« Ce jour-là, Dennis Fritz fut arrêté à Kansas City, chez sa tante, avec laquelle il vivait à l'époque, et emmené jusqu'à la petite salle d'interrogatoire du poste de police voisin. Là, Smith et Rogers lui lurent ses droits puis annoncèrent qu'ils attendaient de lui qu'il passe aux aveux. Smith était le gentil, celui qui voulait aider, vraiment. Rogers, lui, fut instantanément grossier – jurant, menaçant, provoquant. Ils savaient depuis longtemps, lancèrent-ils, que Williamson et Fritz avaient violé et tué Debbie. Mais maintenant, c'était sûr. Tout ce qui leur manquait, c'était des aveux. « Je n'ai rien à avouer », répétait Fritz encore et encore. « Quelle preuve avez-vous ? Montrez-moi une preuve. »
La réponse favorite de Rogers était : « Tu insultes mon intelligence ! » Chaque fois, Fritz était tenté de demander : « Intelligence ? Quelle intelligence ? » Mais il préférait éviter les coups.
Fritz se rappelle qu'au bout de deux heures d'insultes, il finit par lâcher : « D'accord. Je vais avouer. » Les flics ont paru soulagés ; comme ils n'avaient pas de preuve, ils devaient obtenir des aveux pour boucler l'affaire. Smith se démena pour dénicher un magnétophone. Rogers sortit son calepin et son stylo. Allons-y…
Quand ils furent tous installés, Fritz regarda le magnétophone et dit : « Voilà la vérité. Je n'ai pas tué Debbie Carter et je ne sais rien du meurtre. »
Fritz se souvient que Smith et Rogers devinrent fou, – encore des menaces, encore des insultes… Fritz était tétanisé, mais il tint bon. Il maintint sa déclaration d'innocence, et finalement ils terminèrent l'interrogatoire.
« À Ada, plus tard ce même jour, Ron Williamson fut conduit depuis la prison jusqu'au poste de police pour un nouvel interrogatoire. Smith et Rogers, qui venaient d'arrêter Fritz, l'attendaient. Leur objectif était de le faire parler ; Smith, domicilié à Ada, était remplacé par l'agent de l'OSBI Rusty Featherstone, domicilié à Oklahoma City. Ils décidèrent de ne pas filmer l'interrogatoire. Responsable de l'enquête pendant plus de quatre ans et persuadé pendant tout ce temps-là ou presque de la culpabilité de Williamson, Smith n'en assistait pas moins à cet interrogatoire crucial.
La police d'Ada était bien pourvue en matériel d'enregistrement audio et vidéo. Elle s'en servait fréquemment. Les interrogatoires, surtout les passages aux aveux, étaient presque toujours filmés. Les policiers étaient conscients de l'impact d'une cassette vidéo sur les décisions d'un jury.
Quand les aveux n'étaient pas filmés, ils étaient enregistrés. La police avait à sa disposition quantité de magnétophones.
Quand ils n'étaient ni filmés ni enregistrés, on demandait au suspect d'écrire sa version personnelle des faits, s'il en était capable. Si le suspect était illettré, un policier écrivait la déposition, la lui lisait et lui demandait de signer.
Aucune de ces méthodes ne fut employée ce 9 mai 1987. Williamson, pourtant plutôt instruit et possédant un vocabulaire bien plus étendu que ses interlocuteurs, regardait Featherstone prendre des notes…