La Maison noire : Le livre de Yûsuke Kishi

Dans le cabinet d'assurances où il travaille, Shinji Wakatsuki fait figure d'employé modèle. Méticuleux, rigoureux, il traque sans relâche les incohérences dans les avis de décès. Car Wakatsuki le sait, nombre d'assurés sont prêts à faire de fausses déclarations pour obtenir un dédommagement. Jusqu'au jour où un certain Komoda le sollicite pour un constat dans sa maison. Sur place, le choc. Le corps d'un enfant de douze ans se balance au bout d'une corde. Suicide ? L'instinct de Wakatsuki lui dicte qu'il s'est passé autre chose dans cette demeure lugubre… Après l’excellent "Le leçon du mal", Yûsuke Kishi nous livre un thriller très sombre et souvent dérangeant, un nouveau récit horrifique et jubilatoire dans les méandres de la psyché humaine, avec en arrière-plan une vision acide et sans concession sur la société japonaise qui en pleine évolution où l’empathie disparaît pour ne privilégier que l’appât du gain. Une vision édifiante qui rime avec une certaine déshumanisation de cette nation, ce thriller ne répond pas à toute une sociologie et ses codes, mais évite les nombreux stéréotypes sur la culture japonaise véhiculés en Occident. Une plume envoûtante avec cette écriture si particulière, une prose inimitable et savoureuse qui nous emporte sur des chemins sinueux, d’une authentique noirceur, à la fois élégante et féroce. Une intrigue qui commence par quelques longueurs très explicites, le temps de nous familiariser par des arguments et des explications pertinentes sur le rôle de l’assurance vie au Japon. Puis l’auteur installe son intrigue et nous accompagne dans les pas de Wakatsuki, ce dernier est prit dans un redoutable tourbillon. Étant un employé modèle, Shinji ne se doute pas un seul instant, qu'il va mettre les pieds en enfer… Les cauchemars récurrents du héros sont d'une force inouïe, et dune rare intensité évocatrice. Et fait peu à peu basculer le jeune agent d’assurances dans un engrenage infernal, les assurés le harcèlent, le mal le pénètre, de nouvelles découvertes créent un enchaînement de malheurs inéluctables, Wakatsuki est terrifié, obsédé par la conviction qu'il s'agit d'un meurtre maquillé en suicide, et hanté par un drame intime qui vient resurgir de son enfance… L'ambiance devient vite oppressante, voir insoutenable, le récit devient dense et d’une terrible précision visuelle, le suspense se veut constant. L’auteur aime le cinéma, le sang, l’horrifique et le trash. Il l’a déjà démontré avec La leçon du mal, il récidive avec ce nouveau thriller qui se veut moins pertinent dans son approche. Cela dit, Yusuke Kishi nous offre une nouvelle fois une histoire captivante, en très peu de mots, l’auteur nous brosse un portrait parfait et précis de ses protagonistes. Nul besoin de vous donner moult précisions, tout se joue dans une réaction, une attitude, un regard parfaitement retranscrit qui font mouche et percutent. Un polar féroce et cynique, une lecture parfois insoutenable, un thriller délicieusement cauchemardesque, étrange et très addictif. La révélation et le dénouement de l'intrigue sont intenses, mais un peu convenues et sans réelle surprise. A lire absolument et surtout découvrir le parfum vénéneux du thriller nippon, une littérature noire de grande qualité entre le redoutable Keigo Higashino, les romans policiers de la talentueuse Miyuki Miyabe, Natsuo Kirino, Seishi Yokomizo et bien d’autres.

Quel régal ! Même si cette lecture laisse un goût amer, une fin inachevée et appelle encore une histoire tout autant malaisante et macabre. Ici, la psychologie est mise en avant, mais également la folie de certaines personnes (oui, ça peut paraître redondant mais il faut le lire pour comprendre ;) ). On ne nous laisse pas de répit et j'ai adoré cette angoisse qui m'a tenu tout le long de ma lecture. Je me demande à quelle sauce l'auteur nous mangera prochainement.

La première impression qui ressort de ma lecture, c'est le malaise. Une sensation oppressante, glauque, poisseuse, en lien direct avec l'ambiance sombre de cette histoire de suicide et d'assurances-vies où le style littéraire japonais est très dépouillé. J'ai longtemps hésité sur la notation à cause de certains passages un peu mous, mais après coup, je pense que l'auteur s'en tire avec les honneurs. Dans les années 90, au cœur d'un Japon qui se démène avec ses traditions ancestrales et qui est à la veille de profonds changements de société, Wakatsuki travaille dans un cabinet d'assurances. Lorsqu'un dossier très particulier attire son attention, il va se retrouver piégé dans un engrenage morbide... J'ai bien aimé les réflexions de l'auteur sur les maladies mentales, les facteurs aggravants, la génétique et la psychopathie. J'ai trouvé que c'était extrêmement bien expliqué et que l'ensemble était bien équilibré entre la dureté du récit et les explications scientifiques et parfois philosophiques qui viennent ancrer certains éléments au récit. Il faut s'accrocher durant le premier quart mais une fois l'action bien installée, dur de le lâcher. C'est totalement addictif quoique assez violent, je tiens à le souligner. Les obsessions de Wakatsuki et ses cauchemars récurrents font monter progressivement la tension. Certaines scènes très gores et très visuelles provoquent une terreur absolue qui tranche avec le vernis lisse de cette société nippone et policée qui cherche toujours à préserver les apparences. Au-delà des thématiques du thriller noir, Yusuke Kishi offre un regard froid et sans concession sur le Japon de l'époque, bien loin des rêves qu'on peut entretenir avec ses traditions surannées, sa discipline, ses mariages arrangés qui brisent des vies, ses yakuzas et sa corruption, ses escroqueries perverses à l'assurance, ses conditions de travail où la persévérance et le dévouement professionnels priment, parfois jusqu'à l'épuisement. Pour conclure, je dirais que cette première approche de l'œuvre Yusuke Kishi est plutôt réussie et je pense que "La lecon du Mal" ne tardera pas à sortir de ma pal.

Deuxième roman de cet auteur japonais que je lis. Il s'agit d'un roman policier mais qui flirte beaucoup avec l'horreur. Le personnage principal n'est absolument pas policier. Il travaille dans une compagnie d'assurance et doit vérifier qu'il n'y a pas de fraudes. De temps en temps, des morts semblent suspectes. Un jour, un client l'appelle dans sa maison (une maison toute noire où règne une odeur nauséabonde) et ensemble, ils découvrent le fils de l'homme, un enfant de 12 ans, pendu. Une enquête sera menée pour savoir s'il s'agit d'un meurtre ou suicide, ce qui retardera le versement de l'argent de l'assurance. Le père viendra harceler tous les jours les employés de l'Agence. Puis il mourra à son tour, les soupçons se porteront alors sur sa femme. L'intérêt de ce roman pour moi c'est de montrer le monde du travail Japonais. On comprend que les employés sont dévoués à leur travail, ils peuvent travailler dans la même société toute leur vie. Ils sont très respectueux de la hiérarchie, ont peu de loisirs. Cependant j'ai été gênée par les descriptions "gore" des meurtres. Pour moi, cela dépassait les limites du supportable. Beaucoup trop de détails sanglants et de descriptions horribles, je préfère quand les choses sont suggérées. J'ai préféré de loin "La leçon du mal".