La raison dans l'Histoire : Le livre de Georg Wilhelm Friedrich Hegel

Hegel. Ce nom a probablement terrorisé beaucoup d'étudiants en philosophie et philosophes eux-mêmes (dédicace à Schopenhauer), et à raison, car dans l'histoire de la discipline Hegel représente un tournant : il introduit ici l'idée d'un sens de l'histoire, histoire comprise comme réalisation progressive de la liberté de l'esprit à travers divers stades d'évolutions, qui se réalisent par dialectique (affirmation/négation/dépassement), dont la phase finale serait l'État éthique et rationnel qui unit la liberté subjective (individualité, esprit, conscience) à la liberté objective (une idée d'universel issue du divin qu'il incarne), par l'intermédiaire de lois, de droits et de devoirs que l'individu rationnel reconnaît et façonne. Si ça ne tenait qu'à la stricte et générale théorie, dont la compréhension est très stimulante, j'aurais donné 5 étoiles - si on met à part ses formulations alambiquées, qu'on apprend presque à apprécier vers la fin tant elles peuvent paraître ironiques par endroit dans leur longueur ou complexité. Malheureusement, Hegel reste un penseur de son temps, et si ses propos sur les Indiens ou les Noirs peuvent donner à sourire l'esprit qui sait ne pas être trop anachronique, ça rappelle que sa pensée a peut-être vieillit sous de nombreux aspects, et on comprend pourquoi certains de ses travers ont pu permettre à des intelligences modestes de créer des œuvres totalisantes et idéologiques dangereuses. Toutefois, on perçoit bien que ce n'est pas du tout le fond de la pensée d'Hegel qui, ici au moins, rappelle que si l'histoire à une fin selon lui, cette fin est réglée par le droit, la raison et l'éthique. Une œuvre intéressante, qui donne une méthode riche, la dialectique, qui peut s'appliquer à toute réflexion cherchant des réponses plus ou moins fermes, et une vision assurément cohérente et complexe qui donne à penser sur notre propre période historique et notre passé récent.