Les 7 jours du Talion : Le livre de Patrick Senécal

Avec Les 7 jours du talion, Patrick Sénécal ne se contente pas de dérouler une simple histoire de vengeance. Il installe le lecteur dans une cellule d’introspection crue, où l’horreur ne réside pas tant dans les actes commis que dans leur justification, leur froideur, leur banalité presque clinique. Le pitch, en apparence simple – un père qui décide de faire justice lui-même après le viol et le meurtre de sa fille – devient rapidement un terrain glissant. Là où je pouvais m’attendre à du gore pur et dur (à la hauteur de la réputation sulfureuse du roman), Sénécal choisit une autre voie : celle d’un dépouillement progressif, méthodique, de la psyché humaine. La violence est là, bien sûr, mais elle est secondaire. L’essentiel se joue dans les silences, les hésitations, les gestes mécaniques. La vengeance, chez Sénécal, n’est pas un cri de rage : c’est un murmure glacial qui se répète sept fois, jusqu’à ce qu’il ne reste rien. Ce qui bouleverse profondément, c’est que ce médecin, habitué à réparer les corps, finit par se décomposer de l’intérieur. Par la perte de la chair de sa chair, il perd aussi toute lucidité — et ne gagne plus rien, si ce n’est en folie. La plume est d’une fluidité remarquable. Sénécal écrit comme on tranche : net, précis, sans bavure. Le rythme est soutenu, les pages se tournent avec une sorte de fascination inconfortable. Pourtant, malgré ce côté addictif, une petite réserve subsiste : à force d’avoir entendu des lectrices et lecteurs vanter l’extrême noirceur et la brutalité de ce roman, je m’attendais à être davantage choquée, surprise, renversée. Le suspense reste maîtrisé, mais jamais insoutenable ; la violence, bien qu’indéniable, n’atteint pas les sommets malsains que certains laissaient présager (on s’entend, bien-sûr ; n’allez pas me considérer comme une psychopathe) Cela dit, c’est peut-être là toute la force du roman : nous prendre à rebours, en refusant le spectaculaire pour mieux questionner notre propre rapport à la justice, au châtiment, à la monstruosité. Les 7 jours du talion ne cherche pas à divertir. Il force à réfléchir. Et il le fait avec une justesse glaçante.

Thriller psychologique noir, intense et dérangeant sur le thème de la vengeance. Dans ce huis-clos qui se déroule dans une cabane au fond des bois, un père en quête de justice pour le meurtre de fille sombre dans la folie. Ames sensibles s’abstenir !

Bruno mène une existence bourgeoise et tranquille avec Sylvie et Jasmine, leur fille unique de sept ans dans une banlieue québécoise. Tout bascule le jour où Jasmine est retrouvée violée et étranglée près de son école. Le meurtrier est rapidement appréhendé et s’apprête à répondre de ses actes devant le tribunal. Anéanti, fou de douleur, dans l’impossibilité de faire son deuil, Bruno vacille et sombre dans une haine incommensurable qui le pousse à se faire justice. Une « justice » qui d’ailleurs estime que le meurtrier n’encourt qu’une peine de 15 à 25 ans car « pour prendre 25 ans, il faut vraiment avoir commis quelque chose de grave ». Le jour de la comparution du coupable, Bruno le kidnappe et le séquestre dans un chalet isolé au fin fond de la forêt québécoise pendant sept jours. Bien décidé à assouvir sa vengeance, le chirurgien passionné et profondément humain bascule dans la folie vengeresse jusqu'à ne plus savoir qui est de lui ou du meurtrier est le véritable monstre ? Ce huis-clos semble horrifique aux premiers abords car étant donné que le bourreau est chirurgien et a évidemment une très bonne connaissance du corps humain, je vous laisse aisément imaginer les tortures ciblées qu’il peut infliger et les terribles souffrances qui en découlent. Certaines scènes sont d’ailleurs difficiles à lire et autant le dire, à la limite de l’insoutenable, pas seulement à cause des descriptions qui sont étonnamment assez retenues mais à travers les images qui s’impriment dans notre esprit. Dans ce roman coup de poing, au-delà des tortures physiques, les tortures psychologiques engendrées par la souffrance mentale sont bien plus profondes et mènent à la folie. La psychologie des personnages est extrêmement fine et bien fouillée, nous permettant de ressentir la puissance des sentiments à leur paroxysme. Ce thriller psychologique noir et intense a aussi l’intelligence d’interpeller et de soulever des questions dérangeantes : La vengeance peut-elle apporter la paix à celui qui l’exerce ? Doit-on répondre à la violence par la violence ? Ames sensibles s’abstenir !