Etta et Otto (et Russell et James) : Le livre de Emma Hooper

À 83 ans, Etta n'a encore jamais vu l'eau. Aussi, ce matin-là, elle laisse une lettre à Otto, son mari, l'informant de son départ. Même si, depuis sa ferme du fin fond du Saskatchewan, l'océan se trouve à pas moins de trois mille deux cent trente-deux kilomètres, elle entreprend ce périple à pied. Quelques provisions et vêtements, le fusil d'Otto avec des balles et des feuilles de papier blanches et la voilà partie aux aurores. Si son mari ne s'inquiète pas, Etta lui ayant promis de ne pas oublier de rentrer, ce n'est pas le cas de leur ami et voisin, Russel. S'il envisage de partir à sa recherche, s'inquiétant pour elle, il ne se doute pas qu'elle n'est pas seule, un coyote ayant décidé de l'accompagner, de même que de nombreux souvenirs... C'est à un véritable voyage que nous convie Emma Hooper dans ce roman qui emprunte les chemins de l'amour, de la tendresse et de l'amitié. Et des chemins parfois déroutants si l'on accepte le fait que le coyote, James, soit doté de parole. L'auteure entremêle habilement passé et présent. D'un côté, le périple d'Etta, qui suscitera curiosité et admiration au fil des jours, et le quotidien d'Otto qui s'occupe comme il peut en attendant son retour. De l'autre, le passé des deux époux, balayant leur enfance, leur rencontre dans l'école du village où Etta devient institutrice, la guerre qui éloigne Otto de chez lui, leur correspondance pendant le conflit, l'amitié indéfectible entre Otto et Russel, l'amour de ce dernier pour Etta... Autant de souvenirs touchants, parfois émouvants, qui donnent corps et âme à ces trois personnages liés à jamais que la vie n'a pas toujours épargnés. En abordant subtilement la maladie et la vieillesse, l'auteure, de sa plume délicate et poétique, navigue gracieusement sur le fil des émotions.

Roman tout en finesse entre ces trois destins dans les années 40. C’est calme et presque apaisant malgré les destins pas toujours très roses des personnages. On ne sait pas tellement si Etta est malade ou non car elle a une fiche avec ses coordonnées sur elle. Son histoire avec le coyote est intéressante car rationnellement elle ne peut parler avec mais là il l’aide à avancer, à se nourrir, à se donner du courage pour la suite. On ignore si elle est rentrée et comment elle a fini son périple. À un moment, plutôt vers la fin, c’est confus car on dirait qu’elle entre en hôpital psy puis Etta et Otto se confondent. Sinon le reste est plutôt sympa.

Ce roman est très déroutant, de part sa structure, complètement désordonnée chronologiquement ; de part la multitude de personnages secondaires (pas si secondaires, évidemment) ; de part la confusion volontaire entre les époques, les protagonistes, les lieux... Grâce à une écriture douce et forte à la fois, Emma Hooper réussit à nous faire voyager et nous invite à nous interroger sur la maturité, la vieillesse, le passé et les conséquences de choix parfois fortuits. J'ai beaucoup aimé ce beau roman déstabilisant et poétique, étrange et pénétrant.

un livre doux, magique, et puissant dans sa simplicité. j’aurais pu accorder une meilleure note, n’eut été de la première moitié qui m’est apparue moins intéressante, peut-être certaines longueurs. C’est à partir de la 2e partie où j’ai vraiment pris la mesure de ce récit qui m’aura presque arraché quelques larmes.