Homo sapienne : Le livre de Niviaq Korneliussen

Des histoires de femmes qui découvrent qu'elles aiment des femmes. C'est groenlandais avec de l'alcool et de la colère mais aussi parfois avec de l'espoir et de l'amour. L'écriture est totalement immersive. On ne peut qu'avoir de l'empathie. Ca sent trop le vécu.

Roman choral d'une jeune autrice Groenlandaise qui m'a surprise par son langage sans détours, son style brut et percutant. C'est vraiment intéressant de lire une tranche de vie de personnes LGBTQAI+ venant du Groenland, car il est ici question d'identité de genre, de sexualité, de désir, du regard de la société, d'assumer qui on est, et pas des vastes étendues enneigées, de froid polaire ou d'écologie. Les cinq personnages sont suivis avec leurs points de vue, et leurs histoires s'entremêlent toutes. Fia, qui, lasse d'entretenir des relations avec des hommes va se remettre en question pour se découvrir non sans incrédulité qu'elle est attirée par les femmes, jusqu'à tomber amoureuse de l'une d'elles. Inuk, cet homme obligé de fuir le Groenland suite aux révélations qui ont fuité dans la presse concernant un personnage public important et lui même, révélant au passage son homosexualité avec laquelle il semble encore peu à l'aise. Arnaq, qui brûle la vie par les deux bouts, cette victime d'inceste qui porte en elle les dégâts causés par son propre père, qui a une sexualité très ouverte, aimant hommes et femmes, mais qui peine à trouver de la stabilité dans sa vie. Ivik/Ivinnguaq, cette "femme" qui a toujours sentit que quelque chose "n'allait pas" dans son propre corps, sans pouvoir mettre un mot dessus depuis des années, et qui va enfin le découvrir grace à sa petite amie un brin impatiente. Sara enfin, cette jeune femme qui assume pleinement son lesbianisme tout en n'étant pas vraiment heureuse avec sa partenaire, cette dernière étant mal dans sa peau, et qui va ressentir un amour immense et imprévu pour sa petite nièce dès l'instant où elle l'aura dans ses bras... Leurs questionnements sont criants de vérité, sans détours, bruts de décoffrage, tout comme leurs pensées. J'ai adoré le style déconcertant de l'autrice, surtout pour le point de vue de Fia. Il y avait vraiment plein de choses à dire sur le sujet, tout ça aurait pu être beaucoup plus approfondi ; je ne sais pas si c'est dû au jeune âge de l'autrice au moment de l'écriture mais j'ai eu un goût d'inachevé ; cela dit, le fait que le roman fasse moins de 200 pages le rend encore plus percutant dans l'urgence de sa délivrance, de son message. Le tout n'est donc pas révolutionnaire en soi, mais cela peut être un bon début si les questionnements LGBTQAI+ vous intéressent : cela reste tout de même "osé" quand on sait d'où l'autrice vient. Dire qu'il a cartonné dans son pays, ce n'est pas rien ! Bravo à cette autrice très prometteuse.

Une découverte et un premier roman pour l'auteure groenlandaise, une lecture atypique, originale, acide et incisive. Je l'ai beaucoup apprécié pour ce qui est décrit sur la conditions féminines, les relations amoureuses des jeunes groenlandaises et groenlandais et leur soif de liberté. Ici l'environnement glacial n'est pas dans le paysage mais bien dans le cœur de certains, cinq jeunes vont se livrer à nous. Cinq histoires humaines percutantes qui nous sont données par la voix de ces jeunes en manque de reconnaissance quant à leurs recherches d'identités. Un récit jeune, dynamique, sans fioriture. Les écrits sont mêlés habilement tantôt en anglais, en danois, en conversations par smartphone et hashtag, ce qui en fait son originalité et une première pour de la littérature groenlandaise. Un roman coup de poing, authentique, on aime beaucoup ou pas du tout, j'ai adoré. Un récit qui nous sort du contexte habituel des livres du grand Nord, une autrice qui je l'espère percera dans ce domaine au niveau des jeunes mais aussi des adultes qui restent ancrés dans un passé sans vie. À lire absolument !

" Cette œuvre n'est pas écrite pour plaire aux touristes" c'est ainsi que la préface de Homo Sapienne annonce le roman. Littérature du Groenland, cette petite histoire de 180 pages ne parles pas du froid, de la glace ou de l'image qu'on se fait des inuits non plus. Homo sapienne est un roman chorale moderne avec un style unique, qui parle de l'amour, de la sexualité, de la liberté et de l'identité. C'est un petit livre étonnant, très intéressant à la fois d'un point de vue culturel, mais aussi sur la question de l'homosexualité. C'est un livre assez intime qui se passe de descriptions et de détails et qui saisit des émotions et des instants. Personnellement le style m'a un peu mise en difficulté et, à part le point de vue de Ivik, j'ai eu des difficultés à m'attacher aux personnages. J'ai trouvé la narration un peu insaisissable et parfois décousue, mais ça donne un ton très intéressant au texte. Un roman particulier, qui a une identité propre même s'il ne m'a pas transporté.