Aumônier de la France libre : Le livre de René de Naurois

Dès les premières pages, j'ai été stupéfié par la description du débarquement du 6 juin 1944. C’était comme si je voyais la scène avec les yeux du père René de Naurois lui-même, au plus près de l'action, sans jamais tomber dans le sensationnalisme. Ce réalisme poignant m’a happé immédiatement, et ne m’a plus quitté jusqu’à la fin du livre. Commencées en 1949 à partir de ses journaux couvrant 1933 à 1958, ces mémoires sont bien plus que le récit d’un prêtre engagé : elles sont une plongée saisissante dans les bouleversements du XXème siècle. Le père René de Naurois a tout vu, tout traversé : des souvenirs de son enfance dans la vallée du Tarn pendant la Première Guerre mondiale à la reconstruction d’après-guerre 1945. Il n’est pas qu’un témoin passif, il est un acteur de l’Histoire, engagé corps et âme, sans autre arme que sa foi et son sacerdoce, dans le combat contre le nazisme, puis le communisme stalinien. Ce qui m’a particulièrement frappé, c’est sa lucidité, son humilité et surtout sa volonté d'action. Qu’il évoque la montée du nazisme en Allemagne où il étudiait, ou les rivalités internes à la Résistance française, son regard reste toujours humain, curieux, critique mais sans haine. Il rend hommage à ceux qu’il a croisés, dans les milieux intellectuels, les réseaux de résistance, dans les paroisses, dans les camps militaires, dans les coulisses du pouvoir, sur le champ de bataille et son témoignage donne vie à tant de personnes souvent oubliées. Le contraste entre l’Allemagne de ses années d’étudiant entre 1933 et 1939 et celle qu’il découvre en ruines à partir de 1945, notamment dans le secteur soviétique, est saisissant. On comprend mieux, à travers lui, comment une partie du christianisme français, loin du mythe commode d’une Église passive, a joué un rôle déterminant dans la Résistance, la solidarité, et même la reconstruction. Son témoignage rare porte notamment sur les pensées et les actions du catholicisme français et toulousain, entre 1933 et les années 1950. Loin du fameux mythe du "silence du pape Pie XII" et de l'inaction des catholiques, le père Naurois nous montre au contraire sa forte implication, à tous les niveaux de résistance et même dans la réorganisation de l'après-guerre, même jusque dans des filières d'exfiltration face au totalitarisme communiste de l'URSS. Habitant à Toulouse, je pris plaisir à imaginer les évènements vécus par le père René de Naurois en ces lieux ! Après le tumulte, le père René de Naurois retourne à sa passion pour l’ornithologie. Comme un symbole de résilience, de retour à la contemplation, et d’un amour intact pour la vie. Un témoignage exceptionnel, lucide, spirituel, profondément humain, que je recommande sans réserve et à remettre entre toutes les mains.

Le père René de Naurois a beaucoup à raconter sur son vécu de la guerre et décrit à merveille les sentiments tièdes et l’attitude passive des populations allemande (dans les années 30) et française (sous le régime de Vichy). Ses mémoires vous feront voyager des rues de la ville rose, aux cabinets politiques de la City, jusqu’aux plages de Normandie où l’aumônier assiste ses commandos, prodiguant les sacrements sous le feu.