Le Parrain : Le livre de Mario Puzo

« Le Parrain » de Mario Puzo, publié en 1969, s’est rapidement imposé comme un pilier de la littérature américaine contemporaine. Ce roman, qui plonge le lecteur dans les profondeurs de la mafia italo-américaine, a non seulement captivé des millions de lecteurs à travers le monde, mais a également redéfini le genre du roman policier et de la saga familiale. La suite de ma chronique sur mon blog :

La vie des Corleone est connue à travers le monde grâce a la retranscription cinématographique réalisé par Coppola, portée par un Marlon Brando et un Al Pacino édifiants. Les films sont au niveau du livre, c’est à dire brillants. Puzo a une plume très réaliste. Les coups du sorts arrivent comme dans la vie, de manière abrupte et inattendue. Il a bien compris l’adage de l’écrivain - Show, don’t tell. On est plongés dans l’univers de la mafia italienne par des expressions (pezzonovante, caporegime, consigliori), des repas (les pâtes, la charcuterie), des manières de réfléchir (il n’existe pas d’avantage plus grand que lorsque tes ennemis surestiment tes défauts et tes amis sous estiment tes qualités), des manières de se comporter. Le scénario est superbement porté par des personnages complexes et qui évoluent dans le temps, Michael en étant l’exemple le plus parlant ; ainsi que par des relations interpersonnelles qui évoluent aussi. La loyauté, vertu si chère au sein de la mafia, n’est pas aussi répandue qu’on le voudrait bien croire. Courez-y, les 600 pages passent trop vite, on aurait aimé qu’il y en ait 600 autres.

Aux yeux de ses voisins, Don Corleone est un patriarche, un respectable père de famille qui a su donner à ses enfants une éducation où les rigoureux principes de la morale sicilienne s'adaptent aux nécessités de la vie américaine. Mais sa vraie famille est plus vaste ; c'est une des " familles " de la Mafia dont il est un des chefs les plus aimés, mais aussi les plus respectés, car il est raisonnable et juste. Pour eux, il est le Parrain... Ce roman est l'évocation d'un monde souterrain qui sape les fondations de l'Amérique, d'une pègre redoutable que la société voudrait ignorer, mais que de retentissants scandales ne cessent de révéler au grand jour. De New York à Las Vegas, des somptueuses villas de Hollywood au maquis de Sicile, voici le portrait d'une nation gangrenée par ses syndicats du crime, sa guerre des gangs et ses puissances occultes. L'auteur parvient à faire coexister fiction et réalité avec une belle aisance narrative. Le narrateur pose parfois un regard cynique sur certains personnages et certains faits mais il le fait avec une certaine retenue. Il relate des "faits", peint un portrait d'une organisation qui a chapeauté la société new-yorkaise d'avant et d'après guerre et qu'il connait puisqu'il a lui-même des racines ancrées dans cette société. Il suffit juste d'évoquer le titre pour tout le monde entende quelque part dans sa tête la petite musique si caractéristique de ce chef d'oeuvre porté à l'écran par Coppola. Un roman captivant.

L'adaptation cinématographique est assez fidèle au roman, mais les personnages sont plus fouillés et la puissance de la famille Corléone mieux rendue à l'écrit. L'histoire est bien menée, et ponctuée de petites anecdotes qui rendent la lecture vraiment agréable et donne à l'ensemble une vraie cohérence sur la longueur. L'immersion est totale, facilitée par les images du film qui viennent à l'esprit en lisant, et par l'écriture qui passe d'un personnage à l'autre, ce qui accentue le sentiment de cohésion de la famille. Un très bon roman de genre qui n'a qu'un seul défaut celui d'être trop court malgré ses 900 pages.