Les rois maudits T03 Les poisons de la couronne : Le livre de Maurice Druon

Dans ce troisième volet des Rois Maudits, Maurice Druon nous plonge plus profondément dans l’univers complexe et tumultueux du Moyen Âge. Avec une minutie historiquement riche, l’auteur explore divers aspects de la vie quotidienne, des mœurs de l’époque, ainsi que les intrigues royales. **Voyages au Moyen Âge : terre et mer** Le voyage à l’époque médiévale était une entreprise à la fois périlleuse et laborieuse. Sur terre, les routes étaient souvent en mauvais état, rendant les déplacements lents et dangereux. Les nobles et les riches voyageaient principalement à cheval, utilisant des montures bien entraînées. Les caravans de marchands empruntaient parfois des wagons, mais les routes inondées ou les passages difficiles obligeaient fréquemment à des détours. Les échanges maritimes, quant à eux, se faisaient par le biais de navires à voile, que ce soit pour le commerce ou pour le transport de troupes. Les travelliers de mer étaient confrontés à des tempêtes et à des attaques de pirates, mais ils permettaient d’acheminer des marchandises et de l’argent à travers les distances qui auraient été impossibles par voie terrestre. **Soins dans les hôpitaux médiévaux** Les malades à cette époque étaient souvent confiés aux soins d’hôpitaux, qui avaient une fonction double : religieuse et médicale. Les hôpitaux étaient souvent tenus par des ordres religieux qui prodiguaient des soins aux malades, indépendamment de leur statut social. Les pratiques médicales étaient rudimentaires et comprenaient des remèdes à base de plantes, de saignées, ou d’autres traités peu efficaces selon notre entendement moderne. Les médecins de l’époque, souvent formés dans des universités naissantes, avaient une connaissance limitée de l’anatomie humaine, et leur approche manquait de ce qu'on pourrait considérer comme une méthode scientifique. **Mobilisation d'une armée et marche en campagne** La mobilisation d'une armée au Moyen Âge nécessitait une planification méticuleuse. Le roi ou son représentant devait convoquer les seigneurs et les barons pour qu'ils envoient leurs chevaliers et leurs hommes. Ces nobles avaient l’obligation de répondre à l’appel de leur suzerain en cas de guerre, ce qui impliquait de rassembler leurs vassaux. Une fois l’armée rassemblée, les processus logistiques pour l’approvisionnement en nourriture et en matériel étaient cruciaux, car l’armée était généralement inopérante sans ce soutien. Les marches en campagne étaient également marquées par des politiques de pillage et de destruction, cherchant à affaiblir l’ennemi tout en renforçant l’armement et les ressources des forces en campagne. **Mariages royaux** Un mariage royal était une affaire d'État. Ces unions visaient souvent à sceller des alliances politiques entre royaumes. Les mariages étaient généralement orchestrés par des négociations pendant des mois, parfois même des années. Les cérémonies étaient de vastes célébrations, où l'aspect religieux était aussi important que la démonstration de pouvoir. Les festivités comprenaient banquets somptueux, danses et divertissements variés, souvent agrémentés de présents somptueux. La passion et l'amour personnel étaient souvent relégués au second plan, les considérations politiques et dynastiques l'emportant sur les désirs individuels. **Philtre et poisons : magie et mystère** L’art de la magie et de la sorcellerie était enchevêtré dans la vie quotidienne du Moyen Âge. Les magiciennes, parfois considérées avec suspicion, préparaient des philtres et poisons avec des ingrédients allant de simples herbes à des substances plus rares et dangereuses. La réputation de ces praticiens était ambivalente : d'une part, de nombreuses femmes étaient reconnues pour leurs connaissances en herboristerie et en soins, mais d'autre part, l’accusation de sorcellerie pouvait entraîner des persécutions, des procès et des executions. L'usage des poisons dans les intrigues de cour, comme souvent évoqué par Druon, témoigne des luttes de pouvoir désespérées et parfois mortelles qui caractérisaient cette époque. **Le règne meurtri de Louis X Hutin** Le règne de Louis X Hutin, bien que relativement court, marqua un tournant significatif dans l’histoire de France. L’échec de son règne est symbolisé par le fait qu’il meurt sans laisser de fils, ce qui crée une crise de succession sans précédent. Les intrigues qui l'entourent révèlent des rivalités profondément ancrées, comme celles de la belle Clémence de Hongrie, dont la malchance et la beauté lui valent des destins tragiques, et de Guccio Baglioni et Marie de Cressay, dont les amours doivent lutter contre des barrières sociales inébranlables. La tension entre les ambitions personnelles et les exigences sociales s’intensifie autour de la figure de Louis X, faisant de ce tome un véritable tableau des passions humaines enflées par le contexte politique. Dans "Les Poisons de la couronne", Maurice Druon excelle à tisser une trame narrative à la fois captivante et profondément ancrée dans l’histoire, où la vie de cour devient presque un jeu d’échecs tragique, avec des personnages dont les destins se croisent et s’affrontent dans un monde où la loyauté est souvent une notion éphémère.

Quelle lecture addictive que cette saga ! A chaque fin de tome, Maurice Druon laisse en suspens le destin de ses personnages et pousse à la lecture du prochain. Maintenant que Louis X est veuf (et pas par la main de Dieu…) va-t-il pouvoir prendre pour épouse Clémence de Hongrie? Que va-t-il advenir de l'idylle secrète entre Guccio Baglioni (le jeune banquier lombard) et Marie de Cressay (la petite noble désargentée) ? Quant au géant d'Artois, le vil Robert, quelles manigances va-t-il encore mettre en oeuvre pour reconquérir ses terres ? Dans ce tome, l'auteur nous offre une traversée de la mer Méditerranée agitée, un passage à l'hôtel-Dieu où « la mort était offerte en spectacle public » ainsi qu'une guerre avortée contre la Flandre. Les moeurs ordinaires ainsi que les superstitions au Moyen Âge sont admirablement décrits, comme l'utilisation des reliquaires très à la mode, l'élaboration de philtre d'amour ou de subtils poisons… Des complots ressurgissent avec le retour de personnages oubliés, les rancoeurs restent tenaces et les luttes d'influence opiniâtres. Les quelques passages parfois burlesques portés par le jeune lombard apportent une touche rafraichissante et bienvenue au milieu des nombreuses tractations politiques. En somme, les poisons de la couronne est une suite de qualité qui se lit avec un plaisir renouvelé. Les nombreuses péripéties, l'évolution bienheureuse ou fatale de ses personnages ainsi que la satisfaction de parfaire sa culture historique en font un excellent roman. Je ne connaissais pas du tout le destin de Louis X et pour cause : finalement c'est un roi qui n'aura régné que 18 mois. Maurice Druon lui consacre néanmoins deux tomes, un premier où son surnom de hutin est démontré (cf. la reine étranglée) jusqu'à sa maladroite tentative de rédemption ici.

Troisième tome des Rois maudits, Les Poisons de la Couronne poursuit l’épopée tragique des Capétiens avec une intensité renouvelée. Maurice Druon nous entraîne dans un univers sombre où les alliances vacillent et les complots se multiplient. Ce volume explore les conséquences des malédictions qui pèsent sur la lignée royale, tout en révélant les failles des personnages emblématiques, comme Philippe V ou Mahaut d’Artois. Le récit, impeccablement documenté, mêle habilement la cruauté des jeux de pouvoir et les drames humains. Une lecture captivante, où le poison, au propre comme au figuré, devient une métaphore des luttes intestines de la monarchie.