Love after love : Le livre de Ingrid Persaud

A Trinidad, Betty, veuve d'un mari violent qui la battait, élève seule son petit garçon Solo. Pour arrondir les fins de mois, elle loue une chambre à un célibataire bien sous tous rapports, M. Chetan, professeur discret et réservé. A leur manière, ces trois solitaires vont petit à petit former une famille pas comme les autres jusqu'à ce que leurs secrets bien cachés éclatent et que Solo devenu grand décide de fuir l'île et sa mère pour émigrer aux Etats-Unis. Drôle de roman que ce Love after love qui après un démarrage un peu difficile a fini par me conquérir et me laisser une excellente impression grâce à son charme et à la tendresse qui émane de ses personnages cabossés. Il faut accepter de plonger dans le quotidien d'une île dont, vu d'Europe, on ne sait presque rien : Trinidad (une des 2 îles de Trinité et Tobago au large du Venezuela). Par petites touches et à travers un roman choral assez classique qui va donner la parole successivement à chacun de ses 3 personnages principaux, on va découvrir la vie de Betty, femme battue par un mari violent, d'abord soumise puis libérée par la mort accidentelle de celui-ci et devenant alors une mère célibataire prête à se battre pour offrir une vie meilleure à Solo, son petit garçon. Betty au grand coeur que la vie a déjà bien malmenée. Betty prête à s'oublier pour faire le bonheur de son fils. Betty rêvant d'abord à une histoire d'amour avec le mystérieux M. Chetan avant de comprendre qu'il ne sera finalement qu'un excellent ami... et que c'est déjà beaucoup. Betty entourée de sa bande de copines qui veulent la traîner à des cérémonies vaudous pour résoudre ses problèmes mais est-ce bien raisonnable quand l'église le désapprouve. Et Betty la cuisinière, mitonnant ses célèbres petits plats qui m'ont donné l'eau à la bouche tout au long du roman ! Et puis son locataire, M. Chetan, obligé de cacher son homosexualité dans une société qui non seulement réprouve toute relation entre personnes de même sexe mais va même jusqu'à attaquer voire tuer les homosexuels en toute impunité. Ce personnage étrange, solitaire qui cherche l'amour malgré tous les interdits, plein de générosité et devenant le père que Solo n'a jamais eu. On découvre à travers le récit de leurs journées ordinaires la vie quotidienne sur cette petite île, on apprend à les connaître et à mieux comprendre cette société et à travers le récit de l'autrice on s'attache énormément à ces personnes si différentes dont elle dresse un portrait vivant et qui sonne juste. A travers ce roman, c'est aussi toute la problématique de l'immigration qui est abordée, Solo décidant de fuir l'île comme beaucoup de jeunes pour aller tenter sa chance aux Etats-Unis auprès d'un oncle déjà installé là-bas. Il y découvrira l'envers du rêve américain, toutes les difficultés et les violences faites aux immigrés et surtout l'éternelle nostalgie et le manque de racines d'une vie dans laquelle il a fuit sa mère et son île natale. Love after love est un roman qui au final m'a à la fois intéressée et beaucoup touchée. Il faut accepter le rythme un peu lent du début et prendre le temps de plonger dans l'histoire et de découvrir ses personnages mais j'ai ensuite beaucoup apprécié cette lecture et la justesse avec laquelle l'autrice nous fait entrer dans ce monde et partager quelques tranches de vie.