« L'analyse de la violence criminelle forme un vaste corpus des sciences sociales. A la mesure de la fascination plus ou moins morbide qu'elle suscite; de nombreux chercheurs et romanciers ont tenté de saisir ce qui agite au fond de lui-même l'exécuteur, le bourreau, le complice de la torture ou l'individu soumis à l'autorité. Étrangement le contechamps de la violence - le refus obstiné d'y recourir - reste flou, comme si le passage à l'acte suscitait plus de curiosité que le fait de s'y soustraire. Il se cache pourtant autant de mystère dans ce refus discret de la violence que de haine dans l'état furieux qui y mène. C'est le grand mérite de l'anthropologue Philippe Breton, spécialisé dans l'étude de la parole, que de tenter de définir les contours psychologiques de ces individus qui, dans un contexte politique les poussant à commettre des crimes de masse, se rétractent. »
LES INROCKUPTIBLES
« Devant l'ordre de tuer, il y a, d'une part, ceux qui l'exécutent et, d'autre part, ceux qui s'y opposent et entrent en résistance. Ces deux catégories en masquent une troisième: ceux qui ne s'opposent pas, qui partagent le point de vue des exécuteurs, mais qui refusent néanmoins de tuer. Mal vus des exécuteurs, à qui ils donnent mauvaise conscience, comme des résistants qui les prennent pour des lâches, ils sont méconnus. Le refusant est une personne, à la fois, suffisamment intégrée à son groupe, pour ne pas s'en détacher (voire s'y opposer comme le fait le résistant), et suffisamment autonome pour ne pas agir comme lui. La fine analyse qui en est faite ici, solidement argumentée à partir de cas extrêmes, nous révèle à nous-mêmes, certains fondements de notre vie en société. Elle donne des principes pour comprendre notre vie et notre "monde" et pour nous y orienter: famille, politique, éducation, manipulation, autonomie, différence... et si le monde des refusants était le fondement de notre monde de demain ? »
SILENCE