Emma : Le livre de Jane Austen

Orpheline de mère, Emma Woodhouse vit dans la plus belle demeure d’un petit village de la campagne anglaise en compagnie de son père aimant et permissif qui ne cesse de faire son éloge. Convaincue d’être celle qui a arrangé le mariage de son ancienne gouvernante, Mrs Weston, Emma souhaite poursuivre son rôle d’entremetteuse en prenant sous son aile, Harriet Smith, une jeune orpheline, au pedigree inconnu, pour la marier à un bon parti. Mais, elle manque profondément de discernement et accumule les erreurs. Si l’on retrouve encore les thèmes de prédilection de Jane Austen, cette dernière nous offre, à chaque nouveau roman, une histoire et une héroïne très différentes. Emma n’a jamais connu la moindre peine ni le moindre obstacle dans sa vie. Sa vanité lui fait croire qu’elle comprend tout du monde qui l’entoure et en manipule les rouages, alors même qu’elle est aveugle à ce qui se trame devant elle. Le seul à lui signaler ses erreurs est Mr Knightley, un ami et voisin de longue date. Jane Austen dénonce l’éducation défaillante de son héroïne qui a manqué d’un cadre lui permettant de valoriser ses facultés intellectuelles ainsi que d’un entourage stimulant. En effet, Emma est dotée d’un esprit vif mais a toujours agi à sa guise, sans grande discipline. Jouer les marieuses est l’une des rares activités stimulantes qu’elle a trouvée pour tromper son ennui dans le monde minuscule où elle évolue. Ce microcosme est peuplé de personnages secondaires savoureusement ridicules. Une spinster extrêmement volubile mais terriblement attachant dénommée Mrs Bates, un prêtre qui ne pense qu’à s’élever au-dessus de sa condition, un père (celui d’Emma) hypocondriaque qui s’effraie au moindre courant d’air et ne cesse de vanter les bienfaits du gruau, une mère qui ne peut se passer de son fils au péril de sa vie, et tant d’autres. A travers les personnages de Mrs Weston et Jane Fairfax, Jane Austen évoque à nouveau la nécessité pour les femmes « mal nées » de faire un bon mariage ou de travailler comme gouvernante. Leur situation est d’autant plus soulignée au regard de la condition enviable d’Emma « dont la situation sociale et mondaine et l’état de sa fortune la prévalent des affres de la situation de vieille fille pauvre » et peut se permettre de signifier haut et fort qu’elle ne veut pas se marier. Si le roman est ponctué de nombreuses longueurs assez lassantes, j’ai toutefois adoré le suspens, distillé au fil du récit, autour de l’énigmatique Jane Fairfax, qui apporte du rythme et nous mène sur de fausses pistes. Certains ont d’ailleurs qualifié « Emma » de « roman policier sans meurtre ». J’ai beaucoup aimé le personnage de Mr Knightley, gentleman honnête, fidèle et serviable. S’il n’a pas la verve de Mr Darcy, il est néanmoins doté d’une patience redoutable et est capable d’aimer Emma tel qu’elle est, sans la mettre sur un piédestal. Pas de passion intense mais un amour sincère et durable. C’est grâce à lui et à ses expériences désastreuses qu’Emma deviendra une jeune femme plus mature et humble.

Je prolonge ma plongée dans l'univers de Jane Austen au travers du roman Emma. La jeune Emma vit avec son père âgé et hypocondriaque au sein du domaine familial. elle fait voeu de rester célibataire tout en jouant les entremetteuses entre les personnes de son entourage. Elle prend également sous son aile une jeune femme de rang social intérieur au sien et tente de promouvoir ses qualités pour lui trouver un bon parti. Au travers de ces stratégies sentimentales, Jane Austen dresse une critique de la société de son époque fort intéressante. Comme toujours avec cette auteure, la plume se fait parfois plus acide mine de rien. Emma est ainsi orgueilleuse. Elle se veut stratège et fine connaisseuse de l'âme et de la psychologie alors qu'elle se trompe le plus souvent dans ces analyses. C'est encore une fois un excellent roman.

Sacré personnage que cette Emma , imbue de son statut social, persuadée de savoir ce qui est bon pour les autres, marieuse-manipulatrice , envieuse , bref une peste . Sous couvert de vouloir apparier les unes et les autres et de comprendre les non-dits amoureux cette jeune femme se mêle de tout et de tous mais ne voit pas plus loin que le bout de son nez . Au travers de ses pérégrinations c'est tout un monde de castes, de convenances, de subordination que l'on voit s'agiter autour de la notion si importante à l'époque de mariage et c'est un régal. Elle n'est pas vraiment méchante cette Emma , elle peut même se rendre compte de ses erreurs et l'admettre , elle ne sait sans doute quoi faire d'autre pour occuper son esprit et il est vrai que les ouvertures sont limitées ...au mariage. Une agréable lecture mais pas mon roman préféré de cette autrice.

J’avais lu plusieurs fois « Orgueil et préjugés » mais jusqu’ici pas d’autres œuvres de Jane Austen. C’est chose faite avec « Emma » qui s’avère une excellente lecture. Emma occupe toutes les pages de ce pavé. C’est une héroïne qui prend tout l’espace du récit. Il faut dire qu’elle bénéficie d’une caractérisation soignée et singulière. Emma est loin d’être lisse. De prime abord, elle peut même sembler peu sympathique. Elle a de vilains défauts, elle est butée, trop sûre d’elle, parfois à la limite de l’arrogance…. Pourtant on finit par s’attacher à elle. D’abord parce que ces défauts la rendent très humaine, très vraie. De plus, elle a un véritable arc narratif, reconnaissant finalement ses erreurs. Attachante aussi parce qu’elle est une jeune femme affirmée qui ose dire ce qu’elle pense, qui fait des choix, une femme libre en somme. Mais si Emma est une femme libre de choisir, c’est parce qu’elle peut se le permettre. Comme souvent chez Jane Austen, la légèreté n’est qu’une apparence. J’ai l’impression que les récits de l’auteure ne sont jamais anodins. Derrière la romance se cache un propos comme si la comédie de mœurs acide se drapaient de légèreté pour mieux aiguiser la peinture sociétale qui transparait. Dans « Emma », il est beaucoup question de classes sociales, de conventions sociales. A ces qualités liées au fond et à la caractérisation de l’héroïne, s’ajoutent les qualités stylistiques d’Austen. Son écriture est très agréable, fine et élégante, vive et subtile. Le propos est dans le fond acide mais l’auteure garde une tonalité légère. Il y a beaucoup d’humour, beaucoup de tendresse aussi. Cette seconde lecture me conforte dans l’idée de lire d’autres romans de Jane Austen, ce que m’encourage à faire ma fille qui les a tous dévorés en quelques semaines.