En terre étrangère - NE 2013 : Le livre de Robert A. Heinlein

Roman de science-fiction écrit au début des années 60, devenu best-seller et icône de la contre-culture, voilà une chose fort intéressante ! Mais cette œuvre n'a-t-elle pas trop vieilli ? L'auteur nous invite à un glissement progressif (du plaisir) vers une ambiance que ne renierait aucun hippie, et je sais qu'il en reste certains à poils sur les plages de Crète. Car s'il commence de manière presque classique comme un bon roman de SF, il tourne, au gré des différentes parties, à la communauté sixties. Mais attention, des hippies très intelligents, philosophes et sous la houlette d'un vrai gentil gourou. Comment en est-on arrivé là ? Un jeune homme, enfant supposé d'un couple de terriens morts sur Mars, est considéré comme "martien" par la terre. Le lecteur découvre qu'il est porteur de toute la culture et les croyances, ainsi que les compétences des martiens. Il a de nombreuses aptitudes, dont certaines particulièrement extraordinaires, comme par exemple le fait d'embrasser de manière parfaite, en étant tout entier consacré à son acte ! Mais il y a mieux… Son intégration au sein de la population terrestre ne sera pas simple, il a trouvé des soutiens et il dispose d'une bonne équipe autour de lui pour l'extraire des griffes d'un état dictatorial mais assez facilement manipulable (qu'on pourrait supposer nazi, en raison de la présence de S.S.) Le plus intéressant est ce décalage d'appréhension du tangible et du monde entre les humains et les martiens. Parmi les magnifiques trouvailles, le langage martien ainsi que le cycle de la vie sur Mars, totalement différents et quasiment incompréhensibles aux pauvres humains non-initiés. Cela ouvre sur une vision libertaire et décalée de la vie. Ce roman est composé à 80-90% de dialogues, qui lui confèrent un rythme et une fraicheur étonnants. Les personnalités se détachent par conséquent plus nettement, puisqu'elles expriment leurs pensées à voix haute. Les tabous se brisent, les religions sont amochées, l'idée même de Dieu vole en éclat pour un recentrage puissant vers l'enseignement de Jésus - le premier hippie - ou du Bouddha. On s'éloigne au final de la science-fiction pure, puisqu'on utilise une vision translatée pour la remise en cause de notre société (sans oublier l'Etat, la presse, le mode de vie individualiste, l'amour et l'acte charnel pris dans un carcan) au profit de la communauté parfaite, de l'amour parfait et de la communion idéale. Aucune prise de tête, tout nous mène à une saine réflexion et un grand plaisir. A noter que j'ai lu la version allégée, non subversive (je suppose expurgée de scènes de sexe crues, heureusement qu'il en reste un peu !) Un monument qui ouvre les chakras et qui a moins vieilli que beaucoup d'œuvres de cette époque.

Un roman qui commence bien, on s'attend à une rencontre cool entre deux civilisations. Dommage, le livre ralentit (histoire raconté en temps réel) et l'histoire perd de son intérêt à partir de la moitié du bouquin (l'ennui m'a pris, à cause de sujets inintéressants évoqués dans le déroulement).

Voici un classique de la SF .Un roman de Henlein publié en 1962. le texte est bien écrit et les personnages sont solides et porteurs d'une très riche symbolique. Alors Henlein conservateur réac ? : Pas vraiment … Ce roman assez long raconte l'histoire d'un jeune homme qui suite à un accident a dû vivre et grandir sur mars où il fut élevé par des martiens. Les martiens sont des êtres non humains hautement développés en civilisation et au plan culturel. Ils sont très abstraits dans les pages de ce texte et ils ne sont pas directement le sujet. ils sont néanmoins une idée et ils structurent l'identité profonde du jeune homme qui est fort désorienté par un choc culturel intense. Il y a comme un échos autour de ces pages car l'expérience que vivent les personnages principaux est intense et rendue de manière très intimiste. Ce roman est beaucoup une idée car la planète mars est supposée habitable avec cependant des contraintes particulières inhérentes principalement à sa masse. Ce n'est pas un roman de hard science que ce roman et non plus un espace opéra vieillot. Mars est un environnement sommaire. C'est un environnement culturel et physique radicalement différent de celui de la terre où le destin a ramené cet adolescent intelligent et inquiet. De fait ,c'est une coupe très détaillée de la société états-unienne de l'époque avec laquelle le jeune doit interagir. Avec cette relecture, j'ai été étonné de la profondeur de l'analyse sociale qui scénarise dans ce roman la société américaine de l'époque avec tellement de finesse et beaucoup de nuances. Des bornes témoins sont posées par l'auteur et elles expliquent encore complétement la tectonique générale des interactions des milieux socio-culturels variés de l'Amérique très contemporaine. Les séismes qui parcourent encore cycliquement l'univers social et politique des Etats-Unis dans l'hier de ce texte sont donc encore de nos jours incroyablement opératoires et pertinents malgré le temps qui a passé .Ce gap évolutif est évidement perceptible pendant la lecture mais il n'inscrit pas cette œuvre dans un cadre vieillot. Mars est donc dans un environnement culturel et physique radicalement différent de celui de la terre où le destin a ramené le principal personnage du roman qui est un individu mais aussi une question. Sur terre , il atterrit d'abord dans un hôpital pour une réadaptation à la gravité terrestre et il est cerné par les médias comme par les politiques , comme par les citoyens lambda. Il n'est pas bien physiquement et moralement. Il ne comprend rien. Sa réadaptation et sa lecture de son environnement nouveau sont très intimistes. Cette réadaptation est aussi physiologique car nécessairement son corps est autant affecté que son mental par le changement de monde et c'est là d'ailleurs que l'univers de science-fiction est solide. C'est un récit de SF incontestablement , mais le lecteur doit savoir que le sujet est intégralement l'analyse d'un choc culturel et aussi l'analyse de la société d'accueil : les Etats-Unis. Ce n'est pas par exemple , un roman que je classerais comme futuriste par exemple et trop d'attentes à ce niveau serraient nécessairement déçues. L'auteur décortique avec sagacité : le télé évangélisme , le pentecôtisme , l'argent comme idole , le cynisme et les manigances structurelles et nécessaires des politiques et des médias .Le texte s'intéresse aussi à des individus obnubilés par la satisfaction égoïste de leurs aspirations individuelles. La vision de l'auteur est nuancée car il mout du grain allègrement mais avec recul sur les comportements d'un vaste panels de contextes sociaux variés. Un roman contestataire ? oui ! le fait qu'il fut un des bréviaires du mouvement hippie répond implicitement à cette question. Un auteur qui donc n'a définitivement rien de réactionnaire malgré Starship Troopers ou Etoiles garde à vous ! qui est un bijoux intemporel.

2021 J’ai relu ce roman de 1961 qui eut son heure de gloire dans les années « flower power » . L’argument de base est le retour sur terre d’un enfant des premiers colons de Mars éduqué dans la très exotique culture autochtone et nanti par elle de non moins étranges pouvoirs, de plus il est l’héritier d’une colossale fortune. Le thème du « regard éloigné » porté par un étranger sur notre culture fut l’un des favoris du siècle des Lumières (plus que Candide ou au Persan de Montesquieu, c’est au Micromégas de Voltaire qu’il fait penser ) . La première partie du roman est jubilatoire , « l’homme de Mars » semant un joyeux foutoir dans les lois , les croyances et les mœurs américaines, avec la complicité d’un « gang » d’hédonistes anarchistes menés par Jubal Harshaw . Mais lorsque le néo-terrien se mue en prophète et se lance jusqu’au martyre dans la création d’une secte , le récit se fait poussif , alourdi de longs discours érotico-théologiques (je n'ai pas « gnoqué » ). Au total , sans être un chef d’œuvre , c’est un texte assez amusant avec son dézingage des télé-évangélistes , son président américain dominé par sa femme manipulée par son astrologue et son culte où « aimez-vous les uns les autres » est mis en œuvre au sens littéral.