Comment voyager dans les terres oubliées : Le livre de Sarah Brooks

Prix Poche RELAY-KitKat 2025 Huis-clos (quasiment) à bord d’un train en plein milieu du XIXème siècle. L’atmosphère est incroyable, entre l’orient express et le transperce neige. J’ai eu du mal à me familiariser avec tous les personnages au départ, mais dès la moitié du livre tout s’est mis en ordre. Seul regret du côté des personnages : la capitaine, charismatique bien qu’omni-absente est mystérieuse et aurait pu être plus travaillée. Immersion dans un monde entre anticipation et fantastique qui nous fait réfléchir sur les impacts de l’Homme sur la nature, les relations humaines inter-« classes », le corporatisme dans la société, … La mise en place aurait pu être plus rapide, le dénouement aurait pu être plus abouti, un peu trop abrupte selon moi. Bref un livre plaisant, original et inattendu.

Ce livre, ce n'est pas un simple récit de voyage, c'est une traversée dans un pays mystérieux, dans une zone floue du monde, qui attire en même temps qu'elle effraie, un endroit coincé quelque part entre la Chine et la Russie. Son nom "Les Terres oubliées". Dès le départ du transsibérien qui le traverse, on sent qu’il y a un prix à payer. Pas juste celui du billet, mais quelque chose de plus insidieux. C'est donc dans un huis clos, à ciel ouvert, qu'on débute cette histoire. Et d'entrée de jeux, on ressent une ambiance très particulière, où le danger rode à chaque seconde. Chaque wagon recèle ses mystères, ses tensions feutrées, ses non-dits. Chaque personnage aussi a des desseins inavoués, des secrets qu'il veut garder bien enfouis. Il y a Weiwei, cette jeune enfant qui vit à bord de ce train, depuis sa naissance, Marya, dont le but est de trouver, lors de ce voyage, les preuves pour innocenter son père, ancien employé de la Compagnie, Henry Grey, ce savant consumé par l'ambition et le Professeur, ce vieil érudit qui fait office de figure paternel pour Weiwei, mais qui semble bien connaitre des secrets. Et puis, il y a cette redoutable Capitaine, peu visible mais dont l'aura est bien présente à bord de ce train. Je ne peux pas en dire plus sur l'histoire au risque de vous spolier, mais c'est véritablement un roman d'aventure grandiose, avec un mélange de tension et de mystères noirs et épais, qui n'est pas sans me rappeler celui que j'ai ressenti lors de la lecture de la série Blackwater. C'est sombre, presque fantastique, chaque mot semble pesé, chaque silence, intentionnel. Et j'ai adoré. J'ai ressenti cette instabilité permanente, cette lente bascule du réel, et chaque chapitre en appelait un autre, qui fait que ce roman se lit presque d'une seule traite, tellement il embarque son lecteur dans ce long, très long périple à travers des terres biens étranges. Et attention, si vous prenez ce train, ne regardez pas trop longtemps par la fenêtre. Qui c'est sur quoi vous allez tomber.

Loin d'un Stephen King, d'un Snowpiercer ou d'un Jules Verne, les images qui se sont imposées à moi dès les premières pages tiennent plutôt du Ghibli — l'adaptation de Nausicaa, plus précisément, pour les couleurs, l'ambiance, les messages. Sans être aussi sombre que l'œuvre complète, on peut ajouter quelques touches de Princesse Mononoké pour le rapport à la nature ancienne. La platitude des deux premiers tiers (qui laisse trop peu de non-dits pour investir les lecteurices adeptes du show don't tell) est vite rattrapée par le point culminant et la fin. Oui, vite : le livre se lit sans efforts. On regrettera le manque d'épaisseur de Marya (au moins en donne-t-elle à un love interest qui ne fait pas beaucoup de mystère) en place de personnage principal, le manque de travail sur des personnages de fond pourtant très sympathiques en compensation et certains éléments d'histoire qui ne sont amenés qu'au moment précis où on a besoin d'eux – comme c'est pratique. Restent une batterie de personnages intéressants et colorés qui sont attachants comme des stéréotypes de théâtre. Un bon roman dont on profiterait mieux s'il était rangé en jeune adulte ou au moins s'il n'était pas vendu pour ce qu'il n'est pas.

Une jolie couverture, un titre énigmatique, la promesse d’un voyage mystérieux, dangereux et dont l’on ne revient pas indemne… Il ne m’en fallait pas plus pour être fortement intriguée ! Bienvenue à bord du Transsibérien, ce train à vapeur, immense et robuste, construit et pensé dans le moindre détail afin de résister à la malveillance des Terres oubliées qu’il traverse de long en large, de Pékin à Moscou (et vis versa). Une traversée qui n’est pas sans risque et pour laquelle les voyageurs signent même une décharge, avant d’embarquer, afin de dédouaner la Compagnie en cas d’accidents (ça inspire confiance…). Nous voici plongés dans un récit opaque et dense. Un récit qui prend son temps, qui s’installe, se construit. Qui s’articule autour des personnages, autour de certaines problématiques. Un roman d’ambiance plutôt que d’action - à l’inverse de ce que l’on aurait pu croire et attendre au vu du résumé. Une atmosphère pesante, un suspens latent. Ici et là, des touches de fantastique viennent s’incorporer au récit, titillant notre curiosité. Que s’est-il passé lors du précédent voyage ? Quelle menace plane sur cette traversée et quels risques pour les voyageurs ? Je me suis beaucoup questionnée tout au long de ma lecture et je n’en voyais pas très bien l’issue. J’ai craint d’être déçue par le fin mot de cette histoire… Mais, personnellement, j’ai beaucoup aimé ce voyage ! Je n’ai pas dévoré cette lecture et cela m’a même pris un peu plus de temps que prévu pour en venir à bout, mais j’ai tout de même été captivée par son étrangeté. On ne sait pas vraiment à quoi s’attendre, on ne comprend pas forcément tous les enjeux. Un certain flou demeure… Mais tout ceci participe à l’ambiance. Mêlant péril et merveilleux, danger et beauté. D’ailleurs, les descriptions des paysages qui s’étendent derrière les vitres du train m’ont subjuguée. J’ai également apprécié rencontrer les divers personnages qui composent cette histoire, chacun étant, à son échelle, un rouage important du récit puisqu’il s’agit tout de même d’un huis clos. J’aurais cependant apprécié que la réflexion soit un peu plus poussée, les phénomènes mieux explicités. Peut-être m’a-t-il manqué un brin de profondeur. A l’inverse quelques longueurs sont à déplorer… Mais ce sont là mes seuls “reproches”. En revanche, je ne comprends pas du tout sa place dans la sélection polar ! 7ème lecture du Prix poche Relay x Kitkat x Gleeph Challenge Multi-défis 2025