Munich 1938 - La paix impossible : Le livre de Maurizio Serra

Munich 1938. Un nom qui au fil des décennies s'est imposé comme le moment ou les grandes démocraties européennes ont cédé face à expansionnisme belliciste nazi, pensant que la garantie de la paix compenserait l'abandon de la Tchécoslovaquie aux griffes du Führer . Inutile de rappeler que le contexte actuel en Europe de l'est a vu l’appellation critique de "munichois" revenir (à tort et à raison) pour qualifier ceux qui seraient tenté de négocier avec le Kremlin M.Serra s'est livré à une faramineuse plongée dans les multiples sources autour de cette période (en témoigne les nombreuses notes de bas de page qui émaillent le livre renvoyant aux archives diplomatiques, (auto)biographies des protagonistes). Il plante le décor en préambule et dresse le portrait fourni des dirigeants impliqués de près (Daladier,Chamberlain, Hitler,Mussolini),ou de loin (le président Tchécoslovaque Benes) et des absents soviétiques et américains (Roosevelt, et le "petit père des peuples). Avant de nous faire suivre heure par heure la conférence, il prends aussi le temps de planter le pouls de chaque pays, de l'époque (où les traités bilatéraux entre pays sont légions), soulignant évidemment le pacifisme ambiant des opinions publiques, l'infiltration de la pensée germanophile aussi (notamment en Angleterre), la volonté d'apaisement avec le 3eme Reich de certains hommes politiques (entre autres,le responsable en 1938 du Quai d'Orsay, Bonnet )la difficile prise en compte des minorités dans l'état Tchécoslovaque. Serra,auteur d'une biographie sur le Duce s'attarde sur Mussolini(on sent que l'image "chaplinesque"/bouffonne du fasciste Italien l'agace car superficielle) et souligne que ce dernier, ne cherchant pas la guerre contrairement à son voisin allemand, voulait surtout tirer bénéfice de cette situation à moindre frais en jouant le médiateur. La fin de l'ouvrage dresse un court parallèle avec la situation dix ans plus tard qui verra Benes revenu au pouvoir être cette fois ci dupe des Soviétiques et la Tchécoslovaquie basculer de l'autre coté du "rideau de fer". Les ultimes pages de l'ouvrage se veulent un aperçu de l'évolution de la perception de cette période et le rappel de la problématique que cette événement historique symbolise : "l’attitude des démocraties face à la force et du pacifisme face à la brutalité ".

Particulièrement bien documenté, détaillé et à la fois synthétisé, cet ouvrage permet de mieux comprendre la géopolitique de l'entre-deux-guerres de l'Europe de l'Est.  Les personnalités politiques, leurs relations et les nombreux traités qui s'entremêlent entre pays sont détaillés et analysés avec pertinence.  L'écriture et la construction du livre rendent la lecture intéressante, bien que la somme d'informations à enregistrer soit importante.