La Prisonnière : Le livre de Marcel Proust
Alors qu'il songe à la quitter, le Narrateur retient Albertine en secret dans son appartement parisien.
Il ne l'aime plus, mais sa jalousie lui survit. Dans un climat étouffant et l'obsession de s'approprier sa vie, il la fait espionner, la surveille comme un avare son trésor et la torture de soupçons.
Se rend-il compte du vampirisme moral qu'il exerce sur elle, du supplice qu'il s'inflige à lui-même, au cours de cet affrontement épuisant entre la victime et son bourreau, entre la captive et son geôlier ?
Cette névrose, cette hantise de possession mentale et spirituelle sans issue, c'est l'amour selon Proust.
LES GRANDS TEXTES DU XXe SIÈCLE
De (auteur) : Marcel Proust
Expérience de lecture
Avis Babelio
cegeglyx
• Il y a 1 an
Pour ce tome, le titre dit tout, c'est le calvaire d'Albertine poursuivie par les assiduités du jeune Marcel qui la traque et la surveille. Evidemment même si le scénario tient sur un confetti, ça vaut quand même le coup d'être lu, puisque, selon son habitude, M. Proust nous fait entrer dans un degré de détail qui confine au microscope.
berni_29
• Il y a 1 an
Je ne soupçonnais pas un seul instant que Marcel Proust saurait m'inviter avec tant d'acuité et d'émotion dans les chemins délicieux et tortueux de l'amour. La Prisonnière, cinquième opus d'À la recherche, invite Albertine à entrer dans la vie du narrateur. Albertine, c'est celle qui fut jadis et il n'y a pas si longtemps encore jeune fille en fleur, si souvent présente dans cette grande oeuvre, personnage insaisissable permettant de révéler toutes les vicissitudes de l'amour, le désir, le vertige, le bonheur des premiers jours, l'ombre de l'amour pour dire en d'autres mots la jalousie, puis la séparation. Au milieu il y a souvent la désillusion. Dans la Prisonnière il me semble avoir soulevé un rideau, - ou pour ne pas dire un drap, et découvert ce sentiment amoureux que nul autre écrivain ne sait mieux que Proust imaginer, rêver, espérer avec tant de beauté et d'invention dans les mots. Proust a aimé, Proust a été aimé, cependant s'agissant de l'être féminin dans l'univers sentimental et amoureux de Proust, nous savons si peu de chose... En tous cas, j'en sais si peu... Et je suis venu avec cette candeur dans ce très beau texte qui m'a surpris. Si venant de loin le réel de l'amour nous fascine, quand il est présent, parfois on n'en mène pas large. Il y a sans doute chez Proust l'idéal d'un amour sublimé pour lequel la féerie dépérit à l'approche du quotidien. Le narrateur s'est s'en doute maintes fois étonné tout au long du récit, se demandant par quel sortilège le désenchantement de l'amour peut venir aussi abruptement qu'il était venu dans l'imaginaire et nous avait tant obsédé. Car Marcel Proust est un écrivain de l'imaginaire, capable de sublimer cependant ce que le réel a de possible en lui, dans sa gangue insolite et si mystérieusement ordinaire, c'est donc aussi un écrivain du réel d'une autre manière, un réel qui se dérobe sans cesse. En ce sens, La Prisonnière est un magnifique texte sur l'amour, mais qui demeure malgré tout étranger à nos vies, par lequel des mots m'ont touché, fortement parfois, mais, comment vous dire, je me suis senti extérieur à ce que je voyais, à ce que je lisais, c'était un monde que j'observais extérieur à lui, le décor étranger à ma vie qui passait devant moi. Il n'en demeure pas moins une musique, celle d'une mélancolie ordinaire qui devient sublime lorsque le réel prend le chemin fugace de l'extase en se métamorphosant en souvenir. Est-ce le sort de l'amour ? Et chez Proust, cela se traduit dans le sentiment cruel de la séparation. Dans la Prisonnière, Albertine incarne ce sentiment éblouissant, confus, tourmenté. Albertine, c'est la femme qui est partie, n'est plus la même que celle qui était là. Tout est dans cette variation. La Prisonnière exprime peut-être aussi le besoin ultime de Proust d'être aimé, mais qu'en sais-je au juste ? Toutes les variations de l'amour sont pourtant bien là, comme si je les connaissais par coeur, pourtant je découvre ces mots comme un novice. Mais puisque vous me demandez mon avis, je ne partage pas du tout cette vision de l'amour développé ici par Proust qui tient plus d'une représentation de l'amour que de quelque chose de vécu. C'est dans un huis-clos parisien que cet amour va s'exprimer pour notre plus grand plaisir de lecteur. Albertine en deviendra la prisonnière. Les mots fusent comme une sorte de jouissance électrique, mouvements ondulatoires autant harmonieux que contradictoires entre les corps et les âmes, - chez Proust il faut imaginer ce que nous ne voyons pas. Chez Proust, j'ai l'impression que l'ambivalence de l'amour est un jeu entre l'absence et la présence. Chez Proust, j'ai l'impression qu'il n'y a pas d'amour heureux. Or, je crois profondément le contraire. Dans La Prisonnière, tout est dit entre l'attente et la séparation, le narrateur perdant la personne aimée au moment de l'étreinte, disant l'échec de l'amour contenu dans l'attente, disant la joie de posséder ce qu'on aime plus grande encore que l'amour. Aussi, je n'ai pas adhéré à cette vision qu'a Proust de l'amour, ou du moins celle que j'ai cru deviner ici, celle de proposer un chemin où la liberté de l'autre est peu au rendez-vous du chemin, cette idée de réclusion, d'exclusion, attacher un être à un autre que par le seul souci ou la seule préoccupation de le soustraire au désir des autres et aux occasions qui risquent d'éveiller son propre désir. Mais j'ai cependant totalement adhéré à sa manière d'aborder le réel en le conjuguant avec ce sentiment d'amour. La Prisonnière, c'est la recherche d'un bonheur impossible, altérée par cette jalousie qui devient le beau sujet du roman. L'amour s'accompagne alors du tourment qui l'entretient. Mais peut-on dire que la jalousie est une altération de l'amour alors qu'elle pourrait être au contraire saisie comme une preuve flagrante et viscérale de cet amour ? La jalousie ici fut autant le vertige d'un désir que la servitude d'un enfermement. J'ai été emporté par une structure narrative complexe et captivante. Il me semble en être revenu de ses méandres enfin pour vous en parler. Comme souvent, la musique ici est encore présente, mélodie berçant le récit, je crois entendre ce soir la sonate de Vinteuil, dont les notes portent encore la mémoire d'une émotion, mieux que les voix, mieux que les regards, mieux que les mots pour le dire, mais je ne suis pas sûr que tout ceci soit bien réel. Je conclurai mon billet par cette citation de Nicolas Grimaldi, dans Proust, les horreurs de l'amour : « Il faut que le réel devienne aussi irréel que s'il était imaginaire pour nous procurer l'intense sensation de réalité que nous en attendions. Aussi semble-t-il au narrateur avoir sauvé sa vie lorsqu'il la sent enfin aussi intensément que si un roman la lui faisait imaginer. » Si venant de loin le réel de l'amour nous fascine, de près il me fascine encore plus chaque jour.
Marti94
• Il y a 1 an
Je l'ai déjà dit mais j'ai envie de me répéter, je ne me lasse pas de la Recherche du temps perdu de Proust et ce cinquième volume ne fait pas exception d'autant plus qu'il y a une nouveauté. Et oui, c'est la première fois que le narrateur est identifié et qu'il se prénomme Marcel. Au cas où on aurait eu des doutes, le voile est levé. Dans "La prisonnière" on retrouve Albertine que l'on connaît depuis "A l'ombre des jeunes filles en fleurs". Elle a fait battre le cœur du jeune narrateur à Balbec et lui inspire depuis des sentiments contradictoires, entre le désir et la jalousie, sujet central du roman. Car Marcel a peur de Gomorrhe. Jolie façon de dire qu'il pense qu'elle est lesbienne. Il lui propose donc de vivre avec lui à Paris pour l'avoir sous sa coupe la soupçonnant d'avoir des relations avec son amie Andrée ou Melle Vinteuil, la fille du musicien qui a composé la fameuse sonate qui porte son nom. Notre héros fréquente toujours les salons où l'on parle le langage du grand monde alors qu'Albertine est d'un milieu modeste et n'a pas d'argent. Pour autant, elle est intelligente et s'instruit en lisant ses livres. Il faut dire que la littérature et les arts (le théâtre, la musique...) ont une place importante dans l'œuvre de Proust. Mais pour illustrer ce choc des cultures, il n'hésite pas de considérer l'aristocratie plus décadente que les autres classes sociales, avec humour. Et s'il fréquente toujours Mme Verdurin, M. de Charlus qui "en est" et toute une clique d'aristocrates, il sait aussi décrire la ronde des petits métiers du début du 20ème siècle et l'appel des marchands des quatre saisons. Difficile de faire bref avec Marcel Proust car il décortique tout ce que dit ou fait Albertine et part dans des descriptions impressionnantes sur la jalousie dont il souffre jusqu'à avoir comme obsession de la soustraire au désir des autres, d'où le titre du livre. Entre ses sentiments, ses réflexions sur les mystères de la mort, ses superbes descriptions érotiques du sommeil d'Albertine Marcel Proust est vraiment impressionnant par sa prouesse littéraire. Et puis, j’ai un attachement particulier à ce volume (il est difficile de les noter individuellement car ils forment un ensemble indissociable) car j’aime beaucoup la fin qui m’a agréablement surprise. Challenge Pavés 2024 Challenge Cœur d'artichaut 2024 Challenge Multi-défis 2024 Challenge XXème siècle 2024
Errant
• Il y a 1 an
Je trouve le titre de ce tome trompeur, car, bien plus qu’Albertine, je crois que c’est plutôt le narrateur qui est le réel prisonnier de cet épisode. Enfermé dans sa jalousie maladive, dont les causes peuvent être imaginaires (le saurons-nous un jour?), cloîtré dans sa chambre par peur de sortir avec sa belle, tiraillé par l’alternance de ses sentiments, obsédé par une rupture éventuelle qui ne serait pas de son fait, il me semble pris dans un joyeux carcan. Alors qu’Albertine, elle, sort à gauche et à droite avec Andrée, se fait conduire par un chauffeur louche qui alimente les craintes du narrateur, pige à satiété dans la bibliothèque de son geôlier, se fait offrir moult cadeaux, des robes à profusion, bref vit une vie princière en échange de bien peu : des conversations occasionnelles avec le narrateur, un peu de batifolage nocturne et subir, à peine, la mauvaise humeur de Françoise. Une prison, si c’en est bien une, plutôt dorée. . . Quant au reste, comme toujours, il y a des passages qui m’ont transporté, ébloui, celui où il décrit son écoute de la pièce d’Auteuil chez les Verdurin notamment, mais aussi toutes ces réflexions sur l’amour, la souffrance et la jalousie, thèmes récurrents du livre. La scène du désarroi de Charlus suite aux intrigues des Verdurin m’a aussi particulièrement touché. Par contre, j’ai été étonné du nombre d’incohérences, des personnages morts qui reviennent quelques pages plus loin, Françoise qui devient Céleste Albaret, etc. Surpris aussi lorsqu’il s’adresse directement au lecteur, ce qui nous sort, brièvement, mais drastiquement, du fil de la narration. Au total un tome que j’ai bien aimé et qui incite à se plonger sans trop attendre dans la suite des choses.
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Classiques et Littérature , Littérature Classique
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- EAN
- 9782266342834
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- Collection ou Série
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- Format
- Poche
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- Nombre de pages
- 544
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- Dimensions
- 178 x 110 mm
Nous sommes ravis de vous accueillir dans notre univers où les mots s'animent et où les histoires prennent vie. Que vous soyez à la recherche d'un roman poignant, d'une intrigue palpitante ou d'un voyage littéraire inoubliable, vous trouverez ici une vaste sélection de livres qui combleront toutes vos envies de lecture.
7,70 € Poche 544 pages