La vie scélérate : Le livre de Maryse Condé

La vie scélérate est une saga en quatre parties se déroulant au XXe siècle. Foisonnante de personnages, de lieux, d’idées, elle nous livre les pérégrinations, les émois, les disputes, les secrets, les malheurs de la famille Louis à travers les yeux de la plus jeune, adolescente de quatorze ans qui tente de tracer la généalogie du clan pour comprendre les non-dits et les erreurs, les ambitions et les désillusions, les errances, les personnalités avec leur courage et leur faiblesse. Si la vie est scélérate, c’est parce qu’elle est compliquée et injuste. Maryse Condé traite des thèmes qui lui sont chers : les rapports noirs/blancs, l’identité raciale, tout ce qui incarne les racines et l’appartenance, comme la famille et ses liens. Elle défend ses causes qui passent par un militantisme selon Marcus Garvey (1887-1940, militant noir du XXe siècle) qui prône la fierté d’être noir : « I shall teach the Black Man to see beauty in himself » (p 54). La langue (phrases et expressions créoles traduites en notes de bas de page) crue et imagée, la présence des morts (les « femmes invisibles »), le destin omniprésent dans le récit témoignent d’une tradition antillaise appartenant au réalisme magique caribéen. Décédée le mardi 2 avril 2024, à l’âge de 90 ans, Maryse Condé est reconnue comme une voix essentielle de la Guadeloupe. Sa maison natale est identifiée par une plaque et l’aéroport porte son nom. En mai 2025, j’ai visité le Pavillon de la ville (un des joyaux de l’architecture pointoise, ancien presbytère bâti entièrement en bois en 1806 sur une parcelle transversale allant de la place de la Victoire à la Place Gourbeyre). Il sert à présent de lieu d’expositions et de réceptions et accueille depuis 2023 la Fondation Maryse Condé. C'est au cours de cette visite que j'ai fait la connaissance de sa fille aînée que je remercie chaleureusement pour sa cordialité. voir plus sur anne.vacquant.free.fr/av/

3e lecture guadeloupéenne, il fallait bien parler de la grande Maryse Condé, malheureusement décédée l’an dernier. Journaliste, professeure de littérature et écrivaine française, elle prônait aussi l’indépendance de la Guadeloupe. Comme j’avais déjà lu *Moi Tituba, Sorcière* et *Traversée de la Mangrove* (à chroniquer un jour), c’est *La Vie Scélérate* qui s’est retrouvé entre mes mains pour la fin du voyage. Encore une grande histoire de famille, puisque l’œuvre raconte les Louis, famille originaire de la Guadeloupe sur plusieurs générations, du début du XXe siècle jusqu’aux années 1970. Originalité par rapport aux lectures précédentes, cette famille sortira souvent des frontières de l’île, dans les Caraïbes, aux Etats-Unis et en Europe. On commence avec Albert Louis, un charpentier qui quitte la Guadeloupe pour le Panama et y fera fortune grâce à la construction du canal - en survivant à des conditions de travail horribles. La suite raconte ses descendants, notamment son fils Jacob et sa petite fille Thecla (se munir d’un stylo pour dessiner l’arbre généalogique des Louis !). La vie est scélérate parce qu’elle est dure, injuste, et la scélératesse est aussi celle de l’embourgeoisement qui endort et qui tait. Maryse Condé aborde dans ce roman des thèmes qui lui sont chers : l’héritage colonial et ses conséquences, la quête d’identité et les racines caribéennes, le racisme, la condition féminine, les rapports entre classes sociales, l’émigration et l’exil. C’est un roman majeur, mais avouons-le assez abrupt, exigeant. Je conseille de découvrir Maryse Condé avec *Moi Tituba, Sorcière*, dont le cadre, l’intrigue et le style se lisent plus facilement, tout en gardant l’engagement profond aux valeurs de l’autrice.

J'ai aimé la plume et le style de Maryse Condé, que je découvrais avec "La vie scélérate". J'ai voyagé en Guadeloupe tout au long de cette lecture mais je me suis un peu emmêlée les pinceaux avec les différents personnages, les confondant les uns avec les autres ou confondant leurs liens de parenté. Merci au challenge Solidaire pour la découverte de cette auteure!