Où atterrir ? - Comment s'orienter en politique : Le livre de Bruno Latour

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La Découverte

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Peut-on continuer à faire de la politique comme si de rien n'était, comme si tout n'était pas en train de s'effondrer autour de nous ? Dans ce court texte politique, Bruno Latour propose de nouveaux repères, matérialistes, enfin vraiment matérialistes, à tous ceux qui veulent échapper aux ruines de nos anciens modes de pensée.

Cet essai voudrait relier trois phénomènes que les commentateurs ont déjà repérés mais dont ils ne voient pas toujours le lien –; et par conséquent dont ils ne voient pas l'immense énergie politique qu'on pourrait tirer de leur rapprochement.
D'abord la " dérégulation " qui va donner au mot de " globalisation " un sens de plus en plus péjoratif ; ensuite, l'explosion de plus en plus vertigineuse des inégalités ; enfin, l'entreprise systématique pour nier l'existence de la mutation climatique.
L'hypothèse est qu'on ne comprend rien aux positions politiques depuis cinquante ans, si l'on ne donne pas une place centrale à la question du climat et à sa dénégation. Tout se passe en effet comme si une partie importante des classes dirigeantes était arrivée à la conclusion qu'il n'y aurait plus assez de place sur terre pour elles et pour le reste de ses habitants. C'est ce qui expliquerait l'explosion des inégalités, l'étendue des dérégulations, la critique de la mondialisation, et, surtout, le désir panique de revenir aux anciennes protections de l'État national.
Pour contrer une telle politique, il va falloir atterrir quelque part. D'où l'importance de savoir comment s'orienter. Et donc dessiner quelque chose comme une carte des positions imposées par ce nouveau paysage au sein duquel se redéfinissent non seulement les affects de la vie publique mais aussi ses enjeux.

De (auteur) : Bruno Latour

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Expérience de lecture

Avis des libraires

Tout se passe, dit Bruno Latour, comme si " une partie importante des classes dirigeantes (ce qu'on appelle aujourd'hui de façon trop vague les "élites") " s'était résolue à l'idée qu'il n'y a plus à chercher un " horizon commun " pour tous les hommes, encore moins à construire un monde commun, et avait somme toute renoncé à diriger, pour uniquement " se mettre à l'abri hors du monde ". D'où la désorientation générale. Pour savoir ce que signifie être entré " dans un Nouveau Régime climatique " – conditionnant tous les autres problèmes – Latour propose donc quelques cartes d'orientation, où pourraient être identifiées " certaines émotions politiques " nouvelles, d'autres affects, d'autres objets d'attention, et où d'autres enjeux pourraient être définis.
|Robert Maggiori
Libération
C'est un réquisitoire cinglant. Le dernier essai de Bruno Latour s'appelle " Où atterrir ? ". Et dès les premières pages, le philosophe s'interroge sur l'étrange passivité de l'humanité devant le réchauffement climatique. Pourquoi cette impuissance ? Comment comprendre qu'un président américain puisse tirer gloire de son refus de ratifier les accords la COP21 ?
Ce genre de questions suscitent en général des réponses vagues : la faute au conformisme, à l'incompétence, etc. Latour ne tombe pas dans le piège. Avec précision, il désigne des responsables. Au lieu de sauver ce bien commun qu'est la planète, explique-t-il, une partie des élites a décidé d'abandonner le reste de l'humanité et de garder pour elle ses privilèges. Il écrit en toutes lettres : " Ces gens-là ont compris que, s'ils voulaient survivre à leur aise, il ne fallait plus faire semblant, même en rêve, de partager la terre avec le reste du monde. "
C'est un " J'accuse... ! " à l'échelle de la biosphère.

|Eric Aeschimann
L'Obs
À ce propos, dans Où atterrir ? Bruno Latour s'intéresse à notre intelligence du déni, et même à notre science du déni.|Yann Diener
Charlie Hebdo
Face au réchauffement climatique, l'égoïsme des élites est sans limites, s'indigne le philosophe, qui appelle à renverser la vapeur. Objectif : repenser la Terre et mieux la partager.|Weronika Zarachowicz
Télérama
C'est un ouvrage à la fois important, surprenant et inquiétant que le livre de philosophe Bruno Latour, avec Où atterrir ? Comment s'orienter en politique.|Joseph Confavreux
Mediapart
Depuis vingt ans, Bruno Latour tente divers remèdes pour guérir notre cécité quant au changement climatique. Il use là d'une " politique-fiction " à l'humour féroce et aux accents réalistes [...].|Béatrice Bouniol
La Croix
Le sociologue revient sur la nécessité de rapprocher des phénomènes : le choix de la dérégulation comme méthode politique, la montée vertigineuse des inégalités et la dénégation de la mutation climatique, le tout aboutissant à la fin d'un monde commun, à la perte d'une orientation commune géopolitique, et à un schisme occidental, séparant les États-Unis trumpistes qui refusent de négocier leur mode de vie avec le reste de l'Europe, plus prompt à s'interroger sur la mise en place d'un destin " terrestre " commun. |Cynthia Fleury
L'Humanité

Avis Babelio

Olloix

4.00 sur 5 étoiles

• Il y a 3 ans

La question que m'amène cet essai à me poser est : les textes qui ont été structurants pour la vie politique de nombreuses populations, comme "L'esprit des lois" ou "Le capital" (que je n'ai pas lus) étaient-ils initialement théoriques, sans indications pratiques ? Ont-ils eu besoin de passer par des hommes ou femmes politiques intermédiaires pour être mis au service du peuple, avec plus ou moins de douceur, étant donné leur penchant révolutionnaire ? En lisant "Où atterrir", j'ai eu le sentiment d'accéder à un éclairage original et structurant, mais tellement loin des préoccupations du citoyen moyen que je suis, et tellement loin de la vision des hommes politiques et leaders économiques, que je ne vois pas comment cela peut-être traduit dans les faits. B.Latour indique lui-même qu'il n'a pas de solutions pratiques clefs en main. Intéressant, frustrant, à lire.

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jullius

3.00 sur 5 étoiles

• Il y a 4 ans

Quand c'est Latour (de contrôle ?) même qui demande « où atterrir ? », avouez qu'il y a de quoi s'inquiéter… Cela dit, Latour propose tout de même une solution : atterrir sur terre, enfin sur le terrestre. Au-delà de la blague, ce petit ouvrage du grand sociologue des sciences qu'est Latour mérite le détour. Mais m'inspire aussi quelques réticences. Si je trouve que le diagnostic est bon – avant tout celui de politique fiction qu'il formule au début sur la stratégie de rupture décomplexée des élites financières voire politiques qui les servent, mais aussi celui qui concerne la nécessité d'un redécoupage des clivages politiques – je suis (bien) moins convaincu par les propositions qu'il formule. Proposer de nommer le terrestre ce qui devrait être le nouveau local (pour éviter les dérives « nationalo-identitaires »), je le comprends, mais cela me semble un voeu pieux : je trouve quelque peu malhonnête le portrait que fait Latour sur les risques d'un « retour » en force du local (si tant est qu'il avait d'ailleurs disparu) et notamment son assimilation à une forme d'obscurantisme identitaire. Car le local ne se réaffirme pas que sous ce masque (même s'il existe et que, malheureusement, tout « localisme » a tendance à être réduit à cet forme d'exclusivisme et de fermeture aux autres – mais par qui ? précisément par des éditorialistes qui sont au service des élites « hors sol »), mais aussi sous celui, bien plus pertinent d'un désir de reconquête de la souveraineté que le global de la « mondialisation moins », comme il dit, a largement battu en brèche. Et sa conviction dans le fait que l'Europe est la bonne échelle d'une « mondialisation plus », débarrassée de ses illusions et seule à même de lutter contre le local et ses oripeaux nationalistes les plus abjects, me semble vraiment très simplificateur : non seulement l'Europe n'a pas commencé à exister après le second conflit mondial (pour garantir la paix) mais (à l'inverse) elle a « commencé » au moment de la Conférence de Berlin (1885) dans ce grand partage de l'Afrique entre gouvernants blancs et puissants : un projet rien moins que pacifiste, pour les Africains et même pour les peuples européens. Car cette Europe-là, rapidement en crise face aux désordres sociaux de la soi-disant Belle Époque, n'a pas hésité à envoyer ses peuples non plus au charbon mais sous les déluges d'acier pour faire taire les aspirations révolutionnaires. Croire que l'Europe est un projet pacifique me semble une parfaite foutaise. L'Europe n'a jamais été, ni de près ni de loin, un projet de rassemblement des peuples derrière un projet de paix universelle (affiche de propagande qui ne berne que ceux qui veulent y croire), mais est une stratégie de gestion des obstacles de l'impérialisme capitaliste de ses élites. Croire que l'« Europe » peut devenir autre chose, qu'elle puisse soudain se parer de bons sentiments (politiques et écologiques) et que les peuples y verront soudain la lumière tant attendue (eux qui ont été bernés depuis près de 150 ans sur le sujet – ce que Latour reconnaît d'ailleurs honnêtement, mais comment faire autrement…), c'est effectivement, comme il l'admet (mais sans doute avec un peu de fausse modestie puisque l'objet de son ouvrage est bien politique), être bien « fragile » comme analyste du politique (au sens moins de l'étude des rapports de pouvoirs – science politique à papa - que de celui de l'étude des liens sociaux – la politique au sens premier du terme, et une science politique, donc, qui se nourrit de toutes les sciences humaines). Finalement, qui a besoin d'atterrir ? Précisément ces élites qu'il identifie justement comme « hors-sol ». La plupart des individus, eux, ceux qui n'ont donc pas de pouvoir, réclament qu'on cesse de les obliger à décoller (pour le pays imaginaire du « libéralisme » où la dernière liberté qui leur reste est d'aller se faire exploiter par des multinationales dont l'universalisme n'est rien d'autre qu'un United Colors of Benetton - fait pour gagner du fric) : non pas par racisme (même s'il en est parmi ceux-là, il ne faudrait pas non plus être angélique) mais parce que sans « enracinement », comme disait Simone Weil, l'homme se perd… et avec lui, toute politique (être ensemble) digne de ce nom.

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Didjmix

3.50 sur 5 étoiles

• Il y a 4 ans

Voilà un essai (très ! trop ! ) Intelligent. Que de réflexions sur le monde contemporain. La Guerre froide, l'opposition Est-Ouest, ou même Nord-Sud, sont devenues plus insuffisantes on le voit. B. Latour nous propose une opposition Local-Global très intéressante (même si pas toujours facile à suivre). L'élection de Trump, époque de l'écriture de ces lignes, a mis l'accent sur le sujet d'opposition central : le climat. Il nous montre aussi a quel point l'élite se protège, se met à l'abri, de tout ce qu'elle est en train de détricoter. Ça fait froid dans le dos d'actualité.

Passemoilelivre

4.00 sur 5 étoiles

• Il y a 4 ans

L’humanité est désorientée, une mondialisation effrénée qui devient insoutenable et le sentiment de plus en plus partagé qu’il va falloir atterrir, retrouver « le terrestre », c’est ce que Bruno Latour nous explique dans cet essai. Les inégalités qui s’accroissent, les privilégiés qui profitent le plus longtemps possible d’un système qu’ils ont établi sans tenir compte des dégâts collatéraux (le climat, les migrations..), le mouvement écologiste, ballotté entre la droite et la gauche ne sait plus ou il habite ! L’auteur, philosophe n’est pas toujours facile à suivre, mais il fait malgré tout un effort de pédagogie qui devrait profiter au plus grand nombre, tellement les enjeux sont importants.

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Fiche technique du livre

  • Genres
    Sciences Humaines & Savoirs , Environnement
  • EAN
    9782707197009
  • Collection ou Série
    Petits cahiers libres
  • Format
    Grand format
  • Nombre de pages
    160
  • Dimensions
    190 x 128 mm

L'auteur

Bruno Latour

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