Les nuits difficiles - NE : Le livre de Dino Buzzati

Dernier recueil du grand Buzzati, Les Nuits difficiles fait office de réflexions diverses et variées sur la mort. Oscillant entre inquiétudes et discours rassurants, l'écrivain italien arrive en fin de course. Les interrogations sur les différents avenirs qui s'offriront à nous à notre trépas sont d'une grande diversité et d'une grande originalité. Dino Buzzati va jusqu'à décrire l'agonie d'une vieille guimbarde, c'est dire ! En revanche, je n'ai pas ressenti un émerveillement semblable à celui du K. Peut-être parce que certaines de ses nouvelles me rappelaient certaines de mes réflexions et de mes propres nouvelles ! Quelle désagréable sensation que de le constater. Un autre, avant moi, s'était donc épanché sur une réflexion au sujet de la vanité de notre existence... Elle ne tiendrait qu'à la dextérité d'un homme voulant tuer une mouche. Peut-être notre univers serait-il concentré dans un atome d'une de ses pattes. Troublant et renversant. J'ai retrouvé dans quelques-unes de ses nouvelles un hommage à ses anciennes oeuvres. Ce recueil fait office de synthèse, d'acmé de ses productions. La boucle est bouclée, Dino a tout dit. Dans La Tour, il revisite son célèbre Désert des Tartares en nous présentant cet homme qui attend toute sa vie l'arrivée des Saturniens (un peuple barbare envahisseur) qui ne vient jamais. Il passera sa vie dans l'expectative au lieu de la vivre pleinement. Dino, qui n'a plus rien à prouver, plus rien à perdre, se montre parfois plus incisif. Dans L'Influence des astres, il pourfend l'esprit humain qui monte en épingle toutes les prévisions qu'on peut lui faire. Dans le Croquemitaine, c'est le monde moderne qui passe sous les fourches caudines, accusé de faire la chasse à l'inexplicable, tout ce qui échappe au domaine de la raison étant suspect. Dans Contestation globale, il met en évidence le paradoxe suivant : qui a les revendications les plus légitimes, la population âgée qui ne veut plus mourir, ou la jeunesse qui souhaite le contraire pour la préservation des ressources terrestres et de l'économie ? Un débat plus que jamais d'actualité.

Un excellent recueil de nouvelles, très touchant et poétique, qui à certains égards peut rappeler la poésie en prose de Baudelaire : les nouvelles sont très courtes et on y cherche un sens qui ne se perçoit pas toujours après la première lecture. On y revient, et on apprécie ! Beaucoup de réflexions autour de la mort, du sens de la vie, du temps qui passe, des sentiments. A lire !