Le pays où les rêves existent - 1947-1989 - Tome 3 : Le livre de Olivier Cojan

C'est avec "Le pays où les rêves existent" que se termine la formidable épopée des familles Franquin, Gautron, Cochereau, Gallac et les autres. Ils ont affronté les atrocités de deux guerres sur leur terre natale, 1914-1918 et 1939-1945, celles de deux autres plus lointaines, l'Indochine et l'Algérie, ainsi que la naissance de la V#7497; République. Ils ont traversé les bouleversements industriels avec leurs cohortes de grèves et de soulèvements populaires ainsi que l'embrasement de la jeunesse en Mai 68. Ils ont vécu de profondes transformations sociétales avec la dépénalisation de l'homosexualité, la légalisation de la contraception et celle de l'avortement, l'abolition de la peine de mort et enfin, la chute du mur de Berlin. La troisième génération de ces familles, astucieusement entrelacées, apporte un vent de fraîcheur et de renouveau dans un arc-en-ciel d'opinions politiques, sous le regard attentif, et quelquefois désabusé, d'Hubert et de Joseph, amis depuis l'enfance. Ils sont devenus les patriarches de cette grande lignée haute en couleur, décidée à laisser le passé derrière eux pour avancer en mordant la vie à pleine dent. L'ancien monde s'efface devant l'exubérance de la jeunesse et la modernité culturelle et sociale. Habilement, Olivier Cojan situe chacun de ses personnages aux endroits clés de l'Histoire. Ainsi, il rend le récit bien plus vivant que n'importe quel ouvrage sur le sujet, parce qu'on s'attache à chacun d'entre eux. Leurs qualités, comme leurs défauts, leur procurent une dimension si humaine qu'il est facile d'oublier que ce ne sont que des êtres de papier. Ayant vécu dans un petit village toute mon enfance, j'ai reconnu cette ambiance animée, quelques fois belliqueuse. Le départ "à la ville" pour les études et le retour au bercail de loin en loin, en me sentant devenir une étrangère. J'ai vu mon berceau se transformer au fil des ans, offrant un calme nostalgique et souvent douloureux, remplissant le cimetière d'une foule de visages amis devenus des fantômes de mon passé. Dans la dernière partie du livre, l'auteur décrit les incertitudes de Joseph concernant la rédaction d'une grande saga, en plusieurs tomes, un marathon romanesque greffé sur l'Histoire de France et de ses colonies au XX#7497; siècle, ayant pour titre "Un flâneur égaré dans l'histoire de son siècle". Magnifique, non ? Je pense qu'Olivier Cojan n'a pas eu besoin de chercher bien loin l'inspiration. Subtilement, il confie ses tourments devant l'ampleur de la tâche qu'il s'est donnée, ne voulant pas lasser son lectorat, tout au long de ces presque 3500 pages en trois tomes. Pour ma part, ce fut un immense plaisir que de parcourir le siècle, revivant l'époque évoquée par mes grands-parents, puis celle de mes parents et enfin, la mienne. Bourrée de références historiques, cette immense fresque familiale permet d'aborder les grands et les petits moments de notre histoire et de faire revivre ceux qui ont rejoint le néant de l'éternité.