Les suppliciées d'Appoigny : Le livre de Sabrina Champenois
Janvier 1984. À Appoigny, petit bourg de l'Yonne à quelques kilomètres d'Auxerre, une jeune femme de 18 ans parvient à s'échapper de l'enfer dans lequel elle vit depuis trois mois. À la police, elle raconte : un couple en apparence ordinaire, Claude et Monique Dunand, l'a séquestrée dans la cave de leur pavillon, où elle a subi viols et tortures à caractère sexuel. De la part du maître de maison mais aussi d'une trentaine de " clients ", des hommes qui payaient pour lui infliger ces sévices. Elle en porte les stigmates. Et Huguette alerte: une autre fille, Mickaëlla, est encore prisonnière, et en grand danger. Comme Huguette, elle a été recrutée par le couple via une offre d'emploi ; comme Huguette, elle est pupille de la DDASS. De ces jeunes femmes, Claude Dunand savait que leur disparition n'inquièterait pas grand monde, voire personne. Lors de sa fuite, Huguette a eu la présence d'esprit d'emporter des photos et des carnets de Dunand. Pourtant, lors du procès qui se déroule à Auxerre fin 1991, et malgré une longue instruction, les accusés ne seront que trois dans le box. Car entretemps, les carnets, pourtant mis sous scellés, se sont volatilisés.
Le verdict tombe : Claude Dunand est condamné à perpétuité. Mais, sans période de sûreté, il sera libéré dix ans plus tard.
Après le procès, plusieurs témoins liés à l'affaire vont mourir dans d'étranges circonstances, et Pour Huguette et Mickaëlla, c'est la double peine. Comment expliquer ces anomalies ? Bientôt, la rumeur enfle: Claude Dunand a parlé d'une " organisation ", de clients haut placés, de notables. Des individus qui auraient eu grand intérêt à adoucir sa peine, en échange de son silence. Et Dunand ne serait-il pas lié à Emile Louis, le boucher de l'Yonne, plus tard condamné pour l'assassinat de sept jeunes femmes placées à la DDASS ?
De (auteur) : Sabrina Champenois
Expérience de lecture
Avis Babelio
blackbookspolar
• Il y a 2 mois
Parfois, un livre ne se lit pas. Il se traverse. Il se prend en pleine poitrine. Il bouscule nos repères, notre confort de lecteur, notre besoin de fiction. C’est exactement ce que m’a fait vivre Les Suppliciées d’Appoigny, un True Crime signé Sabrina Champenois, journaliste au journal Libération que j’ai eu la chance de rencontrer au festival Quais du Polar. Une rencontre marquante : J’ai donc découvert Sabrina Champenois à Lyon, lors du festival Quais du Polar, et cette rencontre a profondément résonné en moi. Passionnée, engagée, vibrante de sincérité, elle m’a parlé de son livre avec une intensité rare. J’ai su que je le lirais… même si je pressentais que ce serait difficile. Première plongée dans le True Crime C’est une première pour moi. Je n’avais jamais lu de True Crime, ce genre narratif entre littérature et journalisme, où les faits réels priment sur la construction romanesque. Pas d’artifices ici. Pas d’évasion. Juste la brutalité du réel, la violence crue des faits, l’horreur nue d’un procès ubuesque. J’ai mis du temps à entrer dans cette forme. Parce que j’en avais besoin. Parce que la vérité y est brute. Dérangeante. Terrifiante. Huguette et Mickaëlla. Deux jeunes femmes, pupilles de la DDASS. Deux victimes d’un système défaillant. Séquestrées, violées, torturées, vendues. Et pourtant, encore debout. Ce sont elles les héroïnes silencieuses de cette affaire qui glace le sang. Ce qu’elles ont vécu dépasse l’entendement, et pourtant, Sabrina Champenois parvient à en parler sans tomber dans le voyeurisme. Elle nomme. Elle expose. Elle met à jour l’indicible, parce qu’il le faut. Pour que nous sachions. Pour que ces voix ne soient pas enterrées sous l’oubli ou l’indifférence. Parce que ce qu’elles ont subi ne peut rester impuni dans les mémoires. Les bonnes et les « moins bonnes raisons » de lire ce livre : Les bonnes raisons : Pour sortir de sa zone de confort littéraire et comprendre ce qu’est le genre True Crime. Pour rendre justice à des victimes qu’on a trop longtemps fait taire. Pour la rigueur et la sobriété du travail journalistique de Sabrina Champenois. Parce que c’est un livre qui remue, qui réveille, qui dénonce. Les moins bonnes raisons : Si vous cherchez une lecture qui vous divertira ou vous fera « oublier le monde », passez votre chemin. Si vous êtes sensibles aux récits de violence sexuelle, ce livre peut être extrêmement éprouvant. Si vous aimez les narrations très romancées, vous serez désorienté par la froideur clinique de certains passages. Si vous attendez une forme de résolution ou de justice réparatrice, vous risquez de sortir frustré et en colère. En bref : Je ne me sens pas légitime à « noter » ou « juger » un tel livre. Ce n’est pas une fiction. Ce n’est pas un thriller noir. C’est un document, un cri, une plaie béante de notre histoire récente. Et même si ce n’est pas un genre fait pour moi, je suis heureuse de l’avoir lu. Parce qu’il m’a rappelé que certaines lectures sont là pour témoigner, pas pour plaire. Merci à Sabrina Champenois pour son courage, son intégrité, et pour avoir donné une voix à celles qu’on a voulu faire taire.
Des_Mondes_et_des_Mots
• Il y a 2 mois
Après nous avoir emportés avec la collection True Crime, les éditions 1018 s’associent avec Libération pour lancer une déclinaison consacrée aux faits divers français. Ce premier volume commence d’ailleurs sous les meilleurs auspices avec une citation du magnifique roman "Fay" de Larry Brown. Il revient sur l’évasion, en janvier 1984, d’une jeune femme qui appelle à l’aide, expliquant qu’elle a été séquestrée, torturée et violée pendant plusieurs mois au 12 allée des Violettes, à Appoigny. Trois jours plus tard, une descente de police mène à la libération d’une seconde jeune femme et à l’arrestation de Claude et Monique Dunant qui avouent tout, transformant une petite ville de province sans histoire en repère du diable. J’ai trouvé le texte bien écrit, avec une élégance qui n’enlève rien à la précision journalistique ; petit bémol toutefois avec les nombreux allers-retours entre les aveux de 1984 et le procès de 1991 qui ne sont pas toujours clairs. D’autant plus qu’il faut y ajouter le récit d’étonnantes défaillances du tribunal d’Auxerre qui brouillent un peu plus les pistes. La multiplication des affaires ayant pour victimes des enfants de la DDASS dans la région (Emile Louis et Pierre Charrier notamment) inquiète alors que le Conseil Supérieur de la Magistrature révèle que « ´le taux d’élucidation des affaires criminelles relatives aux filles disparues dans l’Yonne est de 0,00%’ alors que le ‘taux moyen en France est de 79,16%´ » (p. 98). Ce chiffre affolant met en lumière « l’industrie des nourrices », le « commerce du placement » (p. 159) qui permet, depuis le XIXe siècle, à des familles d’accueil d’exploiter les enfants placés chez elles.
The_little_green_book
• Il y a 2 mois
Deuxième roman acheté suite à la rencontre organisée par les Editions 10/18 et la librairie Le comptoir des mots. J’ai trouvé les explications de Sabrina Champenois passionnantes, la genèse du livre, ses choix d’écriture, les difficultés rencontrées mais aussi son empathie pour les victimes. Elle a d’ailleurs tenu à ce que le titre du livre mette en lumière les victimes et non les bourreaux. Au cours de cet échange, l’autrice est revenue à plusieurs reprises sur d’autres faits divers ayant marqué la région d’Auxerre. Je ne m’attendais pas à ce qu’ils occupent une place aussi importante dans le récit, ce qui explique pourquoi cette lecture me laisse un sentiment mitigé. Avec un titre comme celui-ci, je pensais que l’histoire serait principalement centrée sur Huguette et Mickaëlla, sur le couple Dunand, sur le procès. Les premières pages sont très difficiles à lire, comment peut-on faire subir de tels sévices à quelqu’un, comment peut-on s’en sortir après une épreuve pareille. Ensuite on découvre les dysfonctionnements de la justice, les potentiels arrangements pour étouffer certains faits. C’est vraiment révoltant de se dire que certaines personnes ont pu échapper aux sanctions car elles étaient haut placées. C’est donc une lecture en demi-teinte pour moi car souvent trop éloignée du sujet principal mais n’hésitez pas à vous faire votre propre avis.
Iaoranamoana
• Il y a 2 mois
Lire ce livre rappelle un fait, qui est devenu pour moi une boussole personnelle et professionnelle : nous sommes, en tant que société, responsables de ce qui est fait aux plus vulnérables d'entre nous. Sans parler de protection de puissants hommes, hypothèse décrite dans une partie du livre et défendue par les concernées elle-mêmes, nous sommes là face à une caste d'adultes face à deux jeunes femmes très vulnérables, tout juste majeures. Ce sont ces hommes qui ont dédaigné leur parole car elles étaient, au départ, seules face à l'enfer. Ce sont ces "sorties sèches" qui sont validées par notre société, poussant ces jeunes adultes dans les bras de l'enfer : la rue, l'adduction, la prostitution...Appoigny. Hier Appoigny, aujourd'hui encore les hôtels sociaux sordides. Je retiendrais ces quelques mots de la discussion très intéressante que j'ai eu avec l'autrice : Au fond, tout le monde s'en fout.
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Actualités et Société , Reportage & Document
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- EAN
- 9782264085665
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- Collection ou Série
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- Format
- Poche
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- Nombre de pages
- 208
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- Dimensions
- 179 x 109 mm
Nous sommes ravis de vous accueillir dans notre univers où les mots s'animent et où les histoires prennent vie. Que vous soyez à la recherche d'un roman poignant, d'une intrigue palpitante ou d'un voyage littéraire inoubliable, vous trouverez ici une vaste sélection de livres qui combleront toutes vos envies de lecture.
8,30 € Poche 208 pages