À l'ombre de Winnicott : Le livre de Christian Niemiec, Ludovic Manchette

J'ai aimé cette lecture mais ce 3ème opus est celui que je situe en dernier, Alabama 1963 reste mon préféré de ce duo d'auteurs. Vous connaissez mon scepticisme face au côté mystique... Cette histoire bien qu'intéressante ne m'a donc pas totalement convaincue. Les liens qui se forgent entre George et Viviane sont beaux et l'aident à grandir et mieux appréhender le monde extérieur face à une mère craintive et protectrice. Tous personnages confondus il ressort de ce récit beaucoup d'amour et de bienveillance. L’écriture à deux mains est toujours aussi complémentaire et sans fausse note. Ce roman mêlant fantastique et surnaturel n'en reste pas moins touchant.

" Il y a beaucoup de monde ! " remarqua la visiteuse à peine entrée. Lucille compta. " Nous sommes huit. Neuf avec vous. – Je ne parlais pas des vivants. " Sussex, Angleterre, 1934. Alors qu'ils viennent d'emménager dans le manoir de Winnicott Hall, Archibald et Lucille Montgomery confient à Viviane Lombard, une Française à l'attitude et au franc-parler peu ordinaires, l'éducation de George, leur jeune fils aveugle. Tandis que la préceptrice et l'enfant apprennent à s'apprivoiser, un doute s'instille peu à peu chez eux comme chez tous les habitants de la vaste demeure, maîtres des lieux et personnel confondus, une présence invisible ne rôderait-elle pas entre les murs de la vieille bâtisse ?... Un manoir mystérieux, des personnages hauts en couleur, et une atmosphère gothique qui glace le sang, ce roman mêle fantastique et surnaturel avec brio. Attendez-vous à être immergé dans une histoire palpitante où les esprits du passé hantent chaque pièce. Bienvenue au manoir Winnicott avec la famille Montgomery et ses fantômes. Une histoire qui vous emporte des les premières pages, il faut avouer que la plume de notre talentueux duo est très envoûtante. Une intrigue très bien construite autour de personnages forts bien campés, fascinants et attachants, une atmosphère délicieusement oppressante, tous ces phénomènes étranges qui ne semblent pas s’inscrire dans une réalité scientifique établie… Au cœur de ce roman, il y a surtout les premières peurs, les émois de l’adolescence, la découverte de la vie, de ses joies et de ses peines grâce à un petit aveugle guidé par une femme tourmentée et malmenée par la vie. Un narrateur qui ne se dévoile qu’aux toutes dernières pages, qui nous fait vivre entre chaleur et frayeur, de manière très visuelle les tribulations d’une famille aux prises avec une réalité insaisissable ou les cauchemars et les fantômes s’entremêlent dans un effrayant ballet. Le rythme est soutenu, les rebondissements fréquents. Ludovic Manchette et Christian Niemec nous emportent dans leur magie, nous hypnotisent au fil des pages, à travers leur univers fait de vilains bruits, de visions étranges, d’objets qui bougent, des choses inexplicables qui traversent se roman et nous laisse frissonnant et haletant. Nos romanciers sont de merveilleux conteurs et nous offrent un grand théâtre de nos frayeurs et nos illusions, qui laissent une belle place à l’humour et une grande humanité. Un roman passionnant écrit à quatre mains, dont le magnétisme, la gravité, le spectacle, rappelle que la littérature est une littérature d’évasion. Quand le frisson et le plaisir se conjuguent à tout les temps. Un moment de lecture très plaisant. A lire absolument.

Bienvenue dans le Sussex,1934, Viviane arrive pour son nouveau travail de préceptrice dans le manoir de Winnicott auprès de la famille Montgomery. Viviane n'a pas les deux pieds dans le même sabot et elle ne manque pas de caractère. Le petit garçon de la famille, George, est atteint de cécité et dans cette grande demeure, il semblerait qu'une présence invisible sévisse et fasse de nombreux tours à ses habitants. C'est au cœur de cette vieille maison, en 1934, que la relation entre Viviane et George va naître, une relation qui ne laissera personne insensible. J'ai adoré cette lecture, c'est un gros coup de cœur. J'ai adoré les personnages et leurs caractères. George est un petit garçon intelligent qui croule sous le bon sens et qui a de la répartie. Viviane ne se laisse dicter sa vie et sa conduite par personne. Le personnel de maison est aussi hyper attachant. J'ai aimé l'histoire de cette famille, j'ai été touchée, j'ai rigolé par certains dialogues entre George et Viviane. Et puis tout ses phénomènes paranormaux (ou pas) qui sèment aussi le doute sur l'idée qu'on se fait de cette maison et de ses occupants, m'ont tenue en haleine. Je n 'avais qu'une envie : comprendre ce qui se tramait à Winnicott Hall, entre ceux qui sont hyper cartésiens, ceux qui sont convaincus que le manoir est hanté et George au milieu de tout ça qui ne peut que se fier à son instinct. C'est une lecture très fluide avec des dialogues qui valent le détour, un univers et des décors cinématographique à souhait. Si vous ne l'avez pas encore lu foncez !

Pour ce troisième roman, les auteurs font un virage à 360 degrés, aussi bien dans la localisation géographique que dans le thème. Souvenez-vous, leurs deux premiers romans se déroulaient aux Etats-Unis, celui ci nous emmène en Angleterre, dans le Sussex, en 1934 et dès les premières lignes on sent déjà un petit vent qui nous fait frissonner ! Le manoir de Winnicot est très joli, une vielle bâtisse qui a du abriter des générations entières, entourée d’un parc, d’arbres, il y a même un petit lac, on sent tout de suite que cette demeure a du cachet, une âme aussi et on finit par se dire que, peut-être, elle en a plusieurs ! Les Montgomery y ont posé leurs valises il y a peu, Archibald en est l’heureux héritier, il est archéologue et voyage beaucoup, c’est Lucille, son épouse qui se charge de le transformer en petit nid douillet, il y a beaucoup de travaux à réaliser, elle orchestre et les ouvriers réalisent. Lucille anime aussi un club de lecture où se réunissent quelques femmes de notables. Georges est leur fils, enfant de 10 ans très intelligent et vif, il manie l’humour à la perfection, il est doué pour les études, curieux de tout. Georges est aveugle mais ses autres sens sont parfaitement aiguisés. Sa mère se focalise trop sur son handicap, elle projette ses propres peurs sur l’enfant. C’est dans ce manoir que Viviane Lombard débarque un beau matin, un peu comme un cheveu sur la soupe parce que tout le monde a oublié qu’elle arrivait ! Elle est accueillie par le majordome, un certain Monsieur Talbott, que je déteste tout de suite parce qu’il n’est pas vraiment avenant. Il faut dire que Viviane Lombard n’a pas non plus fait d’efforts vestimentaires, elle est restée elle-même, un chapeau aux bords élimés, un manteau sombre trop grand pour elle, oh, on dirait qu’il est troué ? elle est pâle et cernée, tout cela détonne avec les belles toilettes de la maîtresse de maison ! ET là, tout de suite, oh pardon mais je pense à la publicité de M..D « venez comme vous êtes » bon nous sommes en 1934, le géant n’existait pas ! Viviane Lombard vient de France, elle est engagée comme préceptrice, c’est une femme très cultivée qui va instantanément plaire à Georges et il faut avouer que l’enfant va aussi la charmer par sa vivacité d’esprit. C’est donc une affaire qui roule, il appartient à Viviane, de prendre ses marques avec la famille, le manoir, mais aussi avec le personnel, deux soeurs, Pearl et Ruby qui s’occupent du ménage, une dame d’un certain âge répondant au nom de Mrs Dodds et qui dirige la cuisine d’une main de maître et bien sûr, l’inévitable Monsieur Talbott détestable à souhait, qui se prend pour le maître des lieux ! Ca en fait du monde, et visiblement, il y en a bien plus ! Oui il faut que je vous informe que dans ce manoir, il se passe des choses bizarres, une pièce cachée par une armoire, des visages qui apparaissent aux fenêtres dans la nuit, des murmures, des portes qui claquent toutes seules, des objets qui changent de place, tout laisse à croire que ce manoir est hanté mais par qui ? J’aime beaucoup cette ambiance Anglaise à la « Dowton Abbey » avec les domestiques qui mènent leur vie d’un côté, les maîtres des lieux de l’autre et il y a Viviane et Georges un peu dans leur monde a eux, un monde qu’ils se sont crées et qui finalement s’avère merveilleux et bienveillant. Le côté psychologique des personnages est très intéressant et Viviane Lombard est vraiment aux antipodes de tous ceux qui vivent dans la demeure, elle ne s’embarrasse pas de chichis, elle est directe, simple, elle aime la lecture et la nature, connaît énormément de choses, c’est une bouffée d’oxygène pour le petit Georges qui vit enfermé la plupart du temps. Archibald Montgomery semble ne vivre que pour son archéologie, ses voyages, ses trouvailles, ses objets insolites, il brille par son absence au domicile familial, ne voit pas son fils grandir. Lucille Montgomery tente d’apprivoiser sa solitude, elle organise des groupes de lecture, dirige les travaux du manoir, joue du piano. Elle est effrayée quand la nuit arrive, que tout est sombre et qu’un vent glacial s’infiltre dans les pièces alors que toutes les fenêtres sont fermées. Je n’ai pas été réellement effrayée par les entités diverses mais j’avoue que ce petit côté « manoir hanté », « fantômes » m’a bien plu, ça donne une ambiance pesante, feutrée, presque irrespirable et ça pimente l’histoire, même si je pense qu’elle n’en avait pas besoin, mais, c’est à la fin qu’elle prend tout son sens. Il y a beaucoup d’humour dans ce roman et de l’amour aussi, celui que Georges et Viviane se portent mutuellement, un amour fraternel qui ne cesse de croître et ne s’éteindra jamais. J’ai apprécié de voir évoluer les différents personnages au sein de ce manoir hanté, les évènements font que les différences sociales s’effacent, il n’y a plus ni maître, ni domestique, simplement une grande famille. J’ai même fini par apprécier le majordome, c’est dire ! Côté nature writing les auteurs ne sont pas en reste, je me suis régalée des balades autour du manoir, ce lac qui rappelle un terrible drame et qui attire comme un aimant, on a vraiment envie de s’y plonger, les arbres qui projettent des ombres étranges quand il fait beau et prennent des allures effroyables par jour de brouillard et toute cette faune et flore que Vivianne connaît par coeur et qu’elle décrit si bien à Georges. Quand le petit garçon peut toucher l’herbe, les fleurs, les animaux, ce sont des moments très prenants. La fin du roman est magnifique et pleine d’émotions, oui d’accord j’ai versé ma larme, je suis une grande hypersensible. J’ai beaucoup aimé le message véhiculé, la transmission, la continuité, l’avenir et cette amitié qui traverse le temps et même plus. J’ai passé un superbe moment de lecture, j’ai vraiment eu un coup de coeur pour ce roman.