La Vie profonde - Une expédition dans les abysses : Le livre de David Wahl

Voilà un petit (moins de 200 pages) livre tout à fait revigorant ! Je confesse que je ne connaissais pas du tout David Wahl avant de lire son journal de bord, un format qui m'a toujours séduite, synonyme d'aventures et d'expéditions. L'auteur embarque, en 2017, sur un navire scientifique, le Pourquoi Pas, pour aller explorer l'un des derniers mondes méconnus sur terre : les abysses. Ces lieux mystérieux ont nourri bien des légendes mais leur exploration est bien tardive en comparaison de la conquête de l'espace par exemple. Et c'est tant mieux d'une certaine façon, car j'ai bien peur que certains gouvernements ne veuillent exploiter cet univers avant même qu'il ait livré une partie de ses secrets. Craintes partagées par l'auteur et les scientifiques, qui ont daigné communiquer leur émerveillement à travers ce livre. Vous rencontrerez ainsi le très étrange pyrosome (qui a dû servir de modèle à James Cameron pour son film Abyss) et d'autres créatures improbables que ni vous ni moi ne contempleront jamais. La dernière page tournée, je médite sur les beautés fragiles de la nature que la sottise et la cupidité des Hommes risque de condamner irrémédiablement. Et je me prends à espérer que, peut-être, une invasion de physalies pourrait bien contrarier les plans de ces industriels et gouvernements criminels... sait-on jamais.

#127758; Cette réédition en poche de la vie profonde marque l'intérêt pour cette thématique de la vie dans les abysses. #127758; Ce témoignage de la vie des scientifiques à bord du Pourquoi pas ? lors d'une campagne sur un champ de cheminées hydrothermales actives, Lucky Strike, par près de 2500 mètres de fond, au large des Acôres en 2017, est rapporté par David Wahl sous la forme d'un journal de bord. #127758; Son implication quotidienne auprès des équipes qu'il s'est astreint à raconter par écrit quotidiennement, nous plonge dans les tâches journalières des manipulations nécessaires pour étudier ces écosystèmes profonds et entretenir l'ensemble des instruments de mesures, laissés sur place à l'année et qu'il faut remonter, nettoyer et upgrader avant de les réinstaller dans cet environnement extrême où rien ne ressemble à la vie à terre. #127758; Car ici, crustacés, mollusques et autres habitants ne peuvent vivre que dans une étroite promiscuité, ni trop près des cheminées qui crachent un liquide toxique brûlant, ni trop loin de cette chaîne alimentaire chimique, dans une eau glacée, dense et pauvre en ressources. Aussi dans de telles conditions, c'est la coopération qui s'impose, chaque espèce, chaque individu dépend de l'autre et collabore activement. Cest un bel enseignement, l'abondance créé le gaspillage et l'affrontement, la rareté créé l'efficacité et la coopération. #127758; Avec un style très agréable on découvre ce subtil mélange de science et d'écriture poétique, philosophique et théâtrale, pleinement réussi, car l'équipe scientifique a été ensuite mise à contribution pour produire une pièce de théâtre afin de sensibiliser à la fragilité de ces milieux face aux appétits extractivistes des grandes puissances industrielles. #127758; Une agréable lecture instructive et enrichissante qui a beaucoup résonnée avec celle de Plongée profonde de Théodore Monod.

David Wahl nous fait partager à travers un livre de bord sa participation à une expédition scientifique abord du navire le pourquoi pas ? On y découvre les abysses avec le regard néophyte de l’auteur. La deuxième partie du livre nous ramène sur terre en Colombie britannique pour un travail littéraire entre scientifiques et étudiants. Un récit passionnant.

Un écrivain dramaturge à bord du «#8239;Pourquoi Pas ?#8239;» en mission scientifique pour explorer des sources hydrothermales des grandes profondeurs. Le navire porte bien son nom. Si je peux vous sentir incrédule, perplexe… Ne le soyez pas ! Le doute se dissipera de toute façon de lui-même en quelques paragraphes ou au pire quelques pages. Le récit navigue entre deux eaux dans le bon sens du terme. Il y a un peu de vie à bord. Les rites, les quarts, la nourriture, l’isolation. > Une chose d’ailleurs me frappe de naviguer en haute mer, c’est la révélation soudaine de me trouver en plein désert. Du bleu partout, en haut comme en bas, une surface que rien ne vient déranger, un ciel sans oiseau. Ici, à part le vent et les vagues qui se jettent contre la coque (et les moteurs du bateau), aucun bruissement végétal, pas de bois qui fend, pas de rocher qui s’éboule… Pour moi du moins, c’est une véritable découverte. On assimile plus volontiers le désert à l’aride, au sec, au sable, et pas à l’eau qui, dans notre esprit, reste indissociablement liée à la vie, à son origine, à sa nécessité, bref à son exact contraire. Là encore, les extrêmes se rejoignent Avec un vrai ressenti pour la vie en haute-mer. Des impressions que j’ai pu constater brièvement : > À vivre sur un bateau, on se surprend à tenir à ces petites liturgies quotidiennes. On aime à voir et à revoir. Tout fait événement. Il y a aussi la découverte du travail des scientifiques. La mise en place des manipulations préparées durant de longs mois. Les longues sessions de pilotage du Robot dans les grandes profondeurs. Le travail rigoureux d’analyse. Le tout sur un bateau qui bouge : pas de port, pas de mouillage ! Nous sommes en plein océan. Il y a aussi une très habile vulgarisation scientifique. Ce n’est pas le but du récit. L’auteur n’a pas et ne se sent pas légitime pour le faire. Mais il est d’une grande curiosité. On en apprend beaucoup sans s’en apercevoir. Mais le point fort de ce livre est : La capacité d’émerveillement, la sensibilité de l’auteur. Cela rend ce journal de bord tout à fait passionnant et fascinant. C’est magnifique de voir la science se faire sous ces yeux. > La voûte céleste, c’est l’océan du dessus. On se tient sur ses bords, comme enivré. Des rivières lactées, sinueuses de milliards d’étoiles, l’irriguent en tous sens. Il y en a des blanches, des jaunes, des roses, des bleues. Ce livre est aussi une occasion de se sensibiliser à la grande question de l’exploitation des grandes profondeurs. Les grandes profondeurs sont un écosystème tellement mal connu. Les appétits sont immenses et les conséquences pourraient évidemment être irrémédiables. > L’océan est un puits de carbone, un régulateur nécessaire à notre survie à tous. Perturber son équilibre chimique, en rejetant dans ses eaux des quantités gigantesques d’éléments chimiques, de gaz et de métaux provenant de mines sous-marines pourrait conduire à une aggravation considérable du dérèglement climatique. En conclusion Un regard émerveillé sur la science qui se fait > Se rattacher à un territoire, prendre le temps de l’observer pour le connaître, et de le connaître pour l’aimer, voilà ce à quoi pourrait servir la science. Elle deviendrait alors un mode de vie tout autant qu’un savoir ; comme une philosophie, si vous voulez, qui pourrait modifier notre relation aux choses et aux êtres, dans la direction d’une plus grande association D’autres lectures Si c’est l’aventure maritime qui vous intéresse, je vous conseille : «#8239;Seul autour du monde sur un voilier de onze mètres#8239;» de Joshua Slocum.