Dieu est un voleur qui marche dans la nuit : Le livre de Quentin Bruet-Ferréol

C’est le visage de Marshall Applegate, présent sur le bandeau entourant la couverture, qui a attiré mon attention quand je suis passée devant ce livre. Et puis le titre, on ne peut plus énigmatique. Passant une large partie de mon temps libre à regarder des reportages et écouter des podcasts sur les affaire criminelles, les histoires paranormales et d’ovnis en tous genres, j’étais déjà bien au fait de la tragédie qui a conclu l’histoire de la secte Heaven’s gate (à ce sujet, je vous conseille la très bonne série YouTube produite par la chaîne Dissecte, à laquelle l’auteur de ce livre participe d’ailleurs). J’ai cependant beaucoup appris de la lecture de cet ouvrage, qui se positionne du point de vue d’un adepte imaginaire, et offre donc un récit au plus près du trajet de Do et Ti et de leurs adeptes, des années 1970 à leur décès en 1997. Barthélemy, perdu depuis le départ dans la quête du sens à donner à sa vie, passe de la première à la dernière page par tous les stades de l’emprise sectaire, de la dévotion des débuts aux doutes puis au rejet de la philosophie de des ses anciens maîtres à penser. Cette construction du protagoniste principal permet à l’auteur d’englober l’ensemble des aspects de la l’œuvre de Marshall Applegate et Bonnie Nettles, la construction de leur philosophie, les contradictions qui les animaient, puis leur fuite en avant, de plus en plus rapide à mesure qu’ils voyaient les espérances de leurs adeptes déçues. Je n’ai cependant pas eu de franc attachement à Barthélémy et ceux qui gravitent autour de lui. C’est ici selon moi que le bât blesse dans ce livre. À trop avoir voulu enquêter sur Heaven’s gate, à trop désirer retranscrire les événements qui ont conduit aux suicides de 1997, l’auteur conserve tout du long une écriture très blanche, presque clinique. On comprend ce que ses personnages ressentent et vivent, on ne le sent pas. À la fin des 400 pages, je me dis donc que j’aurais sans doute préféré lire une vraie enquête journalistiques, qui aurait pu être davantage fouillée.

Si je connaissais la conclusion tragique de la secte heaven's gate, jétais très loin d'en connaître l'histoire qui s'est déroulée sur plusieurs décennies. C'est tout simplement stupéfiant, tragique mais aussi touchant et burlesque à la fois. L'auteur a choisi de nous livrer cette histoire sous forme de roman, mais ne vous y trompez pas, c'est un travail énorme de recherche qui s'étale sur sept ans. Je ne peux que vous conseiller ce roman que j'ai dévoré.

Entre roman et documentaire, l'auteur nous invite à un voyage initiatique au cœur d'un mouvement sectaire : Heaven's Gate, en suivant adeptes et gourous depuis les prémices du groupe jusqu’au suicide collectif. Si le fait divers est connu, nous manquions de ressources en français sur ce mouvement. Lacunes que comble admirablement le livre, hyper-documenté. Mais on le lit d'abord comme un roman aux côtés des personnages particulièrement riches et fouillés dont les péripéties, à la fois absurdes et poignantes, nous entrainent vers le tragique.