. Si les deux amants se revoient intimement, comment cacher à ce père chéri, car elle ne pense pas un instant à elle-même, l’horreur d’une pareille situation ? Le monde de James n’est pas un monde où l’on pose des questions et où l’on reçoit des réponses, où les situations s’éclaircissent au moyen d'explications. Rien n’y est sûr ; tout y est deviné ou soupçonné et dans les conversations qui sont des joutes serrées, subtiles et psychologiquement sanglantes, à peu près rien ne transparaît sous les paroles des vrais désirs et des torturantes inquiétudes. De temps à autre un comparse fait le point, lui-même impliqué dans le drame et le faisant par là avancer grandement. Puis l’on retombe dans l’ambiguïté des événements, des sentiments, des passions, de tout ce qui chemine dans l’ombre et se reflète en spectacles infinis dans les consciences. Il n’est pas de vérité certaine, il n’est même pas d’événement sûr, mais mille facettes de l’une ou de l’autre, dont chacun porte le reflet par éclipses successives ou par intuitions fulgurantes. Pourtant, le drame dans son ensemble, va son train d’enfer. Dans ses Carnets , en 1894, douze ans avant de composer La Coupe d’Or, Henry James note le sujet de son roman d’après un propos qu’on lui rapporte. Et déjà il entend donner l'image psychologique d’un « cercle vicieux » : il faut que chacun sache que l’autre sait mais fasse comme s’il l’ignorait. Le bonheur de tous est à cette condition. Et celle qui doit ignorer le plus est Maggie qui tient tous les fils dans sa main. Nouveau dilemme : comment peut-elle paraître ignorer si elle veut résoudre la situation ? Car c’est bien à une solution commune qu’elle s’attelle et sur ce terrain qu'elle veut vaincre, non pas tant pour garder son mari que pour préserver la sacro-sainte tranquillité de son père dont mille indices nous prouvent qu’il n’est pas, lui non plus, dépourvu d’antennes. S’il n’est pas question pour elle d’accepter « l’horreur » il lui est également défendu de la révéler. Elle devient, et elle se voit elle-même en « bouc émissaire », celle d’entre les quatre qui devra se sacrifier afin que les apparences du bonheur collectif soient sauves. Mais alors le spectacle qu’elle donne aux amants, avec cependant beaucoup de discrétion et de maitrise, les oblige à la suivre. A la fin tout le monde se sacrifie pour quelque chose qui déjà n'existe plus et ce, par un moyen qui parait tout naturel : le père décide de retourner en Amérique avec sa femme. Les deux amants seront définitivement séparés, mais le père et la fille le seront également. Il reste de chaque côté deux couples qui feront de nécessité vertu, et, contrairement à ses autres romans, qui se terminent généralement sur un échec. Henry James donne à La Coupe d’or une fin optimiste : au sein de ces couples l’amour va refleurir. Pour suivre le fil de cette intrigue dont l’argument tiendrait en quelques lignes, il faut une tête quelque peu mathématicienne. Nous sommes en plein dans l’algèbre des sentiments et des passions, dans une chimie subtile où la moindre dose d’un ingrédient nouveau transforme de fond en comble l’expérience. De plus, jamais les données ne sont sûres, et jamais on ne sait à quel moment exact de l’opération on assiste. On craint toujours le maladroit qui va tout flanquer par terre. Rien pourtant d’obscur ni d’évanescent. Le récit est plutôt d’une labilité extrême qui interdit une connaissance, au sens scientifique des personnages, mais en revanche respecte en eux le mystère et la liberté mêmes de la vie. Nos quatre emmurés sont à chaque instant capables de tout faire, de tout dire, de tout penser, et au lieu de s’appauvrir à mesure comme il leur arrive chez beaucoup d’autres romanciers, ils deviennent si extraordinairement présents qu’on ne peut plus les oublier. C’est là l’autre face du génie minutieusement calculateur de James : à partir d’une situation algébriquement simple l’approfondir de telle sorte que plus rien n’est simple sauf pour les imbéciles, et donner le sentiment que cette complexité est celle-là même de la vie. A ce niveau le génie mécanicien ne suffit plus ; il y faut des qualités de cœur, de caractère et d’imagination qui puissent hausser une réalité tristement réaliste ou parfois même sordide au-dessus d’elle-même. James avait l’habitude de dire que « la réalité gâche tout » parce qu’en effet elle suit à peu près toujours la ligne de moindre résistance, celle qui fait avorter les situations les plus extraordinaires et clôt brutalement les possibilités à peu près infinies des existences humaines. Le revers de la médaille est qu’il faille à James des milieux préservés, battus des seuls vents de la passion ou du devoir, et des âmes d'élite, capables de se passionner pour ce qui leur parait être plus important que leur vie même. Le rouleau compresseur de l’existence quotidienne, pour la plupart des humains, écrase assez tôt les velléités de raffinement du cœur et de l’esprit. Il détermine des situations beaucoup plus simples, mais auprès des inutiles oisifs de James comme nous nous sentons tristement barbares. Si on a le sentiment qu’ils ne sont point ancrés dans la vie véritable, laquelle se heurte à des forces extérieures coercitives, on se demande également ce que vaut cette « vie véritable » et si elle n’est pas d’une pauvreté à faire pleurer. James, est de ce point de vue un énorme réservoir de nostalgie, un romantique égaré dans un siècle et un pays positivistes. Si la redécouverte aujourd'hui ne peut signifier rien d’autre, dans notre climat étouffant, que le besoin d’une soupape de sûreté, elle prouve du même coup que sa peinture n’est pas factice et que nous croyons à une humanité qui n’aurait plus à résoudre que des problèmes strictement humains. Cet écrivain du passé alimente nos rêves d’avenir. C’est par là qu’il est présent. Henry James commence à être bien connu des amateurs de littérature. Si l’on songe que les premières traductions de ses œuvres datent de trois quarts de siècle et qu’on ne les trouve pas plus en librairie que celles, plus Récentes, qu’entreprirent les éditions Stock vers 1930, on se dit tout de même qu’il lui aura fallu du temps avant de conquérir la petite audience dont il jouit aujourd’hui. On le redécouvre en France comme on vient de le redécouvrir aux Etats-Unis, et il y a encore une certaine part d’héroïsme pour un éditeur parisien à publier ces énormes volumes que sont Les Ambassadeurs, Les Ailes de la Colombe et, aujourd’hui, La Coupe d’Or . Tous trois sont assurément des chefs-d’œuvre mais qui, s’ils donnent au lecteur un plaisir rare, réclament également de lui beaucoup de patience, de finesse et d’intelligence. En un temps où nos yeux et nos oreilles sont requis par la radio, la télévision et le cinéma, on ne peut pas espérer trouver beaucoup de lecteurs de James parmi les gens innombrables qui se satisfont par exemple d’un film aussi dégradant que Les Diaboliques. Et James ne peut même pas bénéficier d’un quelconque élan de snobisme. Il appartient...
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