L'attrape-coeurs : Le livre de J.D. Salinger
"Si vous voulez vraiment que je vous dise, alors sûrement la première chose que vous allez demander c'est où je suis né, et à quoi ça a ressemblé, ma saloperie d'enfance, et ce que faisaient mes parents avant de m'avoir, et toutes ces conneries à la David Copperfield, mais j'ai pas envie de raconter ça et tout. Primo, ce genre de trucs ça me rase et secundo mes parents ils auraient chacun une attaque, ou même deux chacun, si je me mettais à baratiner sur leur compte quelque chose d'un peu personnel. Pour ça ils sont susceptibles, spécialement mon père. Autrement ils seraient plutôt sympa et tout –; d'accord –; mais ils sont aussi fichûment susceptibles. Et puis je ne vais pas vous défiler ma complète autobiographie. Je veux juste vous raconter ce truc dingue qui m'est arrivé l'année dernière vers la Noël avant que je sois pas mal esquinté et obligé de venir ici pour me retaper."
De (auteur) : J.D. Salinger
Traduit par : Annie Saumont
Expérience de lecture
Avis Babelio
Ngc
• Il y a 2 semaines
L'attrape-cœurs est un livre premièrement surprenant par son style. Celui utilisé ici est en effet le langage parlé, celui d'un adolescent pour être plus précis, avec ce que cela comporte en expressions grossières, simples, voir répétitives mais toujours franches, honnêtes et parfois drôles. Il faut avouer que l'effet profite de la brièveté du récit (250 pages) car l'on imaginerait mal subir des "Ouha", "foutrement" et autres "bicause" 600 pages durant ! Dans ce contexte, le récit s'en sort bien et l'on évite l'indigestion. C'est déjà ça ! Il serait toutefois malvenu de croire que le style quelque peu grossier utilisé pour la narration empêcherait le développement d'idées et de réflexions intelligentes et perspicaces. Bien au contraire ! Le narrateur, bien que renvoyé de son collège, n'est pas un idiot bêtement rebelle mais plutôt un personnage différent qui ne se reconnait pas dans ses camardes de classe et ne se situe pas dans sa scolarité et sa vie. Plutôt du genre à vivre au fur et à mesure, sans planifier avenir et carrière, il n'en demeure pas moins très curieux, quoique manquant de passion, et sait exprimer avec une sincérité désarmante son dégoût des choses. Le récit se déroule durant quelques jours mais au final les évènements ayant cours durant la "fugue" ne prennent pas toute la place, loin de là, et les digressions vont bon train, sur des sujets assez variés mais en rapport avec l'adolescence en majorité. On y trouve pêle-mêle des thèmes comme le sexe, le cinéma, l'attitude des gens, l'école... Et il faut avouer que si L'attrape-cœurs ne s'élève pas comme un monument de la littérature, il propose quelques moments au dessus du lot comme la discussion avec cet ancien professeur chez lequel Claufield trouve brièvement refuge. La leçon du professeur vaut le détour et se révèle comme le grand moment du livre. En dehors de cela le récit reste toujours intéressant et se laisse suivre sans ennui même si l'on ne peut s'empêcher de regretter un potentiel peut-être inexploité chez David Sallinger. Pousser plus loin ses réflexions et y accorder une forme plus convenable à l'écrit n'aurait pu que rendre le livre meilleur. Jusqu'à lui conférer un statut de chef d'œuvre de la littérature, qui sait ?
SophianeLaby
• Il y a 1 mois
Holden a le cafard. Pas étonnant quand on vient de se faire renvoyer de son collège - une énième fois. “J’étais pas supposé revenir après les vacances de Noë pour la raison que j’avais foiré en quatre matières, et pour le manque d’application et tout.” Il a quelques jours à tuer avant de quitter l’internat, avant d’affronter ses parents, avant de devenir adulte, peut-être. Il traîne sa mélancolie adolescente dans les rues de Manhattan, à la recherche d’on ne sait quoi, ruminant en vrac ses idées noires, quelques souvenirs heureux et beaucoup de réflexions digressives. “Je pensais au lac de Central Park, en bas vers Central Park South. Je me demandais si l’eau serait gelée quand je rentrerais à la maison, et si elle l’était, où seraient allés les canards.” Malgré les discussions sordides ou cocasses auxquelles Holden s’accroche dans les bars, les taxis, au téléphone, la solitude lui colle à la peau. “New York c’est un endroit terrible. Quand quelqu’un se marre dans la rue ça s’entend à des kilomètres. On se sent tout seul et misérable.” Fumer des cigarettes comme un jeune, commander de l’alcool comme un grand, et puis pleurer comme un enfant. Pas facile d’être Holden, adolescent perdu, cynique, incompris, tristement marrant. Pas facile de trouver une place dans ce monde où les grands frères meurent et où les petites sœurs grandissent. Ce personnage, on l’aime autant pour son bavardage crâneur, pour ses tics de langage encore enfantins, pour son refus des négations, pour son foutu vocabulaire foutrement libre, pour son argot un peu vieillot, que pour les moments où il cède, où il avoue toute la tendresse et toute la sensibilité dont il est fait.
Steph_K
• Il y a 1 mois
Quelques heures dans la tête d'un adolescent en fugue qui erre dans New York: ses souvenirs, ses peurs, ses espoirs, ses contradictions. Un roman culte des années 40 qui n'a pas pris une ride et conserve sa pertinence grâce à l'oralité de sa langue et à sa justesse de ton.
michelblaise
• Il y a 1 mois
« Au milieu de l'hiver, j'ai découvert en moi un invincible été. » (Albert Camus - "Le Mythe de Sisyphe)" L'Attrape-coeurs, publié en 1951 par J.D Salinger, s'ouvre sur le récit d'Holden Caulfield, un adolescent au parcours chaotique qui vient d'être renvoyé de son énième école. Avant de rentrer chez ses parents – dont il redoute la réaction face à la lettre de renvoi – Holden choisit de s'échapper quelques jours dans les rues de New York. Ce périple, à la fois extérieur et intérieur, nous plonge dans un regard à la fois intime et universel, à travers la voix d'un garçon au bord du basculement. Ce roman, sans aucun doute, autobiographique, se déploie dans une langue directe, brute, fidèle au parler des jeunes des années 50. Ce style, simple en apparence, mais terriblement efficace, a traversé les générations pour devenir un véritable emblème de la révolte adolescente. Ce qui m'a particulièrement plu, c'est que malgré la gravité souvent palpable du propos, l'humour affleure à chaque page. Les réparties de Holden sont à la fois caustiques et drôles, parfois même à mourir de rire, ce qui donne à l'ensemble une légèreté bienvenue et un souffle profondément humain. À cet égard, contrairement à ce qu'on lis souvent, je ne qualifierais pas Holden Caulfield de misanthrope. Son rejet ne s'adresse pas à l'humanité en général, mais plutôt au monde adulte, qu'il perçoit comme hypocrite, insensible et souvent menaçant. On pourrait presque dire qu'il développe une forme d'anthropophobie ciblée, une sorte d'allergie à ce passage à l'âge adulte. Son contact avec les adultes lui est si difficile qu'il en devient presque pathologique. En revanche, son regard est tendre et protecteur envers les enfants, ce qui donne une dimension poignante à son personnage. Cette opposition souligne le coeur même de l'oeuvre. Le titre du roman s'explique parfaitement par cette métaphore puissante tirée du poème écossais de Robert Burns, Comin' thro' the Rye. Holden s'imagine en gardien d'enfants jouant dans un champ de seigle au bord d'une falaise, prêts à tomber dans le vide s'ils ne sont pas retenus. Cette image exprime son désir intense d'empêcher l'innocence de disparaître, de retenir les enfants au seuil d'un monde adulte qu'il redoute et rejette. C'est une métaphore bouleversante qui éclaire toute la portée du récit. Ce que j'ai également trouvé intéressant et passionnant, c'est justement sa capacité à mêler tendresse, fantaisie, humanité et vitalité. En effet, bien que l'attrape-coeurs demeure un roman, il a aussi une dimension documentaire : il nous plonge dans une époque, nous fait toucher du doigt un contexte social et culturel précis. J.DSalinger ne se contente pas de raconter une histoire, il cherche aussi à émouvoir, à choquer parfois, à témoigner, à dénoncer. Cette richesse donne au texte une profondeur rare. C'est passionnant. Un parallèle s'impose, même s'il n'est pas évident de prime abord : la révolte silencieuse et la quête de sens d'Holden Caulfield m'ont rappelé l'oeuvre d'Albert Camus. Tous deux incarnent cette interrogation fondamentale face à un monde qui semble absurde, un refus d'accepter le simulacre et la superficialité. Dans cette perspective, L'Attrape-coeurs est un roman à la fois personnel et universel, une oeuvre qui questionne l'existence sans jamais perdre de vue la complexité des émotions humaines. Enfin, il y a cette phrase, extraite de la toute dernière page, il s'agit d'ailleurs de la dernière phrase du livre, que je trouve d'une justesse bouleversante et qui résume à elle seule la mélancolie contenue dans tout le roman : « Faut jamais manquer à personne. Si on le fait, tout le monde se met à vous manquer. » Ce constat simple révèle toute la solitude d'Holden, mais aussi son attachement fragile aux autres, même s'il ne le montre pas toujours. En résumé, L'Attrape-coeurs est un roman incontournable, indispensable, un classique qui continue de parler à toutes les générations. Il m'a touché par sa sincérité, sa puissance narrative et son humanité. Je le recommande chaleureusement à ceux qui cherchent une lecture à la fois profonde, drôle, et pleine de vie. Bonne lecture. Michel
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Romans , Roman Étranger
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- EAN
- 9782221099094
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- Collection ou Série
- Pavillons
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- Format
- Grand format
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- Nombre de pages
- 240
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- Dimensions
- 217 x 137 mm
Nous sommes ravis de vous accueillir dans notre univers où les mots s'animent et où les histoires prennent vie. Que vous soyez à la recherche d'un roman poignant, d'une intrigue palpitante ou d'un voyage littéraire inoubliable, vous trouverez ici une vaste sélection de livres qui combleront toutes vos envies de lecture.
20,50 € Grand format 240 pages