La Saison des ombres : Le livre de Jo Baker

Nous sommes à Londres en 1940 et nous allons suivre Charlotte, une jeune femme de 20 ans qui bien qu'appartenant à une famille très aisée, (son père est député), vit seule dans une petite pension de famille et travaille comme dactylo au ministère de l’information. Sa vie est assez morne et routinière, et elle s'ennuie beaucoup, malgré le climat angoissant de la guerre et les bombardements quotidiens. Elle vit très mal le fait d'avoir perdu son frère et elle se raccroche à quelques amies qu'elle essaie de voir souvent. Dès le début, l'ambiance est étrange, à la fois parce que les bombardements détruisent chaque jour des maisons et tuent des gens de façon totalement aléatoire, mais aussi parce que l'attitude de Charlotte est assez déconcertante, elle ne songe qu'à profiter de la vie, à aller faire des balades ou du shopping quand tant de gens tentent de survivre, nuit après nuit. En entrant dans ce roman je ne savais pas trop si je m'engageais dans une histoire classique, une intrigue policière voire une histoire flirtant avec le paranormal. Car des choses étranges ont lieu sans que le lecteur sache si ce qui se passe est réel ou si tout est dans la tête de Charlotte. Plusieurs de ses connaissances meurent successivement, une "présence" semble la suivre, elle fait une rencontre improbable, bref, on ne sait à qui ou à quoi se fier dans cette histoire. J'ai bien aimé les descriptions des bombardements et de l'atmosphère qui régnait à l'époque, on comprend bien l'angoisse des habitants, mais aussi leur envie de vivre malgré tout et de profiter de chaque instant. Au final, ce roman est assez déconcertant, mais la fin apporte une explication à tout ce mystère et j'ai été ravie de plonger quelques heures dans ce roman à l'intrigue originale.

C'est un roman dont le "personnage principal" est l'ambiance, une ambiance sombre éprouvante pour les nerfs, où tout votre monde peut changer en un claquement de doigt (ou de bombe...) et où pése sur les épaules d'une très jeune fille une extrême solitude, une solitude poisseuse, collante, de celle qui peut vous précipiter vers la folie... On est à Londres en 1940, Charlotte (qui n'a de famille que le nom), a refusé d'aller vivre à la campagne, dans la demeure familiale (son père est un personnage important, Sir Richmond, député). Elle occupe une chambre meublée dans un quartier que sa soeur juge peu convenable et travaille pour s'occuper comme dactylo au ministère de l'information. Rien de folichon. le deuil de sa mère lorsqu'elle était enfant, le peu d'intérêt que lui porte son père et sa soeur, ajouté au deuil de son frère disparu en France récemment , fait qu'elle ne va pas bien. elle se raccroche à ce qu'elle peut, un jeune homme qui nourrit les oiseaux, sa meilleure amie qui annule sortie après sortie... Et puis manque de bol (on est en guerre...), sa meilleure amie décéde, puis des connaissances , des voisines et puis, et puis ... Combien de deuils peut-on encaisser toute seule avant que ce que le cerveau n'explose ? Et puis il y a cet homme qui la suit, en complet gris, que lui veut-il ? Est-ce lui qui assassine ses amies ? Et puis ces bombes, et puis ces corps... C'est l'histoire d'une fille bien trop seule pour supporter tout cela, et la guerre qui vient s'enrouler autour d'elle avec ses complots, ses trahisons. C'est l'histoire d'une fille qui va se battre pour essayer de comprendre pourquoi toutes ces morts autour d'elle. Paranoïa ? le résultat de son "enquête" est surprenant ... Le fait que le danger puisse venir de partout, du ciel avec les bombardements, d'elle même qui ne voit plus aucune raison de vivre, de sa famille, des institutions, ou de ce mystérieux homme en gris, participe à l'étrangeté de cette lecture. le lecteur ne sait plus en qui, et en quoi, avoir confiance. Où est la vérité ? Roman d'ambiance, très sombre, très noir et en même temps porteur d'espoir et de sourires, car à chaque "amie" disparue, vient s'ajouter des voix dans la tête de Charlotte. Ces voix discutent entre elles avant qu'elle ne prenne une décision, certaines sont franches , d'autres marrantes, mais toujours elles vont dans le sens de ce qui serait bien pour Charlotte, ce qui fait que la lectrice espère une fin heureuse pour cette jeune fille frappée, tabassée par la vie, les personnes toxiques et la solitude psychologique. De nos jours il y aurait consultation ou cellule psychologique, mais on est en 1940, cette branche de la médecine en est à ses balbutiements, et on est en temps de guerre alors, on oublie ! Que chacun se débrouille avec ses démons, ses "méchants" et ses ombres. Le deuil , les ravages de la guerre, les ruines, l'entraide, les vêtements, l'aspect historique : tout cela est magnifiquement traité. Une lecture instructive, une fin très intelligente et une ambiance à couper au couteau !