La Face nord : Le livre de Jean-Pierre Montal

"Je trouve surtout que tu cherches la difficulté. C'est déjà assez compliqué comme ça, et toi, tu choisis d'attaquer par la face nord..." Pierre n'a pourtant rien d'un conquérant ni d'un aventurier et sa rencontre avec Florence a tout du hasard, à la sortie d'un cinéma parisien où il venait de visionner pour la énième fois Elle et lui de Léo McCarey. Ce film, il en est imprégné, il en connaît chaque seconde, il le porte tellement en lui que son imagination produit parfois des images qui n'y figurent pas. Porosité entre fiction et réalité, entre désirs et vérité. Pierre et Florence se revoient, ébauchent une relation avant que Florence ne s'éloigne ; comme dans le film de McCarey, il y a des obstacles, l'attente prend différentes teintes dont les protagonistes ignorent la source... L'auteur ne se contente pas de jouer sur le parallèle entre le scénario du film et la trajectoire de ses héros, il tisse une toile temporelle en trois dimensions qui emprisonne les échos entre passé et présent et entre en résonance avec l'imaginaire de Pierre. Il donne à ressentir les minuscules décalages qui influencent les perceptions et font dévier les parcours. Il y a dans le passé de Florence le souvenir indélébile d'une attente qui rejoint désormais celle de Pierre, à distance. En littérature, il y a les bavards et il y a ceux qui ouvrent un univers d'émotions en quelques lignes. Jean-Pierre Montal est de ceux-là, précis et tendu vers la phrase juste, habile à mener son exploration spatio-temporelle avec une grâce certaine. Les images imprègnent l'esprit du lecteur, un baiser surprise dans la nuque ou le récit tout en ellipses d'une nuit d'amour. le scénario de départ est simple : un homme rencontre une femme ; le reste tient à la magie de l'écrivain et à celle de l'attente. NB : et bien sûr refermer ce livre avec la féroce envie de revoir Elle et lui. le faire (la version Cary Grant Déborah Kerr). Et pleurer à la fin.

Après la déception de « la sage-femme d’Auschwitz, quel bonheur de lecture que ce court texte de 140 pages, un bijou d’écriture simple, fluide, léché pourtant et une histoire plus simple encore mais qui en fait ne l’est évidemment pas. Pierre a 48 ans, divorcé, bien dans sa vie et fan de cinéma, notamment du film « elle et lui » avec Gary Cooper et Déborah Kerr. Un film d’un amour à côté duquel on passe, par destin, hasard mais qui sait, peut-être se retrouver. C’est à la sortie d’une projection qu’il rencontre Florence, 72 ans, non 80-8, comme elle lui dira ! cultivée, habillée de couleur vive, en retenue, douceur et des rides que l’on oublie. Pierre tombe amoureux de Florence mais voilà, elle n’est pas prête à revivre les tourments de la différence d’âge. Parce qu’elle l’a déjà vécu, comme Pierre va le découvrir dans un récit qu’elle a publié et que l’on retrouve inséré dans ce livre, quand elle avait 22 ans et lui, professeur émérite, 63 ans. Beaucoup de sujets sont abordés dans ces quelques pages. La différence d’âge, le regard sur soi et les autres, les choix, mais aussi la guerre de 1940 avec le camp d’artistes Hutchinson sur l’île de Man, la folie et le poids de la différence. Ce que j’ai aimé c’est la subtilité du style, d’évoquer la passion sans avoir besoin de scène de sexe, de grands mots. Non, juste la vision d’une nuque dévoilée, du même regard porté sur un film. Nos choix raisonnables nous font beaucoup souvent passer à côté d’une vie qui nous aurait sûrement correspondue mieux et entraine sinon des regrets, au moins une nostalgie qui embrume trop souvent les yeux.

Le point de départ de ce livre est un film "Elle et lui" de Leo McCarey. Lui, c'est Pierre, 48 ans. Elle, c'est Florence, 72 ans. Ils se rencontrent à la sortie du cinéma, parlent de leur passion pour ce film qu'ils ont vu et revu un nombre incalculable de fois. On pourrait en rester là. Pourtant quelque chose se noue entre elle et lui mais la différence d'âge est un frein pour elle. Leur histoire va nous plonger dans une spirale temporelle. Et des souvenirs...entre le Paris contemporain et la Vienne d'autrefois quand elle avait 23 ans et qu'elle était amoureuse d'un homme de 40 ans son aîné. Ce roman d'une beauté et d'une poésie troublante traite de la lutte de la passion et de la raison. Qui l'emporte à la fin?

La Face nord , Jean-Pierre Montal Un homme et une femme se rencontrent au cinéma, devant un classique sentimental. « Elle et Lui » les envoûtent et leur permet de faire connaissance…et plus si affinités ! Avec délicatesse, l’auteur nous emmène dans une belle rencontre amoureuse, toute en retenue et en pudeur. Comment passer outre les 24 années qui séparent Pierre de Florence ? Car Florence a « 80-8 = 72 ans » tandis que Pierre n’a que 48 ans… Pourquoi Pierre attaque-t-il la vie par « sa face nord » ? Le récit est fluide, léger, triste finalement. Il est construit en plusieurs blocs : Pierre, le narrateur, raconte d’abord le début de son coup de foudre improbable; puis nous lisons le roman écrit par Florence - le récit de sa passion pour un homme plus âgé lorsqu’elle avait seulement 24 ans et qu’elle était partie à Vienne pour sa thèse en Histoire- ; enfin dans la 3è partie, nous suivons les vies séparées de Florence d’un côté et celle de Pierre, de l’autre côté. J’ai beaucoup aimé cette histoire tout comme sa tonalité.