Le tableau du peintre juif : Le livre de Benoît Séverac

Comment un looser malchanceux, chômeur, en pleine crise conjugale, fataliste et entêté se retrouve t-il emprisonné à Jérusalem accusé de spoliation de biens juifs durant le dernier conflit mondial alors qu'il venait faire reconnaître ses grands-parents comme Justes parmi les Nations ? Oui, ses grands-parents, résistants, avaient caché des juifs avant de les faire passer en Espagne, dont un peintre reconnu, qui en remerciement leur avait laisser une toile. Sauf que le peintre et sa femme furent dénoncés et déportés en camp de concentration ou ils disparurent, selon le centre Yad Vashem, mémoire du peuple juif et de la shoah. Donc Stephane, le narrateur, se lance dans une enquête personnelle afin de rétablir l'honneur de ses grands-parents. Et remonte les filières françaises d'exfiltrations de personnes recherchées par les nazis à l'époque, puis les archives espagnoles, plus difficilement car sujet potentiellement sensible que le traitement des juifs d'Europe sous Franco lors de la seconde guerre mondiale, sujet par ailleurs rarement traité et très intéressant. Le roman s'attache donc à l'enquête acharnée d'un amateur désintéressé pour faire la lumière sur son héritage familial, tant financier que moral surtout, qui passe de Firminy aux Cévennes puis à Toulouse et enfin en Espagne, de manière très linéaire, où il rencontré toujours une bonne âme le guidant à la station suivante sur son chemin de croix vers son Graal. Et le roman s'attache aussi à un homme en quête de lui même, de dignité après des déboires professionnels, de fierté de ses racines familiales malmenées par cette vilaine affaire, de rédemption vis à vis de son couple sombrant et de sa femme le méprisant, l'entraînant ainsi dans une mélancolie dont seule cette recherche de la vérité le sauve. Et dont l'aboutissement lui permettra de se reconstruire, professionnellement, familialement et affectivement. De ces différentes parties, la trajectoire des juifs en Espagne franquiste m'est la plus captivante, tout comme la procédure d'inscription de personnes au titre de Justes par Israël. Cette œuvre n'a pas la prétention d'être historique, mais ouvre des perspectives à qui veut s'y intéresser. L'enquête en elle-même, linéaire, est en fait un lien, subtilement mené, entre les différents thèmes de la trame du roman, et se conclut sur un inattendu coup de théâtre. La trajectoire personnelle et sentimentale d'un homme vieillissant, bien que plutôt chargée et flirtant avec le pathos, passe bien car il ne s'apitoie pas trop sur lui même, et relate en fait une situation très commune, dont tout un chacun a un exemple autour de lui. Un très bon roman, sortant des sentiers battus, d'un auteur talentueux.

Le tableau du peintre juif est une histoire esquissée ligne après ligne… Nul vernis, une aquarelle de la vie dans le chaos du monde, une fuite en avant mais surtout un héritage plus lourd qu’il n’y paraît. Certains n’y verraient qu’un bien matériel à saisir. Il offre pourtant, une toute autre perspective, celle des coeurs, des plus flétris ou plus vertueux et c’est ce qu’il a de plus précieux. « La mémoire s’efface et devient l’histoire. » L’histoire, c’est Stéphane, qui va nous la raconter, lui à qui on a donné ce tableau autrefois offert à ses grands-parents par un couple juif. Derrière cette peinture, il y a tout d’abord lui, un cinquantenaire de bonne volonté mais complètement paumé dont le couple et au bord du gouffre depuis une faillite, avec sa fierté à retrouver, celle aussi de sa famille. Derrière cette peinture, il y a ses grands-parents qui ont tu la portée de leurs engagements dans la résistance. Pourquoi? Derrière cette peinture, il y a Eli Trudel et sa femme qui ont entamé un véritable périple pour fuir la folie nazie comme beaucoup d’autres à travers le monde. Derrière cette peinture, il y a des héros d’une simplicité déconcertante dans le passé comme dans le présent. Des passeurs et des familles qui ont pris des risques pour sauver des inconnus en danger, des archivistes, des journalistes et des particuliers qui ont collecté , protégé et diffusé des informations sur les victimes de la Shoah. Et puis derrière cette peinture, il y a les autres, ceux qui n’ont rien fait ou pire qui ont dénoncé, spolié. Comment déceler le vrai du faux? De la France à l’Espagne en passant par Israël, la quête sera brutale et la révélation hallucinante et terrible. Bouleversant!

Le bandeau autour de ce livre de poche s'emballe un peu, mais pourquoi pas, c'est sûrement moi qui suis un petit peu restée à côté de ce roman ! #x1f609 #x1f4da Quelques mots sur l'histoire : C'est à une véritable enquête que va se livrer Stéphane Milhas, la cinquantaine, qui pourtant n'est pas plus flic que moi ! À la faveur du débarrassage d'une maison, son oncle et sa tante lui donne le tableau d'un peintre juif, qui aurait été offert à ses grands-parents, ayant caché le peintre Eli Trudel et sa femme pendant quelques jours en 1943. Stéphane s'emballe carrément, et contre l'avis de sa femme qui aurait bien aimé vendre ce tableau qui avait une certaine valeur, veut que ses aïeux, même morts, puissent accéder au statut de Justes, ayant protégé des Juifs. En parallèle de son histoire à lui, on suivra les derniers jours de ce couple avant sa disparition. Pour des camps de la mort ou pour la liberté ? #x270d Après ma lecture : J'avais déjà eu l'occasion de lire Benoît Séverac, et j'ai aimé son écriture, même si j'ai trouvé dans ce roman un petit peu trop de descriptions. Ce roman est tout autant la quête de la vérité que la quête de soi-même pour ce personnage principal, plutôt idéaliste et sentimental, mais opiniâtre. Au bord de l'implosion de son couple, après avoir perdu son entreprise, ce père de deux grandes filles à qui il ne sait toujours pas parler, il trouve dans cette recherche qu'il veut mener jusqu'en Israël, un cheval de bataille pour se redonner confiance ! Il n'est pas au bout de ses surprises... et de déambulations ! Plus qu'une enquête, il s'agit bien là d'un roman historique, et l'auteur a lui, mené de belles recherches pour nous expliquer le trajet des œuvres d'art volées pendant la Seconde Guerre mondiale. Par rapport à tout l'enjeu des recherches du héros, j'ai trouvé la fin plutôt terne. Après 250 pages j'ai commencé à m'essouffler, et j'attendais que ça se termine... Par contre pour quelqu'un qui se passionnerait pour la résistance, la déportation et l'art, je pense que c'est un bon roman.

D’une plume incisive, mais aussi souvent bouleversante, car pleine d’émotions, Benoît Séverac alterne habilement entre des chapitres numérotés de 1 à 36 se déroulant à notre époque et des chapitres datés du 12 décembre 1943 au 12 janvier 1944, pour nous raconter le périple du « tableau du peintre juif », Eli Trudel. Dès les premières pages du roman, le lecteur est happé par le récit très vivant, à la première personne du singulier, qui le conduit d’Israël en France, dans les Cévennes, puis dans le Haut-Comminges, mais aussi en Espagne en quête de la reconstitution d’une histoire trouble, celle d’un tableau dont le personnage principal vient d’hériter. Bien que fiction, le roman s’appuie largement sur des faits réels et permet de s’interresser entre autres aux questions de spoliation. Plus qu’un polar, un magnifique roman noir historique !