La Fille du maître de Chai : Le livre de Kristen Harnisch

La fille du maître de chai, Sarah de son prénom, a dix-sept ans lorsque sa vie bascule. Son père décède, laissant derrière lui un vignoble endetté et une fille aînée sur le point de se marier à un vil individu, à la famille duquel la matriarche se résout à vendre le domaine, afin de s’affranchir de leurs difficultés financières. Quand la situation se gâte davantage, Sarah n’a plus le choix : elle doit fuir si elle veut préserver son avenir. Je n’ai absolument pas compris la pertinence du découpage initial de l’histoire. Le récit s’ouvre sur un prologue où la protagoniste, fraîchement débarquée en Amérique, avoue un meurtre dans le secret de la confession… … après quoi l’auteur nous ramène quelques mois en arrière, l’espace de trois-quatre chapitres, pour relater à vitesse grand V le déroulement des évènements ayant précédé l’incident, aisément reconstituables, du fait de l’introduction. Si l’objectif de cette dernière était de créer du suspense ou de la tension, c’est raté. Une simple chronologie littéraire y serait mieux parvenue, à mon sens, mais bon… Ce n’est pas moi qui ai écrit le livre. Et puis, je dis ça, mais la suite s’est révélée elle aussi globalement prévisible, en raison des personnages qui ont un instinct de survie digne de mon chat le jour où il s’est jeté par la fenêtre du premier étage pour tenter d’attraper une abeille (je vous rassure, il s’en est tiré sans une égratignure !) — Eh, et si on allait se réfugier en Espagne ? — Non, trop près, il vaut mieux que vous partiez loin. En Amérique — Eh, et si on allait se réfugier à l’adresse indiquée sur ce bout de papier que j’ai trouvé dans les affaires du type que je viens de tuer ? … — Zut, combien de chances y avait-il pour que je tombe sur la fille qui a été déshonorée par le propre frère du macchabé ? Ouf, celui-ci n’est à New York que provisoirement, il s’occupe d’un vignoble en Californie. … Eh ! Et si je partais pour la Californie, travailler dans un vignoble ? Zut ! Encore lui, mais quelle poisse ! S’ensuit un long passage où Sarah pleure qu’elle est fatiguée de fuir… Mais fuir quoi, bon sang ? Tu te jettes dans la gueule du loup à chaque fois, à se demander pourquoi tu n’es pas partie planter directement ta tente dans le jardin des Lemieux ! En plus de ça, elle ne rencontre jamais de réelles difficultés. Où qu’elle aille, elle est toujours bien accueillie, voire prise en charge (par les religieuses, les Chinois, Aurora…). De ce fait, et malgré les drames successifs qu’elle a connus, j’ai eu beaucoup de mal à la plaindre et à compatir à ses « malheurs ». Sa dimension Mary-Sue n’a pas aidé non plus. D’accord, elle a grandi dans un vignoble et se passionne pour la viticulture, mais de là à tout savoir, tout comprendre, tout anticiper en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, y compris (surtout) dans un pays où elle vient à peine de débarquer… Mouais, j’ai eu un peu de mal à trouver ça crédible. Nonobstant quoi j’ai beaucoup aimé le cadre viticole. C’est un univers qui me fascine, et même si je n’ai pas débordé d’affection pour Sarah (sans la détester non plus), j’ai adoré arpenter les vignes à ses côtés, à tel point que je regrette qu’on n’ait pas eu le droit à davantage de descriptions / une meilleure immersion. On sent que l’auteur maîtrise son sujet, qu’elle a dû faire quantité de recherches pour le mettre en scène, néanmoins elle aurait pu aller plus loin. Et pas qu’au niveau du vin. La politique, les militantes féministes, le droit de vote… J’ai eu le sentiment qu’on restait en surface de tout ce qu’elle souhaitait aborder, et c’est dommage. En résumé, je dirais que l’histoire n’est pas désagréable, qu’elle se lit vite et bien, en plus de traiter d’un domaine que j’apprécie énormément, mais tel un pinard moyen, elle manque de corps. De profondeur. Et l’héroïne, de bon sens, mais aussi de failles et d’imperfections. Je ne savais pas que ce roman était le premier volume d’une trilogie, je pensais qu’il s’agissait d’un one-shot, et quoique la fin soit rapide, elle se suffit à elle-même, en conséquence de quoi je ne me jetterai pas sur la suite. Si je la trouve, je la prendrai certainement ; autrement, je n’aurai pas vraiment de regrets.

Si vous avez apprécié étant petit les malheurs de Sophie, vous apprécierez ce livre. Une histoire pleine de rebondissement où on est pris dans l’intrigue, c’est compliqué de s’arrêter. J’ai hâte de lire la suite, pour suivre la suite des aventures.