Résister à la culpabilisation - Sur quelques empêchements d'exister : Le livre de Mona Chollet

Le titre est à lui seul, une invitation à la rébellion, oui, mais laquelle ? Celle qu'on manifeste à l'égard de ses parents, de ses éducateurs, de ses patrons, de ses amis ou de ses amours, de la société en général ? CONTRE soi-même et POUR soi-même. Il faudra donc se faire violence pour décortiquer tous ces engrenages qui depuis notre naissance régulent nos actes et nos pensées pour se libérer du carcan des injonctions qu'on s'impose à soi-même. Je ne rajouterai pas grand chose aux fines et pertinentes analyses qui ont précédé ce billet. Mona chollet brasse large, s'appuyant sur de solides références littéraires, historiques et journalistiques, pour dézinguer cet ennemi intérieur qui nous pourrit la vie et les neurones ! La mécanique sociétale et religieuse à l'oeuvre relayée par des millénaires d'omnipuissance partriarcale a forgé ce mal qui semble affliger tout individu doté d'une conscience, Saint Augustin et le mythe du péché originel, les femmes en ligne de mire, causes de tous les maux ou presque, et cependant premières victimes de viol et de violences conjugales, les mères sacrifiées sur l'autel de la maternité et les épouses vertueuses qui subissent une domination consentie et se fustigent de ne « jamais en faire assez », l'allégeance inconditionnelle au travail exigée de celles qui se refusent le droit à l'oisiveté, au lâcher prise, à l'arrêt de travail dans une société basée sur la réussite, l'hyper consommation et la culpabilité du bonheur quand tout part en vrille sur la planète. Ce que j'ai aimé dans ce livre, c'est l'analyse pertinente des mécanismes qui nous conduisent à nous dénigrer à nos propres yeux et à nous refuser d'être vulnérable, d'exiger de soi plus que ce que l'on peut donner et de ne souvent pas savoir dire non pour « se choisir ». Ce que j'ai moins aimé, c'est qu'une partie de l'humanité est laissée en rade, féminisme oblige, Je m'attendais moi aussi, comme certain(e)s babéliotes l'ont évoqué, à ce qu'on parle de l'être humain en général, qu'on confronte la culpabilité des uns et des autres pour aboutir à un questionnement plus général, un équilibre des ressentis homme/femme, sans parler des minorités, sans parler de l'éducation des enfants, souvent à la source de bien des maux/mots, ou encore de l'homophobie, etc... Dans la mesure où la culpabilisation est un concept et une souffrance partagés par tous les genres de la planète. Ou alors circonscrire le sujet à travers un titre plus explicite. Néanmoins, ce livre a le mérite  même s'il pèche par son incomplétude. de mettre en lumière une problématique qui nous touche tous et m'incite à aller (re)visiter l'univers littéraire de Mona Chollet. J'espère simplement ne pas m'enfermer dans un univers de redondances où pour se libérer de ses chaines et se déculpabiliser, on afflige systématiquement autrui (et donc on le culpabilise) de ces maux qui ne sont en fait que le fruit de notre difficulté à gérer les nôtres.

Mona Chollet est surtout connue pour son essai féministe sorcières, que je n'ai pas lu, mais qui me tente beaucoup. C'est avec sa dernière publication que je découvre cette autrice, avec la version audio de Résister à la culpabilisation : Sur quelques empêchements d'exister, grâce à netgalley et aux éditions Lizzie que je remercie. J’ai été attirée par le titre qui m’a interpellé et l’autrice que je voulais découvrir. Elle y parle de cette part de nous-même qui nous harcèle, nous rabaisse et nous pourri la vie, nous sommes souvent nos propres harceleurs, d’autant plus quand on est une femme ou qu’on appartient à une minorité (raciales, sexuelles…), mais aussi les enfants. J’ai trouvé ce livre particulièrement percutant, d’ailleurs j’ai mis longtemps avant d’écrire cette chronique, car je manque de mots pour vraiment exprimer l’intérêt et la profondeur du propos. Le message féministe est omniprésent et passionnant, il y a aussi une grande partie sur les mères et les pressions qu’elles subissent. La partie consacrée à l’enfance m’a beaucoup fait réfléchir sur la perception que l’on en a en tant qu’adulte, mais je dois dire que j’ai été assez déstabilisée et pas toujours totalement d’accord, mais ça m’a poussé à la réflexion, c’est certain. Une autre partie est consacrée au culte du travail, au militantisme… L’autrice parle de tout cela de manière passionnante, mêlant anecdotes, recherches et se basant également sur ses expériences personnelles, j’ai beaucoup aimé la manière dont elle se confie et partage tout cela. Cet essai est remarquable et m’a vraiment marquée. Je le recommande absolument. La version audio est très agréable à écouter.

C'est toujours un plaisir de lire un livre de Mona Chollet. Elle nous fait réfléchir au monde patriarcal tel qu'il existe encore aujourd'hui, à notre condition de femmes et, comme le titre l'indique, à cette culpabilité inhérente à notre condition d'humain mais surtout de femmes. De l'aspect historique et religieux à l'époque actuelle, laissez-vous entraîner sur les chemins de la réflexion !

Sur certains points, j' en attendais parfois plus mais je crois que Mona Chollet fait une espèce de vulgarisation et donne beaucoup de références qui nous permettent d'aller plus loin si on le souhaite. La partie sur l'éducation m'a particulièrement intéressée. Et je n'avais jamais pensé l'enfance ainsi.