Victor Hugo vient de mourir : Le livre de Judith Perrignon

Excellent livre, dont l’auteur, Judith Perrignon, décrit heure par heure, les dernières heures de Victor Hugo, sa mort, les préparations des funèbres, ainsi que toute la cérémonie voulue par le gouvernement. Elle décrit à merveille, en 165 pages, l’état d’esprit de chacun, de ses petits-enfants, de sa belle-fille, son gendre, ses amis, le peuple, les artistes, les partis politiques et syndicaux, ainsi que tous les gens qui composent le gouvernement… Victor Hugo était un grand écrivains, un grand homme politique qui a œuvré pour le peuple. Il est associé à chaque évènement des années après, et encore maintenant, car il a été l’homme qui était partout… Ils ont tous peur. C’est le désordre complet. Les journaux annoncent la fin, alors qu’il a passé une nuit calme, d’après le bulletin de santé de 6 h 30. Un énorme attroupement envahit sa rue qui porte son nom. Tous veulent le récit de son agonie. Il a prit froid, lors de la réception de son ami Ferdinand de Lesseps. Victor Hugo a 83 ans. Un astre va s’éteindre. C’est un grand homme qui a connu la gloire avant sa mort. Il a enterré femmes et enfants. Georges et Jeanne, ses petits enfants, âgés de 16 et 17 ans sont auprès de lui, en pleurs. Les journalistes occupent jours et nuits sa rue. On parle déjà d’un enterrement civil. Cela fait deux jours que son agonie est officielle. Victor Hugo refuse toute aide. Un bulletin tombe régulièrement plusieurs fois par jour. Le pronostic reste grave. Les fonctions intellectuelles sont intactes, mais la situation est inquiétante. Les fleuristes sont débordés. Les révolutionnaires, les libres penseurs, les anarchistes, les exilés, les amnistiés, les proscrits se réunissent. Victor Hugo c’était la grève des tailleurs, trop de clochards le long des édifices, trop de filles publiques recensées par la préfecture... La veille de sa mort, Victor Hugo tombe dans un sommeil profond Lorsqu’il revient à lui, il reconnaît tous ceux qui sont à son chevet, Alice, sa belle-fille, Edouard Lockroy, son mari, Léopold Hugo, son neveu. La foule à l’extérieur grossit d’heure en heure. Il sait que la mort l’absorbe. Les bulletins de santé s’enchaînent. Il ne passera pas la nuit. L’Archevêque de Paris le supplie à nouveau. Nouveau refus. Même mourant, Victor Hugo reste intransigeant. Victor Hugo a rendu l’âme, le 22 Mai 1885 à 1h27 de l’après-midi. La nouvelle se diffuse dans Paris. Les gens arrêtent de travailler, ainsi que les cantines, les écoles… Le drapeau tricolore est en berne à chaque fenêtre. Les journalistes s’affairent à leur article. La police surveille. La moindre émeute peut virer au rouge. La foule devient considérable devant la maison du poète. Il était l’homme des grandes espérances. Puis c’est le défilé d’hommes politiques, qui vient se recueillir devant la dépouille du poète. Certains écriront qu’Hugo était l’interprète de leurs rêves, et d’autres, le traître de leurs rêves. Victor Hugo ‘’Leur Père à tous ’’fera toujours partie de leur vie, ainsi que tous ces gens qui passent et repassent devant sa maison. Chacun porte son deuil à sa manière. Le jour même de la mort de Victor Hugo, la statue de la liberté était mise en caisse pour partir en Amérique. La foule s’allonge de minute en minute. Chacun veut mettre un message sur le deuxième registre, déjà entamé, posé près de la porte du poète. Les signatures des ouvriers se mêlent à celles de l’ambassadeur du Japon, des sénateurs… Le gouvernement a annoncé des funérailles nationales, ainsi que le Panthéon. Si les uns veulent que Victor Hugo aille au Panthéon, d’autres préfèrent le père-la-chaise. Le Conseil municipal tranchera, Victor Hugo aura sa place au Panthéon. On parle d’une souscription publique pour ériger un monument ou une statue du poète, de baptiser de son nom, cette rue qu’il aimait tant. Le jour se lève, et c’est à nouveau le défilé des hommages, des visiteurs des protocolaires, des délégations, des élèves, du comité de la défense nationale de 1871. Tous déposent des gerbes de fleurs. C’est aussi l’heure de subir les soins qui lui sont dus. Les embaumeurs ont commencé leur travail. Bientôt, il n’y aura plus de lumière à la fenêtre de sa chambre, indiquant que Hugo écrivait. Les sculpteurs sont venus mouler le corps entier du poète. la science et l’Église se disputent. L’un dit que l’embaumeur a mal travaillé et le second, que Dieu s’est vengé, tellement la face du poète est méconnaissable. L’école d’anthropologie réclame son cerveau pour la postérité. Puis suivent le sculpteur, le peintre et le photographe. L’homme devient immortel. C’est l’heure d’imaginer le testament de Victor Hugo. Deux ans avant, il avait donné une lettre, sorte de testament, à Vacquerie, son ami. « Je donne 50 000 francs aux pauvres, je désire être porté au cimetière dans leur corbillard. Je refuse l’oraison de toutes les églises. Je demande une prière à toutes les âmes. Je crois en Dieu ». Il était le roi des pauvres. Le trajet du cortège est modifié pour la sécurité. Dans les rues, tous s’organisent. Les magasins seront fermés, mais loueront leurs vitrines. Les balcons se parent de pancartes ‘’ Balcon à louer’’. Des camelots s’installent pour vendre des médailles de Victor Hugo. 19 discours sont préparés par divers classes des ministres et des représentants de la population. L’arc de Triomphe est voilé d'un immense crêpe avec les titres de ses œuvres, ainsi qu’une photographie géante. Son cercueil plombé et rempli avec une mixture de bois et de sulfate de zinc se prépare pour aller à l’Arc de Triomphe. Un million et demi de francs a été dépensé en fleurs. Douze jeunes poètes portent le brassard de crêpe noir aux initiales du Maître. Ils veilleront le cercueil toute la nuit. Paris se prépare à une longue nuit de veille, qui sera suivie d’un grand jour. Toute la nuit, les gens défilent devant le mausolée. Au lever du jour, à 5h30, le corbillard vient chercher le cercueil du poète, couvert de fleurs. Il est escorté par la police municipale et gardiens de la paix. Victor Hugo savait qu’après avoir voulu un cercueil très simple, ainsi qu’une cérémonie ordinaire, il aurait des funérailles à la grandeur de son talent. ‘’Ce sont les faibles qui l’ont fait important. Ce sont eux qui font les grands hommes. Il faut avoir troublé les consciences, tissé les fils secrets de l’humanité, pour rassembler tant de monde, creuser le temps, les siècles, jusqu’au futur’’. Le cercueil est mis dans un sarcophage, recouvert de velours noir et or et de fleurs. Il est exposé afin que le public puisse, désormais, lui rendre hommage. Les rues sont engorgées de monde.. Paris enterre celui qui l’a aimé et réciproquement… Il était le souverain des mots, de l’imagination…’’ La foule du grand jour grossit de minute en minute. Elle prend place partout, dans chaque rue, sur les murs, les arbres… Toutes les fenêtres sont garnies de curieux. La plupart sont louées. Puis une salve de 21 coups de canon retentit. Cela annonce le début de la cérémonie. Les discours se succèdent. Dans une des tribunes, il y a la famille, les amis, les artistes, dans une autre les officiels. Le cercueil, sorti de son sarcophage, est installé sur un modeste corbillard, suivi de onze chars surchargés de fleurs, encadré par une fanfare, des gardes républicains, des écoles, des lycées, ainsi que douze poètes. D’autres cortèges représentent les pays qui avaient tenu à venir pour le dernier hommage du grand homme.  Puis en dernier, suivra la famille. Georges et Jeanne, deux fois orphelins pleurent sans arrêt…C’est le silence complet, lorsque le char funèbre passe devant la foule. Lorsque celui-ci est sur le pont de la concorde, 150 pigeons sont libérés dans les airs. Puis, le cercueil descend dans la crypte devant sa famille et les autorités, alors que le cortège de charrettes de fleurs et de couronnes défile encore. Victor Hugo ne verra plus les couchers et les levés de soleil. Victor Hugo aimait les hommages, fêter ses anniversaires avec sa famille, marcher avec les ouvriers lors des manifestations. On parlera longtemps des funérailles de Victor Hugo. Lockroy devint ministre de la marine. Adèle est logée au château de Suresnes dans les bonnes mains du professeur Charcot. Vacquerie repose à Villequier près de la tombe de son frère, de Léopoldine et celle de Madame Hugo. Meurice, son éternel ami, veillera sur l’édition posthume du poète. Victor Hugo, cet acharné de l’abolition, sera toujours fêté, car chaque événement le ramènera toujours à lui. J’ai été happée par ce livre, émue et touchée... par tant de détails de Judith Perrignon.

De ses derniers instants sur son lit de mort, aux célébrations au Panthéon lors des funérailles, J Perrignon retrace avec talent ces jours de deuil national où une foule immense a rendu hommage avec ferveur à son plus grand poète et humaniste: Victor Hugo. L'écriture haute en couleur et parfois pleine de verve, apporte à ce récit le mélange de pertinence et de délicatesse nécessaire pour décrire cette petite page d'histoire pleine de passions exacerbées.