Moi qui ai servi le roi d'Angleterre : Le livre de Bohumil Hrabal
En Tchécoslovaquie, des années 1920 aux purges staliniennes, l'irrésistible ascension et la chute d'un garçon de café devenu richissime : telle est la trame du plus ébouriffant des romans de Hrabal.
Bâtard, de petite taille, animé d'une ambition à la mesure de ses complexes, le narrateur raconte ici, avec une candeur et un amoralisme déconcertants, son incroyable trajectoire. Grandeur et décadence : ce destin s'écroulera après le coup d'État communiste en 1948, le héros échouant dans un camp pour millionnaires déchus !
Ce long monologue est un des joyaux du grand conteur de Prague : tout Bohumil Hrabal est là, avec son humour féroce, son sens inné du baroque, sa truculence magnifique.
" Bien manié, un stylo chargé d'une encre comique peut mettre bien plus d'intensité dramatique dans un récit qu'une plume gorgée de réalisme. " Paris Match
De (auteur) : Bohumil Hrabal
Traduit par : Milena Braud
Avis Babelio
LisaGiraudTaylor
• Il y a 1 mois
Le narrateur nous livre sa vie… ses complexes, sa volonté d’ascension sociale, ses erreurs, ses petites manœuvres, sa fascination pour certaines femmes, sa petitesse de taille, ses galères, ses rencontres fortuites, son arrivisme et sa trajectoire absolument folle. Ce gamin tchèque traverse les années 20 aux années 60 en grimpant les échelons jusqu’à la chute finale. De groom à jeune marié et riche, il va connaître les époques, les évolutions et l’Histoire du monde… Ce roman est un long monologue, débordant d’imagination, de burlesque, de folie, et prend des tournants déjantés par moments. Bohumil Hrabal montre, en filigrane, l’Histoire de son pays, la Tchécoslovaquie, dans les années folle, la montée du nazisme, l’invasion, la guerre, le communisme… cela se passe à Prague, dans des hôtels de luxe, dans un bordel, puis dans un endroit isolé où le gamin, devenu homme, se retrouve à part, écarté, comme tout au long de sa vie. Au fil des pages, on découvre que ce petit gamin est un beau salaud, mais qu’il a une faiblesse flamboyance pour les animaux… il adore les femmes, les femmes légères, les beaux costumes, l’argent, la notabilité, et la bonne bouffe. Il sait flatter, se servir de ses complexes pour tromper, obtenir et récupérer la gloire, le sommet et oublier son statut de sans grade. Hormis son amour pour les animaux, on ne s’attache pas à lui mais à sa trajectoire, à sa vanité, à ses failles, à son humanité et sa drôlerie touchante. J’ai beaucoup aimé la folie de ce monologue et son exil esseulé où sa seule réflexion est la mort… en général… ainsi que sa traversée des époques, des régimes, des opportunités, sans jamais se départir de sa volonté d’ascension, de gravir… de compenser les centimètres qui lui manquent… Incroyable roman fou, déraisonnable et d’une plume agréable et fine… une belle découverte ! Pour finir, une digression cinématographique… Quand on lit ce roman, on pense immédiatement au Grand Hotel Budapest, à la folie de Wes Anderson… On imagine bien ce qu’il pourrait faire de ce récit fou, de ce personnage haut en couleur mais détestable par moment… Pour info, Moi qui ai servi le roi d’Angleterre a été adapté en 1971 par le réalisateur tchèque Ji#345;í Menzel qui a vu un de ses films (Mon cher petit village) nommé aux Oscars en 1986.
JL55
• Il y a 4 mois
Petite plongée dans la littérature tchèque d’après-guerre, dont Bohumil Hrabal fut un joyau resplendissant. Ce touche-à-tout de génie a tout connu, tout fait, tout écrit, exercé tous les métiers, et a vu une bonne partie de sa production broyée par la censure. Quelques pépites ont été sauvées et par bonheur traduites en français. « Moi qui ai servi le roi d’Angleterre » (collection pavillons poche – Éditions Robert Laffont) est une des œuvres les plus représentatives de cet auteur inclassable. Il y est question du désir de reconnaissance d’un jeune groom d’hôtel complexé par sa petite taille et ses origines plus que modestes. Il va, en côtoyant la bonne société qui dirige et fréquente les palaces praguois dans lesquels il officie, comprendre comment devenir millionnaire. Il ne va reculer devant aucun obstacle lui permettant d’accéder à ce statut, et aller jusqu’à tenter de s’intégrer par mariage à la bonne société nazie. Il va finir pas comprendre que nulle société ou compagnie n’accepte celui qui n’est pas des siens. Il verra également que, quel que soit le système politique et social, l’humain détruit ou humilie ses semblables. Ce constat, d’une effroyable tristesse et pourtant si lucide, pourrait laisser penser que le roman est sinistre ; et c’est tout le contraire : l’auteur transcende le propos et nous offre un texte baroque, loufoque, joyeux, gourmand, rabelaisien, où tous les excès de l’âme slave sont portés à leur paroxysme. J’ajoute que la langue est fascinante (bravo à la traductrice : Milena Braud). Ce livre est un objet littéraire non identifié, un voyage initiatique, une bouffée philosophique voltairienne : c’est Candide sous LSD, tout un programme.
roquentin
• Il y a 5 mois
C’est écrit d’une traite, sur près de trois cents pages. Sans ponctuation ou presque, sans paragraphes. En passant d’époque en époque, de façon presque imperceptible, mais avec une grande fluidité. C’est écrit à la première personne et dès qu’on se plonge dans ce récit, il ne vous lâche plus. Jan Ditie est vendeur de saucisses près de la gare de Prague. Très vite il réussit à se faire engager dans les grands cafés et hôtels de la ville. Il change souvent d’employeur et au passage, fait la rencontre de nombreuses personnes. Il y développera ses expériences sexuelles avec filles de joie et autres belles plantes qu’il rencontrera sur son parcours. Tout le livre est truffé d’anecdotes un peu sulfureuses et qui contribuent au joli relief de ce récit... On croise aussi Zdenek, maître d’hôtel qui aimait dépenser son salaire en menant la grande vie et en jetant littéralement son argent par les fenêtres. Il y a Skrivanek qui officiait à l’Hôtel de Paris et qui, aux questions naïves et pleines d’admiration de Jan, répondait imperturbablement par cette phrase énigmatique “...c’est que j’ai servi le roi d’Angleterre..!”. Mais dans ce siècle maudit, personne ne peut préserver son innocence. Au milieu des années trente, Jan devient militant pro nationaliste. Puis Jan séduit Lisa, rencontrée au moment de l’Anschluss et qui est une fervente sympathisante du parti national-socialiste allemand... Par association, Jan deviendra collaborateur actif, à l’insu de son plein gré... Il devient millionnaire ...Pendant ce temps, les nazis passent ses compatriotes par les armes. Quand les communistes entrent dans Prague en 48, cette mésalliance lui sera reprochée... Son destin s’écroule alors. Hrabal lui-même défend l’opinion que les Tchèques eurent un compatriote raciste à l’égard des habitants des Sudètes, justifiant ainsi l’annexation de cette région par les chars de Hitler... Les communistes staliniens du Coup de Prague ne lui pardonnent pas. Ils lui fichent toutefois une paix relative jusqu’au Printemps de Prague et la répression soviétique qui s’en suit. Deux de ses livres sont passés au pilori. Il est édité sois forme de samizdat, c’est à dire dans la clandestinité. Ce livre aurait pu faire bonne figure dans notre défi précédent consacré aux livres censurés. C’est avec beaucoup de flegme et d’ironie que Bohumil Hrabal nous raconte ce parcours plein de rebondissements où ne manquent pas les petites digressions et les personnages secondaires très hauts en couleur. On s’habitue très vite à l’absence de ponctuation ou presque. On finit par les placer mentalement et on lit l’histoire à son propre rythme, avec ses propres pauses. C’est très plaisant à lire. C’est un roman ébouriffant et tonitruant, raconté à un rythme effréné.
Henri-l-oiseleur
• Il y a 5 mois
Voilà un agréable roman de Bohumil Hrabal, qui pourrait passer pour picaresque en bien des aspects. Le récit est fait à la première personne, par le héros, qui déploie tout son art du verbe, sa gouaille parfois, et un certain réalisme humoristique dans le récit réaliste de sa vie. Comme tout picaro, le personnage est désavantagé par la vie : né dans un milieu modeste, élevé par une grand-mère récupératrice de sous-vêtements sales, modeste serveur de restaurant, de petite taille, pauvre et laid, il n'a que l'ambition et le rêve de devenir riche par tous les moyens. La veine picaresque implique aussi l'humour de l'échec, et dans ce roman particulier c'est l'Histoire qui se charge de faire échouer tous les beaux projets du héros, qui comprend, à la fin, que de toute façon il n'aurait jamais été accepté parmi les riches s'il était arrivé à ses fins. La leçon de sagesse finale, qui conclut souvent les romans picaresques, met en scène la nature, la forêt, dans des accès poétiques un peu bavards, et moins amusants que les aventures urbaines du héros. C'est un roman distrayant, que je ne regrette pas d'avoir lu.
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Romans , Roman Étranger
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- EAN
- 9782221199824
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- Collection ou Série
- Pavillons Poche
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- Format
- Poche
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- Nombre de pages
- 304
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- Dimensions
- 184 x 124 mm
Nous sommes ravis de vous accueillir dans notre univers où les mots s'animent et où les histoires prennent vie. Que vous soyez à la recherche d'un roman poignant, d'une intrigue palpitante ou d'un voyage littéraire inoubliable, vous trouverez ici une vaste sélection de livres qui combleront toutes vos envies de lecture.
9,50 € Poche 304 pages