Patricia Bouhnik, maître de conférences en sociologie à l'université d'Amiens, travaille depuis quinze ans sur les questions relatives aux consommations de drogues.
À travers de nombreux récits de vie, comment les toxicomanes eux-mêmes attribuent du sens à leurs conduites, et se construisent un véritable monde social.
« Dépendants », « malades », « marginalisés », « délinquants »… les individus qui associent la consommation de produits psychoactifs avec une précarité de condition ne cessent d'être discrédités,...
« Dépendants », « malades », « marginalisés », « délinquants »… les individus qui associent la consommation de produits psychoactifs avec une précarité de condition ne cessent d'être discrédités, stigmatisés et relégués. Pourtant, derrière cette figure extrême et souvent caricaturée des « toxicos », se cache en réalité un...
« Dépendants », « malades », « marginalisés », « délinquants »… les individus qui associent la consommation de produits psychoactifs avec une précarité de condition ne cessent d'être discrédités, stigmatisés et relégués. Pourtant, derrière cette figure extrême et souvent caricaturée des « toxicos », se cache en réalité un paysage plus contrasté, où le goût – la recherche de plaisir, la gestion des émotions – côtoie la peine : la répression, la précarisation, les violences, les prises de risques, la prison et la mort. Face à la forte actualité mise en scène en termes de sécurité et de santé publique – les politiques publiques tendant à individualiser la « faute » au détriment de la prise en compte collective et à privilégier l'incrimination plutôt que la réduction des risques –, cet ouvrage s'attache à comprendre la manière dont plusieurs générations d'adolescents et de jeunes adultes vivant en quartiers populaires ont rencontré, à partir de la seconde moitié des années 1980, les drogues illicites. À travers de nombreux récits de vie, la reconstitution des interactions observées sur différents territoires (cités de banlieue, quartiers de Paris) et la manière dont les personnes elles-mêmes attribuent du sens à leurs conduites, l'auteur montre comment certaines d'entre elles se construisent autour de ces drogues un véritable monde social, assurant à la fois des fonctions de socialisation, d'échanges sociaux et économiques et de recherche de sensations.
Patricia Bouhnik, maître de conférences en sociologie à l'université d'Amiens, travaille depuis quinze ans sur les questions relatives aux consommations de drogues.
Introduction
I. Mises à l'épreuve et précarisation
Un cadre de vie marqué et dégradé
Cités et espace public : lignes de partage
Un attachement paradoxal au lieu de vie
Ethni-cités
Des écarts qui se creusent
Familles à l’épreuve
L’école ou l’apprentissage de la rupture
Les femmes et l’expérience du dédoublement
Expériences partagées
Initiations et attaches : les bases d’un style de vie
L’ « accrochage » ou la découverte des sensations
Ruptures en chaîne
Le travail, presque impossible
Logement et accès à la citoyenneté
Échouer à la rue
Une trajectoire : Mektoub
II. Vivre avec les drogues : un monde social
L’économie du décalage
S’engager dans les micro-trafics : liens et cercles de proximité
Le marché, l’argent, la dette
Un théâtre de la nécessité et de la cruauté
L’arrière-boutique : jeu et réputation
Consommer : une affaire de style et de position
L’espace-temps de la prise d’héroïne
Le temps de l’errance : rue, crack et substitution
La prison au cœur du système
De la cité à la prison
Réguler et négocier : la double adaptation
Affronter le manque en détention
Se refaire une santé… mais sortir « toxico »
Réparer et punir
III. Au-delà visible, toucher l'intime
Un monde de sensations
Ambivalence des plaisirs
Tourmente des affects et sensations
Sœurs et mères : le fil et le soutien
Le shoot : mouvements et empreintes
Gestes et sensations
Devenir « tox »
Conjurer le manque pour se sentir normal
Arrêter ?
Peines de corps
Corps à la rue, corps en public, corps obscènes
Corps shootés, corps marqués, corps malades
Corps prostitués
Risques mortels
Précarité et partage de seringues
Sexe au naturel, sexe mortel
Sida : du choc de la contamination au « vivre avec »
Le sida en prison : silence et peine
Conclusion
Bibliographie.
« Ce livre permet de comprendre les inflexions ayant marqué leur histoire
(aux toxicos). Derrière les plaintes, regrets et peurs qui émaillent leurs
récits, ils évoquent leur condition sociale et leur confrontation grandissante à
des risques rarement recherchés. Les trajectoires, les fonctions assignées à la
consommation et les styles de vie adoptés sont très divers, mais découlent de ce
que l'auteur désigne comme des "systèmes de vie avec les drogues". Cette notion
permet d'intégrer les facteurs socio-économiques, les interactions avec
les institutions ainsi que les rapports sociaux au monde des usagers de drogues.
Elle permet d'interroger les politiques publiques, l'ambivalence du rapport à la
loi et les contradictions nées de la mise en oeuvre des dispositifs de soins, de
réduction des risques et de substitution. »
NERVURE
« Un
travail remarquable et impressionnant dont l'objectif était de (faire)
comprendre comment des adolescants et des jeunes adultes de plusieurs
générations issus des quartiers populaires en étaient venu à consommer des
drogues illicites, puis comment ils survivaient, se mettant toujours plus en
danger, en marge d'une société stigmatisante. Entrecoupé de nombreux récits, le
texte montre combien ces existences à la recherche du risque et de
la sensation forte (le "goût"), permettant de dépasser un passé et des
conditions de vie très difficiles, se heurtant sans cesse de plein fouet à la
"peine" (prison, maladie...). »
LA GAZETTE SANTÉ SOCIALE
« Face
à la forte actualité mise en scéne en termes de sécurité et de santé publique,
cet ouvrage s'attache à comprendre la manière dont plusieurs générations
d'adolescents et de jeunes adultes vivant en quartiers populaires ont rencontré,
à partir de la seconde moitié des années 1980, les drogues illicites.
»
INTERDEPENDANCES
« En croisant observations in situ (à Paris
et en banlieue) et entretiens avec plus de deux cents toxicomanes, Patricia
Bounhik compose un tableau d'une richesse sans equivalent, qui permet de
dépasser les débats opposant traditionnellement les tenants de la repression à
ceux du coin. »
SCIENCES HUMAINES
« Au-delà des
statistiques et des préjugés, que sait-on des toxicomanes ? Ne les voir que sous
l'angle des soins ou de la repression, cela les renvoie au statut de malades ou
de délinquants. De la fin des années soixante-dix au début des années
quatre-vingt-dix, des cités de la banlieue nord parisienne aux quartiers du nord
de Paris, la sociologue Patricia Bouhnik a suivi, durant quinze ans, plusieurs
dépendants aux produits illicites ou de substitution. Il a fallu à la chercheuse
trouver un juste milieu entre l'implication et la distance. [...] Patricia
Bounhk cherche à comprendre comment la drogue est entré dans ces vies et le sens
de cette expérience. »
L'HUMANITÉ