Chez soi. Une odyssée de l'espace domestique : Le livre de Mona Chollet

Réflexion passionnante sur la dimension politique de nos logements, rédigée de façon très accessible dans une structure claire.

Je viens de refermer ce livre, assez dense, alors que je viens de passer deux semaines quasiment sans sortir de chez moi. Et ce fut un délice. Quoi de mieux donc que de confirmer ce ressenti avec cet essai de Mona Chollet, qui se qualifie elle-même également de « casanière » ? C’est le deuxième titre de l’autrice que j’ouvre, après avoir lu précédemment « Résister à la culpabilisation« . Je me suis sans doute plus retrouvée dans celui-ci qui explore véritablement tous les aspects qui m’intéressent dans l’habitat, moi qui aime particulièrement mon chez moi, le bichonner, y passer du temps, en profiter… Mona Chollet commence par explorer son propre rapport à l’habitation puis élargit sa réflexion. Pourquoi être casanier est-il donc socialement si mal vu ? Pour être bien, faut-il nécessairement avoir de l’espace ? Le graal de l’accès à la propriété est-il un piège ? Partir à la campagne ou rester en ville ? Et qu’en est-il du temps que la société nous laisse pour profiter de notre « chez soi » ? Car il y a le carcan du travail, les horaires à respecter, le temps volé passé à l’extérieur. Alors, on attend les soirées, les week-ends, les vacances… Comment nous délivrer de notre fébrilité et réapprendre à nous poser ? Et qu’en est-il donc de l’entretien de cet intérieur, du partage des tâches ménagères ? Comment trouver, inventer, la maison idéale ?… Les réflexions de Mona Chollet dans cet essai sont passionnantes. Mais la première édition date de 2015 et à la lecture il est évident que certaines choses sont apparues depuis : le confinement, l’explosion du télétravail. Le « chez soi » a pris depuis une autre envergure. Il est moins mal vu d’avoir envie de rester à la maison, le télétravail est devenu une norme. J’ai particulièrement aimé toute la partie dans laquelle Mona Chollet revient sur la construction des journées de travail telles que nous les connaissons aujourd’hui, quelques siècles plus tôt, à quel moment il a été décidé de trancher ainsi nos vies et celles de nos enfants. Ce qui nous paraît naturel de nos jours ne l’est sans doute pas tant que cela. Un essai qui donne envie d’apprécier son « chez soi » et apporte un regard également plus large sur l’architecture et l’organisation de notre société.

J'avais adoré Sorcières alors lorsque j'ai vu que Mona Chollet avait écrit une ode au rester chez soi, j'ai foncé sans me poser de question. Je ne me considère pas comme une grande casanière mais à l'âge où on commence à se poser les questions typiques "location ou achat", "ville ou campagne", "appartement ou petite maison" les notions de foyer résonnent particulièrement. Mona Chollet aborde tous ces aspects là, requestionne la définition du logement salubre, l'importance d'avoir un refuge, jusqu'au "foyer prison" lorsque les tâches ménagères nous incombent "naturellement" (tiens, un écho à Sorcières). J'ai moins aimé les dernières pages sur l'architecture mais globalement j'ai retrouvé une qualité d'écriture et un livre dense et intéressant.

Tous les écrits de cette autrice sont une valeur sûre, et cet essai ne fait pas exception. L'approche de Mona Chollet pour aborder un sujet est toujours très bien pensée et incite à une réflexion approfondie sur le thème de départ. Réfléchir à son intérieur, à son foyer ou à son chez-soi, c'est nécessairement entamer une introspection sur sa propre nature et son rapport à son environnement. Ces questions sont profondément personnelles, car chacun façonne son espace de vie pour qu'il reflète sa personnalité, ses aspirations et ses engagements. Le lien est aisément établi entre la manière d'habiter nos intérieurs et le fait qu'il s'agit d'un acte politique. En effet, nos perceptions en disent long sur nos individualités et sur les sociétés dans lesquelles nous évoluons.