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Beloved
Hortense Chabrier (traduit par), Sylviane Rué (traduit par)
Date de parution : 22/05/2008
Éditeurs :
10/18

Beloved

Hortense Chabrier (traduit par), Sylviane Rué (traduit par)
Date de parution : 22/05/2008

Inspiré d’un fait divers survenu en 1856, Beloved exhume l’horreur et la folie d’un passé douloureux. Ancienne esclave, Sethe a tué l’enfant qu’elle chérissait au nom de l’amour et de...

Inspiré d’un fait divers survenu en 1856, Beloved exhume l’horreur et la folie d’un passé douloureux. Ancienne esclave, Sethe a tué l’enfant qu’elle chérissait au nom de l’amour et de la liberté, pour qu’elle échappe à un destin de servitude. Quelques années plus tard, le fantôme de Beloved, la petite...

Inspiré d’un fait divers survenu en 1856, Beloved exhume l’horreur et la folie d’un passé douloureux. Ancienne esclave, Sethe a tué l’enfant qu’elle chérissait au nom de l’amour et de la liberté, pour qu’elle échappe à un destin de servitude. Quelques années plus tard, le fantôme de Beloved, la petite fille disparue, revient douloureusement hanter sa mère coupable. 

Loin de tous les clichés, Toni Morrison ranime la mémoire et transcende la douleur des opprimés. Prix Pulitzer en 1988, Beloved est un grand roman violent et bouleversant. 

Traduit de l’anglais (États-Unis)
par Hortense Chabrier
et Sylviane Rué

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EAN : 9782264047960
Code sériel : 2378
Façonnage normé : POCHE
Nombre de pages : 384
Format : 108 x 177 mm
EAN : 9782264047960
Code sériel : 2378
Façonnage normé : POCHE
Nombre de pages : 384
Format : 108 x 177 mm

Ils en parlent

« Entre détresse et folie de l'esclavage, Toni Morrison, écrivain noire couronnée par le prix Nobel fait entendre une musique charnelle, incantatoire, qui plonge au plus profond des racines de ses frères de couleur. »
L'étudiant

« La reconnaissance littéraire vient avec le Chant de Salomon. Le triomphe mondial ensuite avec Beloved : l'histoire horrible d'une ancienne esclave qui tue sa fille pour qu'elle ne connaisse pas le même asservissement. Cela lui vaut le prix Pulitzer en 1988, le prix Nobel de littérature en 1993. »
Annette Lévy-Willard, Libération

« Il y a des romans qui marquent la littérature et l'histoire d'un peuple. Beloved peut être considéré comme tel. L'auteure, l'Américaine toni Morrison, est reconnue pour son œuvre qui retrace l'histoire des Noirs d'Amérique. [...] Beloved est une œuvre marquante. Une de celle qu'on a envie de relire et d'entendre raconter. »
La Presse

« À travers la malédiction d'un bébé, Toni Morrison réussit à conter la folie de l'esclavage par le prisme d'un récit très vivant, puissant, où le souffle d'une langue populaire et chatoyante se mêle à une langue plus savante. »
F.J. Phosphore

« Ceux qui ont lu Beloved, son cinquième livre, classé meilleur roman américain des vingt-cinq dernières années, ne seront plus jamais les mêmes que ceux qui ne l'ont pas encore lu. Son œuvre, venue restituer à l'Amérique la mémoire, l'imaginaire et la langue de sa communauté, sonde la société contemporaine en trangressant tous les tabous.  [...] Apogée dans sa construction en cercles, dans sa langue charnelle, sombrement poétique, ce roman a pour personnage primordial... une maison, le "124". »
Le Point

« Et puis c'est le maître livre, Beloved, que Toni Morrison met six ans à élaborer, pas à cause des recherches historiques qu'elle entreprend, mais parce que la structure en est extrêmement sophistiquée, de manière à montrer comment le refoulé peut faire retour sous la forme d'un fantôme : il s'agit d'exorciser un traumatisme historique, l'esclavage, tout en se concentrant sur l'unicité d'un personnage, une femme, qui un jour a préféré tuer sa fille plutôt que de la voir retomber entre les mains de son ancien maître. »
Claire Devarrieux, Libération

« Un roman bouleversant, violent et douloureux, qui a valu à son auteur le prix Pulitzer en 1988. »
Eliane Vipois, Lire

« Le prix Pulitzer 1988 avait déjà salué ce talent, la sève de cette littérature gorgée de violence, d'effroi et de sensualité... Toni Morrison, c'est une conscience lucide, une personnalité affirmée pour qui écrire est un engagement politique à partager. »
La dépêche du dimanche

« Beloved est une inscription gravée sur une tombe : le nom d'un fantôme. Celui d'une petite fille égorgée par sa mère, une esclave noire évadée d'une plantation en 1870. Un crime commis au nom de l'amour et de la détresse pour que l'enfant ne retombe pas aux mains du maître. À travers la malédiction d'un bébé qui revient hanter sa mère, le roman de Toni Morrison conte la folie de l'esclavage bien plus puissamment que les Racines les plus noires. »
Christophe Tison, Glamour, 1990

PRESSE

Ce qu'en pensent nos lecteurs sur Babelio

  • kareen735 03/03/2024
    "Elle ne put pas croire que Halle sut ce qu'elle ignorait ; que Halle, qui n'avait jamais respiré une bouffée d'air libre, sût qu'il n'y avait rien de meilleur au monde." Une fois n'est pas coutume, j'ai dû lire la quatrième de couv' pour bien comprendre ce que j'avais sous les yeux. Ce n'est absolument pas un roman facile. Il demande d'entrer dans les limbes de personnages qui ne savent plus vraiment où ils en sont. La différence entre la liberté et la propriété n'est pas aussi nette que l'on peut le croire. Il ne s'agit pas de décréter quelqu'un de libre pour qu'il se sente responsable pleinement de sa vie. Il ne suffit pas d'être du bon côté des Etats-Unis pour enlever toutes peurs et asseoir toutes les certitudes d'un être conscient. Il y a d'un côté les corps et les âmes. Dans ce roman, les deux ne se rejoignent pas toujours. C'est ce que l'autrice tente d'expliquer, en tout cas c'est ce que j'ai cru comprendre à travers ces lignes. Il y a dans chaque page des âmes en lambeaux qui ne savent même plus si elles souhaitent être recousues. Cet état d'errance est glaçant. Une lecture pas facile car le sujet est dur mais pas que ! La narration est corsée. Il demande au lecteur de savoir quand il s'agit du passé ou du présent. C'est périlleux. Plus d'une fois je me suis sentie complètement larguée. Nous suivons Sethe et sa fille qui accueillent un nouveau venu à la maison. C'est une ancienne connaissance de Sethe. Il découvre une habitation hantée. Les deux locataires se sont faites aux mouvements intempestifs. Quel fantôme hante ces lieux et pourquoi ? Les révélations de ce roman racontent une part de l'histoire sombre des Etats-Unis. Elles s'attachent à mettre en lumière les traumatismes crus des anciens esclaves. Je me souviens d'un passage puissant où un des personnages comparent son existence à celle d'un coq - les émotions sont parfaitement imagées. C'est un classique, à lire au moins une fois dans sa vie. /!\ N'oublions pas que Beloved fait partie des livres menacés d'être interdit aux US. N'oublions pas que les livres et la lecture doivent TOUJOURS être protégés. /!\ "Elle ne put pas croire que Halle sut ce qu'elle ignorait ; que Halle, qui n'avait jamais respiré une bouffée d'air libre, sût qu'il n'y avait rien de meilleur au monde." Une fois n'est pas coutume, j'ai dû lire la quatrième de couv' pour bien comprendre ce que j'avais sous les yeux. Ce n'est absolument pas un roman facile. Il demande d'entrer dans les limbes de personnages qui ne savent plus vraiment où ils en sont. La différence entre la liberté et la propriété n'est pas aussi nette que l'on peut le croire. Il ne s'agit pas de décréter quelqu'un de libre pour qu'il se sente responsable pleinement de sa vie. Il ne suffit pas d'être du bon côté des Etats-Unis pour enlever toutes peurs et asseoir toutes les certitudes d'un être conscient. Il y a d'un côté les corps et les âmes. Dans ce roman, les deux ne se rejoignent pas toujours. C'est ce que l'autrice tente d'expliquer, en tout cas c'est ce que j'ai cru comprendre à travers ces lignes. Il y a dans chaque page des âmes en lambeaux qui ne savent même plus si elles souhaitent être recousues. Cet état d'errance est glaçant. Une lecture pas facile...
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  • deslivresquisenvolent 25/02/2024
    La parution récente de cette nouvelle traduction de Beloved aux éditions Bourgois par Jakuta Alikavazovic m’a donné envie de me plonger dans ce roman. Toni Morisson, Nobel de littérature 1993, a obtenu le prix Pulitzer en 1988 pour Beloved, qui est considéré comme l'une des meilleures oeuvres de fiction américaine. Son histoire est inspirée d'un personnage et de faits réels. Nous sommes en 1873, à Cincinnati dans l'Ohio, juste après la guerre de Sécession. Sethe vit au 124 Bluestone Road, une maison située en zone libre qu’elle avait rejoint avec ses enfants il y a dix-huit ans, alors qu’elle était fugitive. De cette famille il ne reste plus que Sethe, sa fille Denver et le fantôme de sa fille ainée assassinée, Beloved. Toni Morisson écrit un roman très exigent pour son lecteur. Elle procède par ellipse narrative éclairant par touches successives le drame central du roman: la mort de Beloved. Pour cela, elle rassemble les souvenirs succincts de divers personnages, à des époques différentes, laissant le lecteur face à un récit éclaté. #8232;L’écriture est laborieuse, mais ce n’est pas fortuit. Toni Morisson fait sans aucun doute souffrir son lecteur pour mieux faire passer son message: décrire la réalité cruelle de l’esclavagisme et la difficile réappropriation de sa liberté suite à l’abolition. Quand on est nié dans son humanité, toujours pourchassé par ses anciens maitres blancs ou encore persécuté, le traumatisme perdure, comme une plaie ouverte. On peut être amené à commettre l’irréparable, un sacrifice ultime, comme un acte d’amour désespéré… Beloved est un grand roman, une expérience de lecture inoubliable, un plaidoyer universel et sans complaisance contre la cruauté et pour la dignité humaine. Bravo à Jakuta Alikavazovic pour cette magnifique traduction toute en finesse.La parution récente de cette nouvelle traduction de Beloved aux éditions Bourgois par Jakuta Alikavazovic m’a donné envie de me plonger dans ce roman. Toni Morisson, Nobel de littérature 1993, a obtenu le prix Pulitzer en 1988 pour Beloved, qui est considéré comme l'une des meilleures oeuvres de fiction américaine. Son histoire est inspirée d'un personnage et de faits réels. Nous sommes en 1873, à Cincinnati dans l'Ohio, juste après la guerre de Sécession. Sethe vit au 124 Bluestone Road, une maison située en zone libre qu’elle avait rejoint avec ses enfants il y a dix-huit ans, alors qu’elle était fugitive. De cette famille il ne reste plus que Sethe, sa fille Denver et le fantôme de sa fille ainée assassinée, Beloved. Toni Morisson écrit un roman très exigent pour son lecteur. Elle procède par ellipse narrative éclairant par touches successives le drame central du roman: la mort de Beloved. Pour cela, elle rassemble les souvenirs succincts de divers personnages, à des époques différentes, laissant le lecteur face à un récit éclaté. #8232;L’écriture est laborieuse, mais ce n’est pas fortuit. Toni Morisson fait sans aucun doute souffrir son lecteur pour mieux faire passer son message: décrire la réalité cruelle de l’esclavagisme et la...
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  • Flolie 23/02/2024
    Au travers de Sethe, sa famille d'avant et après, de sa maison, on découvre un pan de l'histoire qui m'etait peu connu de l'esclavage, pas en tant que phénomène sur la grande histoire, mais comme événement de vie tragique, cruel, marquant de ceux qui l'ont vécu du "mauvais" côté de l'histoire. Depuis ses racines jusqu'à son abolition, laissant des traces jusqu'au plus profond des êtres l'ayant subi. Leur quotidien, leur souvenirs toujours présents, leur culpabilité, l'amour, l'envie, la solitude, la vie, les morts. Tout est vu sous ce filtre. Alors ça fait mal, ça fait vivre, pleurer, avancer. Le tout sous une plume particulière, qui force le malaise, l'oppression, qui fait travailler son lecteur, le maltraite presque. Le tout de manière intentionnelle. On ne ressort pas indemne de cette lecture.
  • clesbibliofeel 12/02/2024
    Ma chronique sera plus longue que d’habitude, mais comment parler d’un chef-d’œuvre en quelques lignes ? Je vais d’abord parler de la nouvelle traduction et de la postface de la traductrice qui fait corps avec le texte de Toni Morrison, puis résumer brièvement le roman de façon chronologique, ce qui peut éviter à certains lecteurs d’être rebutés par le côté éclaté de la narration (libre à vous de lire ou pas cette partie…). Je n’ai pas pu résister à donner des extraits de la postface de la traductrice dont l’analyse, brillante, magnifie encore un peu plus le texte de Toni Morrison. Pour terminer avec quelques citations dans cette traduction récente et dans celle de 1989, à titre de comparaison. « Peut-être le roman parfait »… Ce n’est pas moi qui le dit mais la traductrice, Jakuta Alikavazovic, dans une postface enflammée, sous titrée De la liberté. Elle dit son éblouissement et son désir de ce roman dans une lecture qui adopte le temps de l’écriture… La traduction comme une lecture privilégiée : c’est beau pour celle ou celui à même d’atteindre ce Graal. Ainsi, le texte retrouve une nouvelle jeunesse, une nouvelle vigueur bienvenue, n’en déplaise aux bas-de-plafond instaurant de nouvelles formes de censures, proscrivant Beloved de nos jours dans certains établissements scolaires, aux États-Unis… On a de plus en plus de nouvelles traductions de classiques, cela me réjouit. J’ai même du mal à résister à ce type de publication. Et pourtant j’avais toutes les raisons de reporter cette lecture avec les dizaines de romans reçus pour la sélection du Prix du livre Orange 2024... Mais je ne regrette pas de ne pas avoir résisté et de m’être plongé dans ces pages magnifiques. D’une certaine manière ce livre là, avec la postface qui se hausse au niveau de l’œuvre, bénéficiant du recul de 25 ans, me sert de mètre-étalon pour élaborer un avis sur les romans tels qu’ils se publient actuellement. J’ai comparé de longs passages de la traduction de 1989 avec celle-ci. Je préfère de loin celle-ci, sans être en mesure de dire laquelle respecte l’originale… Mais est-ce la question si l’esprit du texte est respecté ? Toute traduction est une interprétation et on l’admet facilement pour la musique de Bach, Beethoven, Mozart… Ici l’écriture et le rythme sont plus vifs, le texte plus resserré donnant une musique favorisant l’accueil du sens, de cet amour retiré et donné à la fois à Beloved. Résumé chronologique : 1855 : Sethe, esclave dans la plantation de Sweet Home, s'est enfuie pour rejoindre la mère de son mari, Baby Suggs, la seule dont la liberté a pu être rachetée par son fils. Avant sa propre fuite, Sethe a envoyé chez sa belle-mère ses trois enfants : deux garçons et une petite fille qui commence à peine à ramper. Au cours de sa fuite, Sethe, enceinte, accouche d'une autre petite fille qu'elle prénomme Denver. Elle se croit tirée d'affaire, mais les Blancs qui recherchent les fuyards, finissent par les trouver. Cachée dans la grange, désespérée, elle tue sa fille de deux ans afin de lui épargner une vie d’esclave. Denver, elle, sera sauvée in extremis. Sethe sera emprisonnée, puis libérée et retournera vivre chez Baby Suggs où elles seront accompagnées du fantôme du bébé... 1873, Ohio, où la protagoniste Sethe et sa fille Denver essayent de reconstruire leur vie après la fin de la guerre de Sécession et l'abolition de l’esclavage. La belle-mère de Sethe, Baby Suggs, a vécu avec elles jusqu'à sa mort huit ans plus tôt. Juste avant la mort de Baby Suggs, les deux fils de Sethe, Howard et Buglar, s'étaient enfuis. Sethe croit qu'ils se sont enfuis à cause de la présence malveillante qui a hanté leur maison au 124, chemin Bluestone, pendant des années. L'histoire s'ouvre sur une introduction au fantôme : « Le 124 était habité de malveillance. Imprégné de la malédiction d’un bébé. Les femmes de la maison le savaient et les enfants aussi. » Un jour une jeune fille perdue, mystérieuse, se présente à leur porte. Elle a dix-huit ans et prétend s'appeler Beloved comme l’inscription sur la tombe du bébé que Sethe a tué des années auparavant. Extraits de la postface: Jakuta Alikavazovic : « Qu’est-ce qu’un livre parfait ? La question, à première vue, n’a pas plus de sens que celle de savoir ce qu’est un séisme parfait. Et pourtant. »… La liberté est le thème principal de l’œuvre de Toni Morrison. « Qui, dans l’histoire des États-Unis, en a été privé d’avantage que quiconque ? A partir de là elle écrit l’histoire de Sethe. Un roman sur la liberté. Et sur son prix. » « … une vision. Une fille qui sort de l’eau, un chapeau sur la tête. Qui est-elle ? » Au cœur du livre apparaît non l’assassine d’un bébé, mais l’assassinée, a l’âge qu’elle aurait alors, 18 ans... » « Sa source d’inspiration : l’histoire vraie d’une ancienne esclave, Margaret Garner, qui tente de tuer ses enfants (et, pour l’un y parvient) plutôt que les rendre à la captivité. Toni Morrison est la première à le revendiquer : au-delà de ce point de départ historique, elle s’affranchit des faits. S’en remet à son imagination. On pourrait le dire autrement : pour écrire sur la liberté, il lui faut une forme libre. Et la forme suprême que prend la liberté au vingtième siècle, c’est peut-être le roman. Un roman comme une rivière en crue, qui quitte le lit du réalisme et même, semble-t-il parfois, celui de la prose. Une langue qui marie les contraires et dont l’effet ne se laisse circonscrire que par d’apparents oxymores : ainsi parle-t-on pour Beloved, de réalisme magique, de prose poétique. En résulte un roman aux multiples facettes, histoire de famille, histoire de fantôme, histoire d’amour. Histoire politique, également, et réquisitoire contre tout un pays qui longtemps aura préféré regarder ailleurs. Faire comme si de rien n’était. » Dans son discours d’acceptation du prix Nobel en 1993, à Stockholm, Toni Morrison insiste sur le rôle du langage : « la nécessité de le défendre face aux attaques délétères dont il est la cible, face aux ersatz qui le mettent en péril : des formes d’expression qui se prétendent vivantes mais qui sont mortes. Et qui répandent la mort. Du "langage estropié qui estropie", dit-elle, diamétralement opposé de sa fonction première : "un outil qui permet de rencontrer le sens, qui sert de boussole, qui exprime l’amour". Et d’ajouter cette précision qui me semble essentielle : "il ne s’agit pas de contraindre le langage à rester en vie", ni d’"envisager cette survie comme une fin en soi. La vitalité d’une langue réside dans son aptitude à dépeindre l’existence concrète, fictive et potentielle de ceux qui la parlent, la lisent, l’écrivent". Pourquoi cette phrase est-elle essentielle ? Pour ce qu’elle dit du langage, bien entendu. Mais aussi – surtout ?- pour ce qu’elle dit de l’existence. De sa nature : car la vie que nous chérissons ou devrions chérir n’est pleine, entière qu’à considérer sa nature triple. " Concrète, fictive et potentielle". C’est parce que l’existence est telle que nous avons besoin de ce langage qu’est la littérature. » Citations en comparant les deux traductions disponibles : Traduction de 1989 due à Hortense Chabrier et Sylviane Rué : « Paul D s’assied dans le fauteuil à bascule et examine l’édredon rapiécé de couleur de carnaval. Ses mains pendent, molles, entre ses genoux. Il y a trop de choses à éprouver pour cette femme. La tête lui fait mal. Soudain il se souvient de N° Six, quand il essayait de décrire ce qu’il ressentait pour la Femme-aux-Cinquante-Kilomètres. - C’est l’amie de mon esprit. Elle me ressemble, vieux. Les morceaux que je suis, elle les rassemble et elle me les rend tout remis en ordre. C’est bon, tu sais, d’avoir une femme qui est l’amie de ton esprit. »» La même citation dans la traduction de 2023 due à Jakuta Alikavazovic : « Paul D s’assoit dans le fauteuil à bascule et examine le patchwork aux couleurs de fête foraine. Ses mains sont molles entre ses genoux. Il y a trop de choses à éprouver envers cette femme. Il a mal à la tête. Soudain lui revient la façon dont Sixo s’efforçait de décrire ses sentiments pour la femme des Cinquante Bornes. "Elle est une amie de mon esprit. Elle me rassemble, mon gars. Les morceaux qui me font, elle les rassemble et elle me les rend tout dans le bon ordre. Ça fait du bien, tu sais, d’avoir une femme qui est l’amie de ton esprit." » Autre citation dans la traduction de 1989 due à Hortense Chabrier et Sylviane Rué : « - N° Six plante du seigle pour que la parcelle d’en haut donne mieux. N° Six prend, et puis il nourrit la terre, et ça vous fait une meilleure récolte. N° Six prend et nourrit N° Six, ça fait qu’il vous donne plus de travail. Astucieux, mais Maître d’École le fouetta quand même pour lui montrer que les définitions appartiennent aux définisseurs, et non pas aux définis. » La même citation dans la traduction de 2023 due à Jakuta Alikavazovic : « "Sixo plante du seigle pour donner une meilleure chance au carré du haut. Sixo prend et nourrit la terre, vous donne plus de récoltes. Sixo prend et nourrit Sixo, vous donne plus de travail." Malin, mais le maître d’école le battit néanmoins, histoire de lui montrer que les définitions appartiennent à ceux qui définissent – et non à ceux qui sont définis. » Un livre essentiel – rehaussé encore par cette traduction lumineuse – qui va entrer dans mon panthéon littéraire personnel, une langue vivante qui fait du bien, un livre qui lave de la médiocrité, de la barbarie. Peut-être bien le roman parfait ! Qu’en pensez-vous ?Ma chronique sera plus longue que d’habitude, mais comment parler d’un chef-d’œuvre en quelques lignes ? Je vais d’abord parler de la nouvelle traduction et de la postface de la traductrice qui fait corps avec le texte de Toni Morrison, puis résumer brièvement le roman de façon chronologique, ce qui peut éviter à certains lecteurs d’être rebutés par le côté éclaté de la narration (libre à vous de lire ou pas cette partie…). Je n’ai pas pu résister à donner des extraits de la postface de la traductrice dont l’analyse, brillante, magnifie encore un peu plus le texte de Toni Morrison. Pour terminer avec quelques citations dans cette traduction récente et dans celle de 1989, à titre de comparaison. « Peut-être le roman parfait »… Ce n’est pas moi qui le dit mais la traductrice, Jakuta Alikavazovic, dans une postface enflammée, sous titrée De la liberté. Elle dit son éblouissement et son désir de ce roman dans une lecture qui adopte le temps de l’écriture… La traduction comme une lecture privilégiée : c’est beau pour celle ou celui à même d’atteindre ce Graal. Ainsi, le texte retrouve une nouvelle jeunesse, une nouvelle vigueur bienvenue, n’en déplaise aux bas-de-plafond instaurant de nouvelles formes de censures, proscrivant...
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  • Hale_Bopp 01/02/2024
    Beloved, c'est le seul mot dont Sethe a pu payer la gravure sur la tombe de sa fille. Sethe, esclave fugitive qui a rejoint ses enfants envoyés avant elle chez sa belle-mère Baby Suggs, laissant à l'arrière son mari. Baby Suggs n'est plus ; les deux garçons de Sethe ont fuit. Restent Sethe, sa plus jeune fille Denver et l'esprit de sa soeur qui hante la maison. Beloved, c'est le nom de cette jeune fille qui un jour apparait devant la maison. Pour Denver, pas de doute, sa soeur est revenue et elle se doit de la protéger. Beloved, ce sont des histoires et des temporalités qui s'entrecroisent et laissent entrevoir, par petites touches d'abord, comment Sethe et sa famille en sont arrivés là. De l'horreur de l'esclavage (plus ou moins terrible selon les "propriétaires") aux traumatismes qui resteront pour ceux qui l'ont subi, pour leur descendance aussi, la plume de Toni Morrison navigue poétiquement en eaux troubles. Une oeuvre superbe quoiqu'un peu trop étirée par la volonté de cacher les détails au premier abord (on revient plusieurs fois sur les mêmes scènes, les évoquant rapidement, un peu plus et enfin les mettant en scène entièrement). Cette version française rend parfaitement le superbe de la plume, elle évite l'écueil péjoratif des dialogues en "petit nègre" mais ne trouve pas vraiment d'autre procédé pour rendre le vernaculaire afro-américain (AAVE) et le neutralise donc. Parfois, ce n'est pas plus mal, il vaut mieux laisser la place aux personnages, il vaut mieux laisser le public cible se projeter en eux.Beloved, c'est le seul mot dont Sethe a pu payer la gravure sur la tombe de sa fille. Sethe, esclave fugitive qui a rejoint ses enfants envoyés avant elle chez sa belle-mère Baby Suggs, laissant à l'arrière son mari. Baby Suggs n'est plus ; les deux garçons de Sethe ont fuit. Restent Sethe, sa plus jeune fille Denver et l'esprit de sa soeur qui hante la maison. Beloved, c'est le nom de cette jeune fille qui un jour apparait devant la maison. Pour Denver, pas de doute, sa soeur est revenue et elle se doit de la protéger. Beloved, ce sont des histoires et des temporalités qui s'entrecroisent et laissent entrevoir, par petites touches d'abord, comment Sethe et sa famille en sont arrivés là. De l'horreur de l'esclavage (plus ou moins terrible selon les "propriétaires") aux traumatismes qui resteront pour ceux qui l'ont subi, pour leur descendance aussi, la plume de Toni Morrison navigue poétiquement en eaux troubles. Une oeuvre superbe quoiqu'un peu trop étirée par la volonté de cacher les détails au premier abord (on revient plusieurs fois sur les mêmes scènes, les évoquant rapidement, un peu plus et enfin les mettant en scène entièrement). Cette version française rend parfaitement le superbe de...
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