Emma : Le livre de Jane Austen

Emma vit seule avec un père toujours un peu souffrant et hypocondriaque pour les autres. Orpheline de mère, elle est bien décidée à ne jamais se marier, histoire de pouvoir se consacrer totalement à lui. Cette situation, qu'elle peut s'autoriser à souhaiter en raison de son aisance financière, ne l'empêche pas de rêver froufrous et jupons pour les autres. Jouer à l'entremetteuse sera dès donc son passe-temps favori. On ne lit pas Jane Austen pour ses intrigues palpitantes mais bien pour se plonger corps et âmes dans la bonne société anglaise du 19e siècle. C'est que l'autrice décrit toujours très finement les relations entre ces familles bien pourvues et ce titre n'échappe pas à la règle. Plus axé sur les personnages que sur les décors champêtres, le récit s'étend environ sur une année, faisant passer ses protagonistes, et par procuration ses lecteurs, par toutes les saisons d'une vie en Province. La jeune Emma, vaniteuse à souhait, assez pimbêche par certains côtés, condescendante sans méchanceté, révèle parfois une certaine fragilité qui estompe l'agacement que son comportement peut provoquer. J'ai bien aimé cette jeune femme qui, sans le vouloir, concrétise l'adage qui dit que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Les personnages secondaires, sans être aussi fouillés, étaient suffisamment consistants pour que l'on s'intéresse à eux et c'est une réelle immersion dans la campagne de Highbury que j'ai vécue pendant quelques heures. Si j'ai retrouvé la légèreté, et parfois l'impertinence, de la plume de Jane Austen, j'ai regretté l'absence d'humour fin qui m'avait beaucoup plus dans Orgueil et préjugés. Peut-être est-ce une question de traduction si je me fie à d'autres chroniques (j'ai lu l'édition de Pretorian Media traduite par Claudia Kühn), ce qui m'incitera à relire ce roman le jour où j'en trouverai une autre édition sur mon chemin.

Bien qu'un peu long et peu convaincant d'un point de vue "romantique" selon moi, ça reste une lecture sympathique. Emma est très agaçante, mais d'une certaine façon attachante. Pas en tant que personnage que l'on peut apprécier "humainement", mais comme une héroïne qui au moins ne laisse pas indifférent. J'ai énormément soupiré, roulé des yeux, pesté à cause d'elle, ce qui a rendu mon expérience divertissante. J'ai quand même eu l'impression que ça finissait par tourner en rond avec pas ou peu d'évolution et c'est ce sentiment final qui prend le dessus maintenant que ma lecture est terminée. 

Emma est le premier titre de Jane Austen que j'ai acheté en version collector chez Hauteville. J'étais très enthousiaste pour le lire mais j'ai beaucoup peiné dessus et je l'ai abandonné. Heureusement une LC m'a permis de m'y remettre et cette fois j'ai réussi à aller au bout. Emma est une jeune fille fière de sa position sociale et totalement décidée à ne pas se marier car son père n'aime pas les changements. Mais elle prend beaucoup de plaisir à marier les gens autour d'elle. Après avoir pris sous son aile une jeune fille naturelle dont elle ignore tout des origines, elle parvint à convaincre celle-ci de ne pas épouser le riche fermier qui la courtise mais de jeter son dévolu sur une plus haute proie. Malheureusement rien ne tourne comme elle l'avait prévu. Et son voisin Mr Knightley doit bien souvent la rappeler à l'ordre en lui faisant comprendre qu'elle fait fausser route. Emma est une héroïne insupportable, riche, gâtée, persuadée d'avoir toujours raison, de mieux savoir que quiconque, sans expérience mais persuadée qu'elle n'est pas nécessaire, imbue d'elle-même, hautaine, méprisant qui est moins bien lotie qu'elle... J'ai eu le plus grand mal à la supporter dans la première partie du livre. Puis lors de son premier revers, j'ai vu un changement ténu mais progressif dans sa personnalité. Même si elle ne finit pas par être totalement vertueuse, au moins commence-t-elle à raisonner un peu plus sainement et à se remettre en question. J'ai finalement réussi à m'attacher à ce personnage, comme aux autres qui présentent tous de nombreux travers. Au final, ces portraits finissent par être très drôles. J'aime également la façon dont la société est dépeinte dans ce roman, la position des femmes et des hommes, les contraintes de statut, de richesse, la façon dont certains personnages se font manipuler par d'autres, et la manière dont les choses finissent par s'arranger. L'écriture de Jane Austen est pour moi une promesse de bons moments de lectures grâce à un style charmant mais également très drôle.

Quel plaisir de retrouver la plume si caractéristique de Jane Austen ! Ce n’est pas sans un léger doute que j’ai plongé dans cette lecture. Ma dernière incursion dans le monde de l’autrice remontait à plusieurs années déjà et je craignais de ne pas l’apprécier autant que ce fut le cas par le passé. Les premières pages m’ont très vite rassurée sur ce point. Dans un village campagnard de l’Angleterre Victorienne, on suit Emma, une jeune femme célibataire dont l’occupation favorite est de jouer l’entremetteuse auprès de ses amies. Elle, au contraire, s’est jurée de demeurer auprès de son père vieillissant et de conserver sa liberté. Sous couvert d’une pseudo-romance qui pourrait paraître « gentillette », Jane Austen porte un regard pour le moins caustique sur la société assez fermée dans laquelle elle évolue. L’écriture, au-delà d’être magnifiquement maîtrisée, mêle humour et intelligence à merveille. Malgré un pavé de près de 700 pages (en version poche), je n’ai ressenti aucun essoufflement lors de ma lecture. Les intrigues s’enchaînent même très naturellement. J’ai spécialement aimé l’autodérision dont fait preuve l’héroïne sur ses propres travers en tant que marieuse et sur le petit fond méchant qu’elle manifeste auprès de certaines de ses connaissances. La façon dont Emma reconnaît volontiers ses torts la rend profondément humaine et attachante. Globalement, chaque personnage qui gravite autour du personnage principal prend sa place. La psychologie de chacun est dévoilée au fur et à mesure de l’histoire, au rythme de leurs rencontres avec Emma. Le roman dans son ensemble dresse donc un portrait global d’une micro-société dans laquelle interviennent des personnes de différentes origines sociales, aux caractères bien spécifiques. Jane Austen ne tombe jamais dans la caricature grâce à la sensibilité qu’elle use pour s’immiscer dans la vie de chacun de ses protagonistes. En résumé, ce n’est probablement pas mon roman préféré de Jane Austen de par l’histoire en elle-même qui m’a moins interpellée. Pour autant, c’est un excellent roman que je conseille à tous les amoureux de la littérature Victorienne en général et de Jane Austen en particulier.