L'Empire du bien : Le livre de Philippe Muray

Philippe Muray nous offre ici une ode à la birépartition du monde entre le bien et le mal. Sans ce dernier le bien perd de sa substance et triomphe alors son Empire : Cordicopolis, la cité de de la bienveillance et de la dévotion ad nauseam. Bières et charcuteries soft, interdictions en tout genre, campagnes de sensibilités. Le monde des années 1990 en plein virage d'encoconnage ne dévitaliserait pas la vie ? Le tournant du XXIème siècle et son uniformisation à venir ne rendrait-il pas obsolète toute notion, tout principe, toute décision ? Certaines tournures de phrases, bien trop complexes, peuvent nuire à notre lecture (notamment lors de la description de certains personnages). Malgré tout, l'analyse de cette nouvelle société à partir de la réhabilitation de ce terme de "cordicole" est réussie. Cette dernière a bien plus d'impact de nos jours où cette hypersensibilisation rime avec une infantilisation elle aussi anticipée par Muray. En lisant Muray j'avais cette curieuse sensation de retrouver par différents aspects un jargon obertonien. Notamment dans ses prises de position contre l'État infantilisateur. Mais subsiste un style unique, à la fois poétique, métaphorique et à charge. Ce n'est pas un auteur facile d'accès mais il en vaut le détour. À fortiori, il serait plus efficace de juger cet auteur en ayant lu plusieurs de ses ouvrages qui se complètent, s'entrecroisent et nous ont laissé en héritage nombre de néologismes : Cordicopolis, homo festivus, rebellocrate...