L'Embaumeuse : Le livre de Juliette Cuisinier-Raynal

Paie ta chronique. Déjà, on ne va pas se mentir, l'illustration d'Augustin Manaranche pour la couverture est absolument magnifique, c'est la 1e chose pour laquelle j'ai pris le bouquin en main. "Ok, mais Meuf c'est quand même un cercueil dessus!?" Oui, je sais, mais comme vous le savez, ce sujet m'intéresse +++ : la mort, celleux qui travaillent avec les morts, celleux qui font le lien entre vivants et morts, les vivants qui restent... Toussa, vous le savez, c'est ma tasse de thé. "Bien les accompagner [les morts], c'est prendre soin d'eux. Mieux les quitter, c'est prendre soin de soi. [...] Nous sommes tous les futurs morts encore en vie. [...] En cela nous avons le devoir collectif de repenser le monde de demain en y incluant nos défunts." D'entrée de jeu, ça me touche au cœur. L'autrice est thanatopractrice. Avec ce court récit elle retrace ses expériences les plus marquantes ainsi que ses réflexions sur le sujet. Construit comme un journal de bord qui suit les saisons, on constate la même chose que dans d'autres livres sur le sujet de la mort, qu'ils soient écrits par des journalistes, des légistes, des thanatopracteurices, des écrivain.e.s ou autres, tous font le même constat accablant : on traite nos défunts par dessus la jambe. C'est un business juteux pour le secteur privé, l'état se désinvestit de la fin de vie et de la mort, et la société contemporaine occidentale n'a plus de rituels pour accompagner à ce moment charnière, que ce soit les vivants ou les morts. Ce témoignage vient s'ajouter aux autres en ce sens. Il est doux, sans trop de concessions vis à vis de cas difficiles, avec un brin d'humour mais jamais au détriment des morts. Je regrette simplement que parfois l'autrice n'aille pas plus loin dans ses (re) sentiments, dans sa gestion de la quotidienneté quand la journée est terminée. Mais en même temps, peut-être est-ce simplement de la pudeur de sa part et de la curiosité mal placée de la mienne. J'assume. À lire, assurément.

Même si cela peut paraître extrêmement déroutant de dire cela d'un récit autobiographique portant sur la thanatopraxie, j'ai trouvé cette lecture très rafraîchissante. Juliette Cuisinier-Raynal n'y mâche pas ses mots et n'hésite pas à dénoncer le business établi autour de la mort. Son récit est également très tendre et transmet à merveille tout l'amour qu'elle a apporté à ses défunts et au travail bien fait. Il est également une mine d'informations pour les novices comme moi qui ne savaient pas faire la différence entre une toilette mortuaire et un soin. Ici la part belle est faite à la délicatesse et à aucun cas vous n'y croiserez du sensationnalisme ou du voyeurisme. Un premier ouvrage tout en finesse qui laisse présager le meilleur pour la suite

Roman très facile à lire avec des histoires de 1-2 pages par défunt, on découvre que les enjeux financiers sont partout y compris devant le cercueil. Je suis un peu restée sur ma faim, j'aurais aimé en savoir plus sur le milieu et creuser les raisons qui l'ont amenée à changer de voie professionnelle au bout d'un an

Juliette est depuis toujours passionnée par l' Égypte antique et les rites funéraires en particulier. En parallèle, son sens de l'esthétisme l'a conduite à mener une carrière de créatrice de bijoux. C'est autour de la quarantaine, lorsqu'elle prend le temps de se poser sur ses choix professionnels qu'elle décide de transposer son sens du beau dans le métier singulier de thanatopractrice, où elle redonne dignité aux défunts. "Embaumer, c'est mettre du baume sur le cœur des vivants endeuillés en prenant soin de leurs morts " Cette expérience durera un an. L'autrice explore alors la fragilité de la vie, se confronte aux chagrins, aux secrets enfouis, à des morts plus ou moins abîmés, à des situations parfois cocasses, parfois tragiques, parfois comiques... À travers des anecdotes touchantes et des réflexions intimes, elle nous livre le récit de ces soins apportés avec un profond respect pour l'être désormais sans vie. Elle s'attache à redonner dignité avec une profonde humanité. Un récit sans fard, sans artifice sur le métier singulier de thanatopracteur, méconnu, mystérieux, souvent tabou. Juliette Cuisinier-Raynal nous offre un regard emprunt d'une poésie incomparable sur ces étapes douloureuses. Elle dénonce aussi les abus mercantiles du commerce funéraire, choquée à juste titre par des pratiques parfois peu honorables. Un hommage touchant, tendre et lumineux sur ces étapes à franchir.