Into the Wild : Le livre de Jon Krakauer, Benjamin Jungers

Ce livre est la biographie reconstituée de Christopher McCandless par un journaliste américain. Le héros est une jeune homme de 24 ans, de la classe moyenne aisée américaine, qui accède à l'université grâce à des parents ouvriers aimants qui se sont battus pour lui. Mais il est ingrat et colérique, extrêmement têtu. Son romantisme anti-société de consommation ne suffit pas à m'éloigner de mon antipathie pour lui, jeune prétentieux qui donne des leçons à tout le monde. Après des études à l'université, il plaque tout et part deux ans faire du stop et vivre une vie de SDF mendiant aux États-Unis. Il n'a aucun but en particulier. Il rêve de l'Alaska de Jack London mais, impréparé, il meurt comme un con de dénutrition et intoxication dans un bus abandonné. Ses lettres montrent qu'il était attentionné envers quelques demi-marginaux rencontrés, mais qu'il se fichait de la peine provoquée à sa famille : de son départ à sa mort deux ans plus tard, il a coupé toutes relations avec sa famille, se contentant de les traiter d'idiots. Ce qui m'a marqué dans l'enquête du journaliste et auteur de ce livre, c'est que le randonneur en question, Alex, critique tout le temps ses parents, mais sans raison claire... Il quitte les boulots dans lesquels il est embauché, il semble détester la notion d'autorité. Une femme qui l'a côtoyé résume ça bien : "C'est avec l'idée de parents qu'il était en conflit." Bref, un antihéros rendu sympathique par le film !

Août 1992, dans une région inhospitalière de l’Alaska. Des chasseurs d’élans retrouvent le cadavre d’un jeune homme dans un autobus abandonné. Apparemment mort de dénutrition, il était parti randonner 4 mois plus tôt. Qu’est-ce qui a conduit ce fils d’une famille aisée de la côte est des Etats-Unis à s’échouer dans ce lieu perdu jusqu’à y perdre la vie ? Et pourquoi avait-il coupé tout lien avec sa famille ? Jon Krakauer fait paraître son histoire pour la première fois dans le magazine Outside. Il reçoit en retour de nombreux courriers, pour les uns élogieux, pour les autres pleins d’incompréhension, de mépris voire de haine. L’auteur décide alors d’écrire un livre qui s’efforce de tendre une passerelle entre l’objectivité des faits et la fin de Chris Mc Candless d’une part, et les émotions extrêmes que cette histoire a suscitées d’autre part. Son fil rouge est celui du sens, tenter de comprendre l’itinéraire et la fin brutale de ce jeune homme en s’appuyant sur de multiples sources, parmi elles des écrits littéraires qui l’ont inspiré jusqu’au terme brutal de sa courte existence. Au-delà de l’histoire singulière et dramatique de ce jeune homme, c’est tout un contexte qui se dessine en arrière-plan, celui d’hommes en quête d’ailleurs, d’exploration, d’aventure, en marge d’un système consumériste qu’ils dénoncent, une Amérique des marges qui rêve d’habiter le monde et la vie autrement. Au fil des pages, des événements contés qui font la part belle aux flashback et digressions, des faits qui s’accumulent, des cartes qui dessinent la géographie d’une perte, une émotion sourde et puissante se fait jour et l’on se surprend à vibrer d’empathie pour Chris Mc Candless et sa quête aux confins du monde, de lui-même.

Peu avant le début de l'automne 1992, le corps de Christopher McCandless est retrouvé dans un vieil autobus abandonné au Nord de l'Alaska, sur la piste Stampede. Après avoir écrit un article dans "Outside" et face aux nombreuses réactions des lecteurs, le journaliste Jon KRAKAUER (qui fera parti en mai 1996 de la tragique expédition sur l'Everest qui tourna au cauchemar), décide d'en écrire un livre. Un livre pour aller plus loin, pour comprendre qui était Chris, ce qui l'a motivé à se lancer dans cette expédition, sur les routes des U.S jusqu'au Grand Nord qui a toujours été l'objectif principal de sa quête. De chapitre en chapitre, KRAKAUER nous parle de Chris. Un jeune homme bercé par la littérature et enivré par les récits de Jack LONDON, John MUIR, THOREAU ou encore TOLSTOÏ. Chris est aussi parfois contradictoire à en croire ses proches. Toujours plein de facilités depuis son plus jeune âge à faire de l'argent, il aura pourtant fait don de ses économies à une association et brulé ses papiers avant de commencer son périple. Chris semble rechercher quelque chose dans un monde qu'il ne comprend plus et on ne peut que le comprendre à notre tour. Heureusement que Chris n'a pas connu ce 21ème siècle en un sens. Chris rêve de grandeur, de solitude, de paysages sauvages et merveilleux dans lesquels il s'épanouirait enfin. mais Chris, malgré sa difficulté à vivre en société, a laissé des traces de son passage dans l'esprit de tous ceux qui ont eu la chance de croiser sa route. Un jeune homme timide, à l'écoute, obnubilé par l'Alaska. Un livre à lire au moins une fois dans sa vie tout comme le film de Sean PENN qu'il faut aussi avoir vu. La vie, aussi courte soit elle, d'un homme qui sera parvenu à se donner les moyens des choses qu'il voulait entreprendre. Dans la courte liste des récits d'aventures incroyables qu'il faut lire sans attendre et pourquoi pas, relire. Pour ma part, c'est ma troisième lecture... Du même auteur à lire absolument: "Tragédie sur l'Everest"

Le (beau) film de Sean Penn était tout émotion et dans la lignée de la littérature panthéiste américaine. le livre qu'il adapte, lui, sait se situer en retrait de la sympathie spontanée envers Mc Candess et poser toute sa problématique. Vous ne retrouverez donc pas ici le lyrisme du film (ah ! Notre garçon les larmes aux yeux devant un troupeau d'élan...) mais un compte rendu analytique de cette aventure. Comme tous les essais journalistiques US, c'est du bel ouvrage, soigné et documenté, pour autant de ce que l'auteur a pu reconstituer de cette odyssée au travers des lettres de MC candless, témoignages des rencontres de passage, transports sur le terrain.. Mais encore une fois c'est la distance à son personnage qui m'a interpellée. Ce livre n'est pas l'hagiographie d'un héros mais le portrait d'un garçon d'une intelligence et une sensibilité supérieures aux prises avec un tempérament fougueux, nourri d'une idéologie autodidacte et intransigeante (les livres de Thoreau, mais aussi London et Tolstoï) voire un poil réactionnaire. L'auteur replace cette aventure dans la lignée d'autres énergumènes du survivalisme et du dépassement de soi, dont, et c'est intéressant, celui là même qui tient la plume, qui octroie un chapitre a sa propre aventure.. Si bien que nul n'était sans doute mieux placé que Krakauer pour rendre compte de la personnalité complexe de son homologue.. La fin, centrée sur le débat :MC Candles est il mort d'inanition ou d'avoir mangé des graines de plante toxique, se place comme un enjeu de taille: trancher une bonne fois si le jeune homme a été victime d'un hiatus botanique ou de son imprudence mégalomane, mais l'auteur nous laisse sur notre faim (sic) . Avec ce corollaire: Mc Candless a t il été victime d'un Mal moderne ou est il une icône de la liberté fin de siècle ? Krakauer, qui semble avoir choisi son camp, nous laisse malgré tout juges, et ce n'est pas le moindre atout de ce livre totalement complémentaire à son avatar filmé. À se demander si MC Candless aurait préféré la chanson de geste de Sean Penn ou ce regard objectif ?