La deuxième femme : Le livre de Louise Mey

Une immense claque. Je n'étais clairement pas convaincue au début. D'abord à cause de la narration très déroutante et l'absence quasi totale de dialogues (du moins dans la forme qu'on leur connait). Mais cette volonté de l'auteure de rapporter la vie de Sandrine, son psyché fragile et la manière dont elle s'émiette peu à peu nous prend littéralement aux tripes. Ce roman est bouleversant. Il nous compte là l'horreur de vivre avec un pervers narcissique dans sa plus pure forme. Frissons, dégoût, colère, tension. Vous ne serez pas épargné, tout comme Sandrine, dans cette abominable descente aux enfers. Foncez ! Passez au-dessus de la narration surprenante mais nécessaire et lisez le !

C'est le deuxième roman de Louise Mey que je découvre et sa plume est toujours aussi belle. C'est pas évident, de réussir à faire que les mots soient capables de transpirer autant d'amour puis de peur quand il le faut, et elle le fait avec brio. Pas d'enquête, et pas de mystère dans ce roman qui est le récit de l'emprise. C'est très bien construit, très bien écrit, immersif, et très sincèrement, ça prend aux tripes. On découvre l'emprise au rythme de la réalisation du personnage, c'est une mise en lumière très intelligente, mais particulièrement dure à lire. Je vais être honnête : ce n'est cependant pas que j'avais envie de lire en le choisissant. Je pensais lire un thriller/roman noir, certes profondément empreint d'un propos féministe et politisé (dans l'esprit de Petite sale), mais ce roman n'est pas un thriller. C'est un roman psychologique avec une plongée constante et profonde dans le mécanisme des violences conjugales, extrêmement bien écrit, engagé, sincère mais étouffant.

Je ne m’attendais pas exactement à ça en commençant la lecture. Peut être à quelque chose qui relève plus du policier, du thriller… Psychologique ? Oui, ce livre l’est. On est coincé dans le point de vue interne de Sandrine, le personnage principal, et on traverse avec elle les différents rebondissements. Néanmoins, je ne saurais pas dire si c’est un « bon » livre, aussi « bon » qu’un livre sur l’emprise puisse être. Il y a quelque chose de presque trop court et immédiat. Dans l’écriture, magistral par contre, on sent tout de suite une angoisse, un doute, il y a quelque chose qui ne va pas, qui n’est pas normal et, pour une personne aguerrie, certains gestes qui paraissent d’amour ne laissent pas le doute sur les véritables intentions. Et c’est peut être ça qui me dérange un peu, dans ce texte très bien écrit, c’est qu’on ne tombe pas un peu amoureux.se de l’homme qui pleure. Tout de suite, on comprend que quelque chose cloche. Comment comprendre l’emprise quand on ne saisit pas la phase de séduction ? Le conte de fées qui est vendu ? Puis le cauchemar qui s’en suit ?

Ce livre m'a mise profondément mal à l'aise. Il est vraiment très dur, j'ai du faire des pauses par moment dans ma lecture. Déjà la narration est faite de telle manière qu'on a l'impression d'être dans la tête de Sandrine, ce qui est assez perturbant. Parfois les phrases ne sont pas complètes, il n'y a pas de dialogues avec guillemets. Petit à petit, on découvre son quotidien et l'emprise psychologique de l'homme avec lequel elle vit, sa violence progressive au fur et à mesure de leur relation. J'ai retenu mon souffle à la fin, en me demandant comment cela allait se terminer... Si le récit est dur, je pense qu'il est essentiel pour comprendre comment se crée et se consolide l'emprise d'une personne violente. On se dit souvent de la personne qui subit : elle n'a qu'à partir. Ce roman m'a permis de comprendre que ce n'est pas aussi simple.