La Chartreuse de Parme : Le livre de Stendhal
Édition présentée et commentée par Pierre-Louis Rey,
professeur de littérature française à l'université de la Sorbonne Nouvelle (Paris III).
En 1838, emporté par sa passion pour l'Italie, sa patrie de cœur, terre de liberté et d'héroïsme, Stendhal dicte
La Chartreuse de Parme en 52 jours.
Ivre de gloire napoléonienne, Fabrice Del Dongo est le petit prince et le grand seigneur adoré des femmes de la minuscule cour de Parme. Faute d'exploits militaires, il devient un curieux théologien comblé de maîtresses. Ayant par aux intrigues qui l'entourent et d'un naturel fougueux, il est jeté en prison malgré la protection de sa tante, la sublime duchesse de Sanseverina. Captivité bénie puisqu'à l'intérieur de la forteresse vit l'amoureuse et brûlante Clélia Conti, fille du gouverneur...
L'amour, l'énergie, le bonheur, et l'art du roman sont ici portés jusqu'au ravissement.
Lire avec le texte intégral et la préface présentant l'œuvre et son auteur.
Comprendre avec " Les clés de l'œuvre " : 13 pages pour aller à l'
essentiel ; 35 pages pour
approfondir.
De (auteur) : Stendhal
Expérience de lecture
Avis Babelio
Bibelios
• Il y a 1 semaine
Le Rouge et le Rouge Il faut bien admettre que La Chartreuse de Parme est plus difficile d'accès que Le Rouge et le Noir. Non point parce qu'elle se situe dans les montagnes. Mais parce que son protagoniste, notre cher ami Fabrice Valserra del Dongo, passe bien un premier tiers de l'histoire à vagabonder. D'abord de bataillon en bataillon, dans une guerre qu'il ne comprend pas, mais à laquelle il rêve de prendre part. Puis, de ville en ville, lorsque son frère aîné le trahit et fait de lui un hors-la-loi. Fabrice est non grata où qu'il se trouve, sauf, et c'est déjà là peut-être une clé de son destin, auprès des femmes. On peut comprendre que le lecteur peine à s'accrocher à un fil de lecture. L'écriture de Stendhal dans cette première partie du roman n'arrange pas les choses: tout comme Fabrice à Waterloo, elle survole le champ de bataille sans se poser jamais. L'éclatement narratif qui en résulte donne une impression de confusion, on ne sait pas trop où l'on va : le lac, la France, Milan, Bologne, Parme, l'Autriche... on se perd très vite dans cet itinéraire qui semble sans fin. Mais quand donc l'histoire va-t-elle commencer? Il faut tourner un bon nombre de pages pour arriver, enfin, au tournant. Le roman commence lorsque ce sprint littéraire s'arrête: Fabrice est emprisonné à la citadelle des Conti. C'est à ce moment que nous basculons dans l'intériorité des personnages, et c'est bien là que Stendhal excelle. Fabrice tombe amoureux de Clélia, Clélia tombe amoureuse de Fabrice, mais que peut-il bien se passer pour eux qui ne peuvent jamais se voir que d'une fenêtre à l'autre, Fabrice via un abat-jour minutieusement découpé depuis sa cellule, Clélia depuis sa volière? Que peut-il bien se passer, sinon une vie intérieure extrêmement riche d'émotions et de passions? La prison est la période centrale de l'oeuvre. Paradoxe ! Comment peut-il se faire que, pour ce jeune Fabrice tout plein de fougue, qui courait jadis de ville en ville et que l'on voyait galoper aux côtés d'un général renommé, l'apothéose se trouve là, entre quatre murs de prison, alors même que sa vie y est en péril? Si Julien Sorel oscille entre le rouge et le noir, alors Fabrice a vite fait de choisir son camp. On l'a compris, c'est un coeur passionné. Il n'est que le Rouge. Il n'a d'ailleurs que faire des honneurs qu'on lui donne: s'il n'est pas auprès de sa bien-aimée, sa vie n'est qu'un éternel supplice. Il retourne dans cette prison, de lui-même, pour recouvrer sa liberté (d'aimer). Il y a beaucoup de talent dans la description de Stendhal des sentiments de ces personnages passionnés (Fabrice mais aussi Clélia, la duchesse, Mosca), et il faut regretter que ce talent ne se montre que tard dans l'oeuvre, après, comme on l'a vu, un déroulement rapide d'événements. Mais la fin, qui se déroule encore plus rapidement, en devient particulièrement émouvante. Finalement, La Chartreuse de Parme, comme la vie de nos héros, ressemble assez à un train: tout va très vite, on s'arrête un moment, d'émotion intense, mais le train repart et finit par disparaître. La vie a ses moments d'extase, de folle passion et puis ces moments s'évanouissent. La vie continue son train.
julien33
• Il y a 2 semaines
Intéressé par le contexte italien du début du 19ème siècle, j'avais décidé de commencer l'oeuvre de Stendhal par la lecture de ce qui est considéré justement comme le plus italien des romans français. Je regrette un peu , l'idée n'était pas forcément judicieuse, il aurait sans doute été mieux d'aborder Stendhal - beaucoup plus classiquement j'imagine - par le rouge et le noir, LE Stendhal par excellence. Non que la lecture de la Chartreuse de Parme soit vraiment désagréable, mais j'ai eu assez souvent l'impression de me forcer, au point de ne pas lire , certains jours plus de 5-6 pages... Les 100 premières pages sont prometteuses, avec notamment le fameux passage de Waterloo, mais dès le retour de Fabrice en Italie, le texte peine à passionner, l'histoire, contrairement à la tonalité donnée par les premières pages s'avérant relativement peu epique ; et diffusant l'impression d'une valeur plus documentaire (côté assez récurrent de la littérature du 19ème d'ailleurs), que véritablement romanesque . On s'embourbe dans des considerations d'ordre politique et stratégique , et des luttes de pouvoir aux enjeux régionaux dans toute cette Italie du nord : c'est érudit et difficile à apprécier, je pense, sans un bon niveau historique.. On ne peut pourtant dire que le texte soit , de façon balzacienne, très chargé en descriptions alourdissant l'ensemble. Mais le texte est très étiré en enjeux de pouvoir divers et psychologie pas toujours passionnante . Le registre y reste essentiellement narratif mais de façon souvent très diluée, aboutissant souvent à ce sentiment de narration poussive et verbeuse. Et j'ai retrouvé une impression similaire en lisant Auto-da-fe de Elias Canetti, autre roman-monde (coïncidence - ou pas - , Stendhal était l'un des auteurs préférés de Canetti. ..) C'est là que le texte fait très 19ème : une tendance à faire du remplissage, un côté tres analytique de la langue. (Le texte est cependant matriciel d'une certaine modernité littéraire, Giono s'en souviendra dans le personnage de Angelo du Hussard sur le toit , et dans une moindre mesure Céline pour Bardamu, dans Voyage au bout de la nuit). Et un texte où les digressions vont bon train. Aspects retrouvés quelques temps plus tard dans la lecture par moi de Quatre-vingt treize de Victor Hugo, quoique de façon moins aggravée. Un style elliptique aussi (le plus genant selon moi) ,auquel le lecteur du début du 21ème siècle n'est plus habitué. Il est vrai que c'est un roman rédigé assez tôt dans son siècle, ceci expliquant sans doute les caractéristiques évoquées, et le fait qu'il n'y ait pas du tout la fluidité cristalline d'un Flaubert ou d'un Maupassant . Pour avoir parcouru le rouge et le noir, le roman paraît nettement plus fluide que la Chartreuse. de même que certains extraits des Chroniques italiennes, lus dans un manuel utilisé jadis en prépa. Textes à creuser pour voir si le vingtiemiste invétéré que je suis y trouve son compte. Donc intéressant mais pas mirobolant. Je ne suis pas sûr de le relire un jour.
ballaire
• Il y a 1 mois
[masquer]Livre à l’écriture emballante, où les champs de bataille napoléoniens succèdent au lac de Côme et précédent l’intriguante vie de cour de Parme. On se prend vite au jeu des aventures de Fabrice, bien qu’un peu antipathique sur les bords, mais aussi aux manigances de la duchesse et de son comte. C’est un roman d’amour, sous toutes ses formes : passionné, aveuglé, amical, de raison, d’intérêt... Bref, malgré quelques (rares) longueurs, une belle lecture quelque peu ternie par les dernières pages, où (attention au spoil !) l’histoire du fils caché tombe comme un cheveu sur la soupe, comme une (mauvaise) pirouette pour conclure avec autorité l'ouvrage, sans laisser le lecteur imaginer une suite. Le décalage entre la frénésie des 470 premières pages et la fin morne et fade bouclée en quelques pages et même lignes gâche l’image de ce roman, qui reste malgré tout un beau classique à découvrir ![/masquer]
Dystopie2193
• Il y a 3 mois
Chronique de Florian Mazé, sur Agoravox Je précise que la « chartreuse » n’est ni une femme ni une liqueur, mais un bâtiment religieux de Parme, qui existe toujours, et qui sert de décor aux jours finissants du héros. Celui-ci se nomme Fabrice del Dongo, jeune aristocrate italien, à moitié soldat et à moitié ecclésiastique, beau garçon, chevaleresque, audacieux, grand amoureux des femmes et bourreaux des cœurs. Se moquer de la politique c’est vraiment faire de la politique Pascal disait que se moquer de la philosophie était réellement philosopher. On pourrait en dire autant et même davantage de la politique, telle qu’est apparaît aux yeux des grands observateurs. N’oublions pas, au passage, que notre brave Henry Beyle, dit Stendhal, était diplomate, et qu’il connaissait autant les recoins de l’âme humaine que les corridors ou antichambres des bâtiments officiels, tout murmurants d’intrigues surprenantes, parfois sordides. Il n’est d’ailleurs de bon politologue que psychologue et sociologue en même temps, et même philosophe. Pour cette raison, on considère souvent Stendhal comme une sorte de Machiavel romanesque du XIXe siècle. Ce grand farceur de Stendhal nous en avertit d’ailleurs dans une de ces phrases ironiques dont il a le secret : « La politique, dans une œuvre littéraire, c’est un coup de pistolet au milieu d’un concert, quelque chose de grossier et auquel pourtant il n’est pas possible de refuser son attention. » Et force est de constater que la Chartreuse est bourrée d’analyses politiques, de ces « vilaines choses » qui « ont pour théâtre le cœur des personnages ». Références : livre second, chapitre XXIII. La fiction politique, plus vraie que la réalité Récemment, un influenceur nous avertissait que la fiction devenait un truc de filles, que les garçons, eux, ne lisaient plus que des livres de « développement personnel » ou des « histoires vraies » ; à croire que ça fait viril… Cela témoigne au contraire de l’immense bêtise de notre époque. Je peine moi-même à convaincre mes lycéens qu’une fiction de génie, même si elle se déroule en d’autres lieux et dans d’autres temps, comme la Chartreuse, nous en apprend beaucoup plus, sur la condition humaine et ses noirceurs, que toutes les non-fictions frelatées d’aujourd’hui ; celles-ci ne sont, pour la plupart, que de la bouillie bien-pensante déguisée en étude « objective ». Quel vilain mot que cet « objectif »… on devrait dire propagande et formatage, ce serait, justement, plus objectif ! La Chartreuse se déroule en effet, après la grande aventure napoléonienne (autrement dit, pour l’essentiel, après 1814) dans une Parme fictive, qui n’est pas l’État (duché) historique (dirigé par Marie-Louise d’Autriche) mais une principauté interlope, où règne assez despotiquement un prince de la maison Farnèse, puis son fils (alors que les vrais Farnèse ont été écartés du pouvoir au XVIIIe siècle). Bon nombre de lieux, y compris la rocambolesque forteresse où est détenu le héros un certain temps, sont aussi des inventions de Stendhal. La chartreuse, bâtiment bien réel où se retire le héros à la fin du roman, pour y mourir de chagrin ou d’autre chose, raccroche un peu le récit à la réalité historique et géographique… Mais peu importe : tout est vrai dans cette fiction, puisque Stendhal produit des archétypes, des personnages fondamentaux et permanents, dont on peut trouver des versions amoindries à toutes les époques et dans toutes les nations. Dans la Chartreuse, on voit défiler tous les paradoxes du XIXe siècle, qui sont, en réalité, des paradoxes de tout temps : les grands de ce monde n’hésitent pas à favoriser leurs ennemis, à trahir leurs alliés, le pouvoir n’a d’autres fins que son maintien coûte que coûte, sans aucunes considérations morales, la raison d’État prévaut constamment, même si elle est parfois mal comprise et mal interprétée, certaines affaires se règlent sur l’oreiller, ou avec des promesses d’oreiller, des opposants se révèlent de véritables complices, et vice-versa, le prince Ernest-Ranuce IV est un tyran absolutiste et impuissant, fort avec les faibles, faible avec les forts, etc. Au milieu de ce désordre surnagent quelques grands hommes d’État, comme le Premier ministre des Farnèse, le comte Mosca, ni sot ni méchant homme, mais qui a aussi ses grandes faiblesses et pas forcément les coudées franches. Si vous cherchez bien, vous verrez que bon nombre de nos actualités sont identiques à ces péripéties, même si nos décors sont nettement moins grandioses ou romantiques. En tout cas, le rapprochement Stendhal-Machiavel est une évidence ; Machiavel et Stendhal, et tant d’autres, sont à lire en priorité, sans donner de notre temps aux cuistreries de notre « politologie » bêlante. Un tableau sans pitié du pouvoir judiciaire Un trait frappe à la lecture de Stendhal, c’est sa vision du judiciaire. D’ailleurs, on reconnaît le grand écrivain – et aussi le Lecteur intelligent – à ce qu’il pense des juges ; si un auteur n’en pense que du bien, fuyez ! Vous avez affaire à un escroc. Dans la Chartreuse, le judiciaire s’incarne formidablement dans une des figures les plus noires, au physique et au moral, du roman : le fiscal général Rassi, excellente trouvaille que ce nom, qui évoque du pain dur, des choses racornies, en français, tout en sonnant italien. Dans les pays latins, le terme fiscal signifie « procureur » ; c’est encore comme cela qu’on les nomme en Espagne actuellement. Rassi étant « fiscal général », il est la plus haute autorité judiciaire de la petite principauté parmesane, et fait office de ministre de la justice, un titre qui lui est d’ailleurs explicitement attribué par l’auteur vers la fin du roman. La description que fait Stendhal de ce haut magistrat mâtiné de politicien opportuniste, et sans aucun scrupule, est impayable. Rassi est un sale individu, d’une grande laideur physique, issu de la basse bourgeoisie ; le prince et son Premier ministre le traitent comme un valet de bas étage, n’hésitant pas à l’insulter, voire à lui donner des coups de pied et des gifles (« soufflets »). Rassi encaisse tous les coups avec une bonne humeur égale, qui lui vaut, avec sa grande connaissance du droit, d’être toujours en place et de ne jamais tomber en disgrâce. Il n’a d’autonomie que pour diriger un peuple de magistrats poltrons, qu’il effraye, dont la tâche consiste surtout à donner quelque apparence légale aux procès intentés par le prince à ses opposants ou à ceux de son propre camp qui le gênent, dont le héros Fabrice del Dongo. Autrement dit, au gré des circonstances, et en fonction de sa place dans l’échiquier social, on peut s’en tirer avec une décoration et tous les honneurs ou bien enfermé à vie dans un cul de basse-fosse ou bien encore condamné à mort… Avec les tout petits justiciables, domestiques ou paysans, même si le texte les évoque en filigrane, on devine que Rassi est parfaitement autonome, et qu’il se montre impitoyable et des plus cruels. Encore aujourd’hui, cette autonomie scabreuse, c’est ce que notre politologie appelle pompeusement « l’indépendance de la magistrature ». Faut-il en rire ou en pleurer ? To the happy few… Au lieu d’appliquer le mot « FIN » au terme de son ouvrage, Stendhal emploie cette locution anglaise, qui signifie « aux quelques rares privilégiés ». Il ne s’agit pas là, bien entendu, de privilèges de naissance ou de fortune. Stendhal – un auteur peu lu de son vivant – signale par ces mots qu’il s’adresse à une aristocratie intellectuelle, autrement dit des Lecteurs qui sortent du lot commun. Ce sont donc des romans comme la Chartreuse qu’il nous faut lire pour devenir un peu moins bêtes ; à bon entendeur, salut ! Florian Mazé
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Classiques et Littérature , Littérature Classique
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- EAN
- 9782823870190
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- Collection ou Série
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- Format
- Livre numérique
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- DRM
- Filigrame numérique
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