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Nouveauté
De notre monde emporté
Date de parution : 02/03/2023
Éditeurs :
Pocket
Nouveauté

De notre monde emporté

Date de parution : 02/03/2023
Indispensable hommage aux ouvriers oubliés, au monde industriel déchu et à la lutte pour des lendemains qui chantent...
À la Seyne-sur-Mer, on était « des Chantiers » comme on est d’un pays, d’une famille. Comme son père avant soi. Comme personne après eux. Combien d’hommes, en ces années 1970, ont connu... À la Seyne-sur-Mer, on était « des Chantiers » comme on est d’un pays, d’une famille. Comme son père avant soi. Comme personne après eux. Combien d’hommes, en ces années 1970, ont connu la Tôlerie, la Forge, la Machine ? Soudant ici, graissant là, suant dans la fournaise d’où sortaient ces géants des mers – fierté... À la Seyne-sur-Mer, on était « des Chantiers » comme on est d’un pays, d’une famille. Comme son père avant soi. Comme personne après eux. Combien d’hommes, en ces années 1970, ont connu la Tôlerie, la Forge, la Machine ? Soudant ici, graissant là, suant dans la fournaise d’où sortaient ces géants des mers – fierté du geste, triomphe de l’ouvrier.
Celui qu’on appelait « Narval » s’y construit : sa classe sociale, ses camarades, son identité politique. Lorsque la fermeture est annoncée, il entre en lutte, à la vie, à la mort. Bientôt le scandale éclate et emporte tout sur son passage…
Requiem pour une classe ouvrière déchue.
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EAN : 9782266328760
Code sériel : 18785
Façonnage normé : POCHE
Nombre de pages : 192
Format : 108 x 177 mm
EAN : 9782266328760
Code sériel : 18785
Façonnage normé : POCHE
Nombre de pages : 192
Format : 108 x 177 mm

Ils en parlent

« Le livre, avec ses phrases courtes et épurées, relate avec acuité le chagrin qui s'installe dans ces bastions ouvriers en déshérence. »
La Provence

Ce qu'en pensent nos lecteurs sur Babelio

  • Marti94 18/02/2023
    Christian Astolfi est un auteur qui mériterait d'être plus connu. Heureusement, je le découvre grâce à la sélection de son quatrième livre "De notre monde emporté" pour le Prix des lecteurs de ma bibliothèque. C'est un excellent choix car j'aime beaucoup ce roman social de la fin du 20ème siècle dans lequel on découvre le quotidien des ouvriers des chantiers navals de la Seyne-sur-Mer. François Lorenzi est le narrateur mais aux chantiers il est nommé Narval car ils ont tous des surnoms. On y découvre tous les corps de métiers avec Mangefer, Barbe, Filoche, Cochise et L'horloger. Le port avec la mer en point de mire, le bruit des tôles que l'on cogne et l'horizon barré par la ronde incessante des navires dans la darse est le théâtre de sa vie, son histoire familiale. Quand les chantiers navals ferment alors qu'ils ont été le regroupés avec ceux du Nord, la Normed suit le mouvement de désindustrialisation de la France après les charbonnages et la sidérurgie. Le désœuvrement est d'autant plus grand pour les ouvriers qui y travaillent que la gauche est au pouvoir. Malgré les luttes et la solidarité, les désillusions vont grandissantes dans les années 1980 à l'époque où les dangers de... Christian Astolfi est un auteur qui mériterait d'être plus connu. Heureusement, je le découvre grâce à la sélection de son quatrième livre "De notre monde emporté" pour le Prix des lecteurs de ma bibliothèque. C'est un excellent choix car j'aime beaucoup ce roman social de la fin du 20ème siècle dans lequel on découvre le quotidien des ouvriers des chantiers navals de la Seyne-sur-Mer. François Lorenzi est le narrateur mais aux chantiers il est nommé Narval car ils ont tous des surnoms. On y découvre tous les corps de métiers avec Mangefer, Barbe, Filoche, Cochise et L'horloger. Le port avec la mer en point de mire, le bruit des tôles que l'on cogne et l'horizon barré par la ronde incessante des navires dans la darse est le théâtre de sa vie, son histoire familiale. Quand les chantiers navals ferment alors qu'ils ont été le regroupés avec ceux du Nord, la Normed suit le mouvement de désindustrialisation de la France après les charbonnages et la sidérurgie. Le désœuvrement est d'autant plus grand pour les ouvriers qui y travaillent que la gauche est au pouvoir. Malgré les luttes et la solidarité, les désillusions vont grandissantes dans les années 1980 à l'époque où les dangers de l'amiante pèsent encore peu face à la mort sociale des ouvriers. Le scandale sera vite dénoncé avec de nombreux malades et les vies écourtées mais l'interdiction d'utiliser l'amiante ne sera votée qu'en 1997. Et ce n'est pas terminé… J'ai beaucoup aimé la construction en courts chapitres de ce livre où les allers-retours dans le temps ne perturbent pas le fil du récit. Avec son titre évocateur "De notre monde emporté" le ton est aussi nostalgique qu'il est combatif dans les romans sociaux de Gérard Mordillat. Mais comme lui, Christian Astolfi fait sortir les voix du monde ouvrier avec une justesse d'écriture remarquable en raison de son expérience. Challenge Riquiqui 2023 Challenge Multi-défis 2023
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  • Titine75 11/01/2023
    « Nul parmi nous n’esquisse le moindre mouvement de repli. Tous nous restons de marbre. Yeux secs. Lèvres muettes. Mains dans les poches ou sur l’anse des sacs à main. Rien de ce que nous ressentons ou pensons ne se voit ni s’ébruite. Nulle voix ne s’élève. Nul souffle ne s’échappe. Nous sommes là parce que nous attendons…Nous attendons l’arrêt de la chambre criminelle de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire de ce pays, sur le pourvoi que nous avons formé pour homicides et blessures volontaires dans le scandale sanitaire qui nous frappe. Le malheur qui a jeté sur nos vies depuis plus de vingt années un voile de malheur. Le scandale pour lequel nous réclamons à nouveau qu’on nous fasse réparation. Le scandale de l’amiante. » Le narrateur, Narval, fait le récit de ces vies sacrifiées, grignotées par l’amiante. Des vies d’ouvriers qui se sont déroulées sur les chantiers navals de la Seyne-sur-Mer où l’amitié permet de tenir le coup face à la dureté des tâches. Des ouvriers liés par les luttes : contre la fermeture des chantiers, contre l’amiante. « De notre monde emporté » est un roman juste et digne sur le monde ouvrier, à l’instar de « A la ligne » de... « Nul parmi nous n’esquisse le moindre mouvement de repli. Tous nous restons de marbre. Yeux secs. Lèvres muettes. Mains dans les poches ou sur l’anse des sacs à main. Rien de ce que nous ressentons ou pensons ne se voit ni s’ébruite. Nulle voix ne s’élève. Nul souffle ne s’échappe. Nous sommes là parce que nous attendons…Nous attendons l’arrêt de la chambre criminelle de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire de ce pays, sur le pourvoi que nous avons formé pour homicides et blessures volontaires dans le scandale sanitaire qui nous frappe. Le malheur qui a jeté sur nos vies depuis plus de vingt années un voile de malheur. Le scandale pour lequel nous réclamons à nouveau qu’on nous fasse réparation. Le scandale de l’amiante. » Le narrateur, Narval, fait le récit de ces vies sacrifiées, grignotées par l’amiante. Des vies d’ouvriers qui se sont déroulées sur les chantiers navals de la Seyne-sur-Mer où l’amitié permet de tenir le coup face à la dureté des tâches. Des ouvriers liés par les luttes : contre la fermeture des chantiers, contre l’amiante. « De notre monde emporté » est un roman juste et digne sur le monde ouvrier, à l’instar de « A la ligne » de Joseph Ponthus. Christian Astolfi nous raconte le délitement d’un monde, l’effondrement du centre économique de la Seyne-sur-Mer. Ce que montre parfaitement l’auteur, c’est la fierté des ouvriers, leur dignité et le fort sentiment d’appartenance à une communauté, à un lieu. Ce n’est pas seulement leur travail que Narval et ses camarades perdent à la fermeture des chantiers navals, c’est également une précieuse fraternité. Christian Astolfi inscrit son roman dans l’histoire politique de la France des années 70-80. La gauche arrive au pouvoir et fait naitre un immense espoir notamment dans la classe ouvrière. « De notre monde emporté » est également le récit d’une déception face aux promesses non tenues de la gauche, les enfants des soixante-huitards sont à leur tour floués. Le chagrin, mais aussi la nostalgie des années de chantier, innervent le récit de Narval qui voit sa vie et celles de ses camarades se disloquer. La solitude prend la place de la communauté, les souvenirs prennent celle d’un possible avenir. « De notre monde emporté » est un roman poignant, sans esbrouffe sur la disparition du monde ouvrier, sur la désillusion et le désenchantement. Mais l’écriture, celle de Christian Astolfi et celle de Narval, permet de faire revivre les amitiés, les solidarités perdues.
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  • Zephirine 30/12/2022
    Les chantiers navals de la Seyne sur Mer qui font vivre toute une ville, comptent parmi les fleurons industriels du pays. Embauché comme graisseur, le narrateur va rejoindre toute une lignée d'ouvriers qui oeuvrent dans les entrailles de » La Machine » « À l'image de mes camarades, chaque fois qu'on me posera la question, je ne dirai jamais que je travaille aux Chantiers, mais que j'en suis. Comme on est d'un pays, d'une région, avec sa frontière. » En pénétrant cet univers d'acier, de graisse et de bruits, on troque son nom contre un surnom. Il y a l'Horloger, Cochise, Mangefer, Filoche, Barbe et pour le petit nouveau ce sera Narval. Le récit de Narval nous plonge au coeur même de cette vie ouvrière avec ses codes. Mais, si le travail est pénible, on est fier de bien l'accomplir. La ville respire au même rythme que les chantiers, on fait la fête sur les quais, et, lors des défilés du 1e mai, on sait lever le poing. Aussi, l'espoir est grand lorsque Mitterrand est élu en mai 1981. Les désillusions viendront très vite. Déboussolé par l'arrêt des chantiers après le dépôt de bilan, Narval traine son mal de vivre et... Les chantiers navals de la Seyne sur Mer qui font vivre toute une ville, comptent parmi les fleurons industriels du pays. Embauché comme graisseur, le narrateur va rejoindre toute une lignée d'ouvriers qui oeuvrent dans les entrailles de » La Machine » « À l'image de mes camarades, chaque fois qu'on me posera la question, je ne dirai jamais que je travaille aux Chantiers, mais que j'en suis. Comme on est d'un pays, d'une région, avec sa frontière. » En pénétrant cet univers d'acier, de graisse et de bruits, on troque son nom contre un surnom. Il y a l'Horloger, Cochise, Mangefer, Filoche, Barbe et pour le petit nouveau ce sera Narval. Le récit de Narval nous plonge au coeur même de cette vie ouvrière avec ses codes. Mais, si le travail est pénible, on est fier de bien l'accomplir. La ville respire au même rythme que les chantiers, on fait la fête sur les quais, et, lors des défilés du 1e mai, on sait lever le poing. Aussi, l'espoir est grand lorsque Mitterrand est élu en mai 1981. Les désillusions viendront très vite. Déboussolé par l'arrêt des chantiers après le dépôt de bilan, Narval traine son mal de vivre et s'éloigne peu à peu de Louise sa compagne. A cette difficulté viendra se rajouter, sept ans après l'arrêt des chantiers, le scandale de l'amiante. Ces fibres, respirées tous les jours pendant des années de labeur, font leur travail de sape dans les poumons des anciens ouvriers. « Des substances, dans la Machine, il y en avait à la pelle. Elles flottaient devant nos narines, suintaient sur les parquets, graissaient les blocs-moteur, vaselinaient les collecteurs, les gaines et les câbles. » Avant d'être écrivain, Christian Astolfi a débuté sa vie professionnelle aux chantiers navals et, s'inspirant de son vécu, il nous immerge dans cette vie ouvrière agitée par les luttes sociales et minée par le scandale de la crise sanitaire de l'amiante. Après les années glorieuses viennent celles du dégoût, de la tristesse et des morts. L'auteur évoque aussi les familles, il esquisse quelques portraits touchants comme celui du disquaire mélomane. La solidarité du monde ouvrier est bien rendue ainsi que cette camaraderie pudique et sans concessions. Les pages que le narrateur consacre à son père dont il est fier sont touchantes de vérité. « Tout-à-coup, une phrase que mon père vient de prononcer me sort de ma rêverie. La dignité, c'est la seule chose qu'on ne doit jamais leur céder. » Évitant l'écueil d'un lyrisme débridé, l'écriture sobre est vibrante de sincérité et de véracité. L'émotion est palpable et on sort un peu sonné de ce roman puissant. Pour mou, la découverte d'un auteur et un coup de coeur.
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  • MAPATOU 22/11/2022
    Les Chantiers Navals de La Seyne/Mer étaient une véritable institution pour cette petite ville dont le port fait face à la rade de Toulon. Nombreux étaient les fils qui y été embauchés comme leurs pères avant eux. C’est le cas du narrateur de ce roman, Narval. Il nous raconte les années fastes où le travail ne manquait pas pour tous les corps de métiers, les journées passées dans le ventre des bateaux, la camaraderie parmi les ouvriers, le sentiment d’appartenir à un groupe, Sans oublier la liesse au moment de l’élection de François Mitterrand en 1981, les espoirs placés dans le programme commun signé avec le Parti Communiste. Puis vient le désenchantement deux ans plus tard avec la diminution des commandes, la raréfaction des bateaux à quai et la rumeur de la possible fermeture des Chantiers. Les ouvriers décident alors d’engager la lutte pour sauver les Chantiers qui sont le poumon économique de La Seyne/Mer : » Le mot d’ordre initial de tenir autant de temps qu’il le faudrait, comme on tient un siège, se perdait dans le bruit et la fureur. Nous ne suivions plus que notre instinct grégaire. Un jour nous improvisions des meetings avec les habitants des villes avoisinantes. Le lendemain, nous... Les Chantiers Navals de La Seyne/Mer étaient une véritable institution pour cette petite ville dont le port fait face à la rade de Toulon. Nombreux étaient les fils qui y été embauchés comme leurs pères avant eux. C’est le cas du narrateur de ce roman, Narval. Il nous raconte les années fastes où le travail ne manquait pas pour tous les corps de métiers, les journées passées dans le ventre des bateaux, la camaraderie parmi les ouvriers, le sentiment d’appartenir à un groupe, Sans oublier la liesse au moment de l’élection de François Mitterrand en 1981, les espoirs placés dans le programme commun signé avec le Parti Communiste. Puis vient le désenchantement deux ans plus tard avec la diminution des commandes, la raréfaction des bateaux à quai et la rumeur de la possible fermeture des Chantiers. Les ouvriers décident alors d’engager la lutte pour sauver les Chantiers qui sont le poumon économique de La Seyne/Mer : » Le mot d’ordre initial de tenir autant de temps qu’il le faudrait, comme on tient un siège, se perdait dans le bruit et la fureur. Nous ne suivions plus que notre instinct grégaire. Un jour nous improvisions des meetings avec les habitants des villes avoisinantes. Le lendemain, nous défilions en masse dans les rues, nos slogans en porte-voix. Le surlendemain, nous investissions les sous-préfectures, foulards relevés sur nos visages, à la façon d’apaches défendant un territoire. Puis nous reprenions le cycle de blocage des routes, celui des voies ferrées, et de l’affrontement avec les forces de l’ordre. (…) Tout cela était dans le droit-fil de cette pièce à laquelle nous rajoutions notre propre scène. La plus spectaculaire sans doute. Celle de l’expression incontrôlée de notre colère. Car c’était bien de cela qu’il s’agissait : nous liquidions notre colère. Pendant ce temps, en coulisse, eux liquidaient les Chantiers. » Après le traumatisme de cette fermeture qui a laissé nombre de familles sur le carreau, des ouvriers en dépression dont ils mettront pour certains des années à sortir, une ville qui mettra des décennies à sortir du marasme économique, un scandale va éclater : celui de l’amiante à laquelle des centaines d’ouvriers ont été exposés pendant des années sans aucune protection. Christian Astolfi raconte de façon touchante et poignante parfois les vies de ces ouvriers, leurs combats, la façon dont ils ont été exploités. On ne peut s’empêcher à la lecture de ce roman de penser à « Germinal » de Zola. » De notre monde emporté » m’a permis de mieux comprendre ce moment de l’histoire de la région toulonnaise qui a été un énorme traumatisme pour les Seynois.
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  • EvlyneLeraut 21/11/2022
    « De notre monde emporté » livre socle, l'exemplarité et la rectitude. Il suffit de lire les premières pages pour comprendre l'heure cruciale. Être d'emblée en transmutation aux Chantiers navals de la Seyne-sur-Mer. L'écriture cède la place au vaste de ce récit éperdument sociétal et engagé. La douceur du ton est un arrêt sur le mot et son symbole. Figer ce qui fût de ces hommes aguerris à l'effort, à la beauté même du travail bien fait, la glorification du travail. Sueur perlée sur le front, mains gercées, les heures longues d'un travail opératif. Le narrateur est un jeune homme surnommé Narval par ses pairs, passeur des existences blessées et meurtries dans leur chair. Son père avant lui, ses collègues et amis, les Chantiers navals, le pictural du monde ouvrier. Bataille rangée dans l'action même, « je ne dirai jamais que je travaille aux Chantiers, mais que j'en suis. Comme on dit d'un pays, d'une région, avec sa frontière. » Des centaines d'hommes, fourmis en file indienne, vaillants et tenaces, régler, démonter, polir, subir, se serrer les coudes, la concorde et la connivence pour alliées. Un navire, des milliers d'heures de travail, sans même savoir le risque, l'amiante à cris et à flots, à mains et... « De notre monde emporté » livre socle, l'exemplarité et la rectitude. Il suffit de lire les premières pages pour comprendre l'heure cruciale. Être d'emblée en transmutation aux Chantiers navals de la Seyne-sur-Mer. L'écriture cède la place au vaste de ce récit éperdument sociétal et engagé. La douceur du ton est un arrêt sur le mot et son symbole. Figer ce qui fût de ces hommes aguerris à l'effort, à la beauté même du travail bien fait, la glorification du travail. Sueur perlée sur le front, mains gercées, les heures longues d'un travail opératif. Le narrateur est un jeune homme surnommé Narval par ses pairs, passeur des existences blessées et meurtries dans leur chair. Son père avant lui, ses collègues et amis, les Chantiers navals, le pictural du monde ouvrier. Bataille rangée dans l'action même, « je ne dirai jamais que je travaille aux Chantiers, mais que j'en suis. Comme on dit d'un pays, d'une région, avec sa frontière. » Des centaines d'hommes, fourmis en file indienne, vaillants et tenaces, régler, démonter, polir, subir, se serrer les coudes, la concorde et la connivence pour alliées. Un navire, des milliers d'heures de travail, sans même savoir le risque, l'amiante à cris et à flots, à mains et à souffles. Poumons pris en otage, ils ne devinent pas, pas encore, le flux de ce poison lent. Puisque le temps est à la grève, à la reconversion, au lâcher-prise, au vaisseau fantôme. Les Chantiers navals agonisent. « Comment imaginer à cet instant que tout cela , un jour, puisse disparaître. » Narval pressent sa vie basculer. Les aiguilles s'affolent. Tout change, Louise, sa compagne, le quitte. Ce serait s'affranchir, couper le cordon qui le retient encore un peu, dans cette ville où son coeur bat en diapason de celui de ses collègues et amis. Le récit est olympien, calme, maîtrisé, malgré les turbulences de ce qui va advenir subrepticement. On ressent Narval attentif aux siens, à l'image de son père, mort car malade d'un trop plein de travail et d'amiante. « Je gardais les Chantiers en point de mire… Je me demande juste si après tant d'années passées aux Chantiers, on vaut quelque chose dehors. Je veux dire sur le marché du travail. » Questionnements, l'impression d'un gâchis immense. Il est un symbole, « il n'y avait de notre part aucun défi, seulement le besoin d'ajuster le geste au métier. » un double drame qui a pris son temps pour abattre ses victimes : la fibre. « La fibre s'élevait et retombait en pluie fine sur leurs vêtements, saupoudrait leurs mains nues, pailletant leurs chevelures. On tournait autour du mal sans le savoir. » Asbestose. Tous, vont être malades, voire mourir à petits feux. le tourbillon, trou noir, d'aucuns sont ici au tribunal emblématique. Entendre les responsables, craquer ses doigts, serrer les poings, larmes sur les bateaux invisibles. Veuves à milliers, fils et pères en fauteuil roulant, l'amiante, « l'héritage empoisonné ». « Ce soir-là, j'ai écrit sur mon carnet. Il n'y aura pas de reconnaissance définitive de notre condition tant que notre parole ne sera pas jetée à la face de ce scandale. » Christian Astolfi est un passeur, un lanceur d'alerte, car l'heure est toujours pavlovienne. Un homme-écrivain qui rend hommage à ses frères des Chantiers. Il pointe du doigt là où ça fait mal. Il dévoile une période qui s'étire en vie entière, celle du monde ouvrier et de ses plus grands malheurs. La Cause du siècle. Sociologique, la fraternité révélée, les souffrances et les lâchetés des puissants, tout ici est mémoire et urgence sociétale. Ce serait à l'instar du Rocher de Sisyphe, mais voilà Christian Astolfi prend parole et acte le combat de « Notre monde emporté ». Livre d'utilité publique, pétri d'humanité. Une chronique sociale, politique, sans colère froide. Juste dire les faits et bousculer les diktats qui perturbent le café du matin avant de franchir les Chantiers navals de la Seyne-sur-Mer. Un hymne au monde d'en bas, alors que c'est celui d'en haut pour ceux qui savent. Ce récit est un livre blanc résolument bâti. Un hommage bouleversant car humble. Publié par les majeures Éditions le bruit du monde.
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