Derrière les panneaux il y a des hommes : Le livre de Joseph Incardona

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Pierre a tout abandonné, il vit dans sa voiture, sur l'autoroute. Là où sa vie a basculé il y a six mois.
Il observe, il surveille, il est patient.
Parmi tous ceux qu'il croise, serveurs de snack, routiers, prostituées, cantonniers, tout ce peuple qui s'agite dans un monde clos, quelqu'un sait, forcément.
Week-end du 15 août, caniculaire, les vacanciers se pressent, s'agacent, se disputent. Sous l'asphalte, lisse et rassurant, la terre est chaude, comme les désirs des hommes.
Soudain ça recommence, les sirènes, les uniformes. L'urgence.
Pierre n'a jamais été aussi proche de celui qu'il cherche.

Cet ouvrage a reçu le Grand Prix de littérature policière
Grand Prix de littérature policière - 2015

De (auteur) : Joseph Incardona

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Expérience de lecture

Avis Babelio

berni_29

4.00 sur 5 étoiles

• Il y a 1 an

J'aime souvent qu'un roman m'étonne, me surprenne, me dérange aussi. J'aime qu'un roman soit difficile à classer. Derrière les panneaux, il y a des hommes est à ce titre un rendez-vous réussi. Il me tardait de revenir vers l'univers littéraire de Joseph Incardona que j'ai particulièrement apprécié pour deux livres : La soustraction des possibles et Stella et l'Amérique. Ici, je ne saurais vous dire s'il s'agit d'un roman noir, d'un polar, d'un thriller. Joseph Incardona a un talent inouï pour nous perdre dans nos certitudes. Peut-on parler d'un huis-clos lorsque toute la scène du livre se déroule sur une aire de service, en bord d'autoroute, un mois d'août ? Oui, bien sûr, un huis-clos improbable, vous l'admettrez. Ici Joseph Incardona nous donne rendez-vous avec l'asphalte qui chauffe sous le soleil estival, la canicule, la route des vacances. C'est un week-end du 15 août ordinaire. Pierre est là, qui a tout abandonné, il vit désormais dans sa voiture, à l'endroit précis où tout a basculé il y a six mois. Pierre sait qu'il est là, à proximité, celui qu'il recherche, C'est Pierre qui devient le traqueur et c'est là que le roman devient intéressant, s'inverse dans la logique habituelle. Le prédateur devient proie, c'est le noeud de l'intrigue, faire tomber dans sa nasse l'ordure qui a volé la vie de sa fille, détruit son couple... Pierre ne lâchera jamais sa traque, il ira jusqu'au bout, il le sait déjà. Il attend, il surveille, il guette, tandis que de l'autre côté du paysage, si loin là-bas, son épouse, la mère de leur petite, sombre lentement dans l'impossible retour à l'existence... Elle a tout perdu, sa fille, son homme, sa vie... Tout ce qui lui était précieux... Perdre un enfant... Perdre un enfant ainsi... Ne pas savoir ce qu'il est advenu de lui... le roman déchire les pages et ouvre ce gouffre béant. Mais voilà qu'à quelques encablures de là, l'homme traqué récidive pour la troisième fois... L'écriture se mêle à cette intrigue atypique qui nous dévoile dès les premières pages l'identité du salaud. C'est un homme ordinaire qui se fond dans le paysage d'une aire de service au bord d'une autoroute, un mois d'août. L'écriture est acérée, sèche, violente, impitoyable. C'est une écriture inconfortable qui fait mal. Jusqu'au bout, jusqu'au bout de la nuit... C'est une écriture qui transpire de bruits et d'odeurs, l'odeur de l'asphalte, l'odeur de la sueur, l'odeur de la crasse, l'odeur de la pisse, l'odeur de la nuit au bord d'une autoroute. L'odeur de cette vie qu'on ne soupçonne pas, parce qu'on ne s'y attarde jamais, Joseph Incardona nous prend la main pour nous la montrer dans son outrageuse crudité. Il y a pourtant une poésie dans cette solitude désespérée et sans fard. C'est une écriture violente, incandescente, incantatoire, parfois très crue, qui ouvre le chemin vers l'envers du décor, la nuit glauque, sale, où se fait l'attente d'un loup qui guette sa proie. D'autres personnages entrent en scène, c'est tout un peuple qui fourmille dans ce paysage insolite qu'il m'est arrivé de reconnaître pour y avoir fait jadis quelques brèves haltes nocturnes : ceux qui passent, les touristes, ceux qui s'arrêtent pour se reposer, les routiers, ceux qui travaillent, les employés de la station-service, les prostituées... Sans compter les policiers qui cherchent le tueur... Eux aussi vivent et nouent des histoires qui s'entrelacent... Oui, les policiers ont parfois des histoires d'amour entre eux, j'aime croire que c'est ce qui les fait tenir dans leur rude besogne, par-delà leur vocation sacerdotale. Ici le désespoir est sans fin, obsessionnel, féroce dans l'attente insoutenable... J'ai lu ce roman d'une traite, j'en ressors avec un malaise profond malgré le style percutant du récit, qui accroche, nous prend à la gorge... La force du récit ne se situe pas dans l'intrigue, mais bel et bien dans la psychologie des personnages dévastés par l'horreur qui arrive comme un couperet. En cela le roman est très fort, il m'a pris aux tripes. Derrière les panneaux, il y a Joseph Incardona qui nous raconte une histoire belle et déroutante...

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CaroGalmard

3.50 sur 5 étoiles

• Il y a 1 an

Ah il est bon Joseph Incardona. Il a cette faculté délicieuse de mettre une blessure sous les projecteur et la frotter au gros sel pour attiser la douleur. Ses personnages sont tous à cran, comme s'ils avaient un bouton de moustique qui les démangent mais qu'ils ne peuvent pas gratter, parce qu'ils sont en train de porter un cristal fragile et cher. A un moment ou à un autre, la tentation sera tellement insupportable, qu'ils fracasseront le cristal par terre, comme si c'était un pauvre verre duralex dépareillé. Ah enfin relacher la pression. Et comme ses personnages sont tous soit plutôt mesquins, petits, méchants, amochés, comme on sait que c'est un roman, on se félicite avec eux qu'ils aient cassé le beau cristal. Non mais on s'en tamponne le coquillard. Du cristal, du regard des autres, de la vie des autres. On tente juste de survivre à leurs côté sur cette ile tout sauf déserte, qu'est une aire d'autoroute. Les voitures y accostent à toute heure du jour et de la nuit, comme à un quai de port moche. Par obligation. Parce qu'il faut bien s'arrêter. On ne se dit jamais "tiens, j'irais bien faire une balade sur une aire d'autoroute!". On y va à reculons, juste parce qu'on a un besoin physiologique à satisfaire : uriner, baiser, manger. Ceux qui vous reçoivent sont comme prisonniers de ce territoire maudit : tout est moche, à l'économie, pas très bon, pas beau du tout. Et c'est dans ce flux incessant qui recouvre les êtres du voile de l'anonymat, que certains se cachent, se lâchent, se cherchent et finissent par se trouver. Ah c'est noir. Triste. A vous dégouter de prendre l'autoroute. Mais ça fait dun bien de regarder l'obscurité pour mieux profiter du soleil après. N'est-ce-pas ? Alors faut-il le lire ? Oui. C'est bien. Si vous appréciez, n'hésitez-pas à poursuivre votre découverte de cet auteur avec Les Corps solides et La Soustraction des possibles. Et puis arrêtez de prendre l'autoroute. Faites le test : quand vous partez en vacances en prenant les nationales et les petites routes, vous vous sentez en vacances dès que vous partez de chez vous. Et puis vous pouvez faire des pauses sympas : visites touristiques et petits restaurants avec spécialités maison au prix d'un menu sandwich triangle/chips/cookie.

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VALENTYNE

3.50 sur 5 étoiles

• Il y a 1 an

Ce roman est très dérangeant. L’auteur nous présente tour à tour les pensées d’un meurtrier pédophile, puis celles du père d’une des victimes, puis de la mère. Les petites victimes, Marie et Lucie, sont rapidement évoquées, on sait très vite qu’elles sont mortes… En parallèle, on suit également l’enquête menée par deux policiers : un homme et une femme. Quant au style, les phrase sont courtes, percutantes souvent sans verbe. Ou alors sans sujet… Un roman terrible, suffocant, prenant…

Rainette35

4.00 sur 5 étoiles

• Il y a 1 an

Dans ce roman, tout se passe comme dans un huis clos : l'autoroute, les aires de repos et leurs restaurants. Le béton, la saleté, la pollution, la prostitution, la malbouffe, les magouilles financières, la criminalité ordinaire ou extra-ordinaire, les désirs sexuels assouvis ou non, l'extrème chaleur ou la pluie, la misère sociale et la déchéance humaine face à l'indicible font le décor de ce roman. Joseph Incardona, de son écriture vive et ciselée, nous décrit ce monde où il y a tellement de laideur ; le mauvais côté de notre civilisation. Il y a ceux qui sont nés du mauvais côté de la barrière et qui tentent de réaliser leurs rêves, ceux qui sombrent dans l'alcool, la folie. Un livre très désenchanté et tellement d'actualité. Je recommande.

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Fiche technique du livre

  • Genres
    Policiers & Thrillers , Roman Noir
  • EAN
    9782266308489
  • Collection ou Série
    Littérature contemporaine
  • Format
    Poche
  • Nombre de pages
    336
  • Dimensions
    179 x 110 mm

L'auteur

Joseph Incardona

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